Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Racine (Jean) (suite)

Racine ne démentit pas sa piété jusqu’à ses derniers instants. Il avait, par testament, exprimé le désir d’être inhumé à Port-Royal aux pieds de la fosse de M. Hamon. C’était une façon d’exprimer son repentir et la sincérité de ses sentiments religieux. Les quatre Cantiques spirituels qu’il composa pour Saint-Cyr en 1694, admirables par la grâce, le naturel et l’élévation de la pensée, montrent qu’il avait mis tous ses dons au service de Dieu. Un zèle imprudent pour Port-Royal à une époque où la persécution se faisait sentir le brouilla avec Mme de Maintenon et le mit en demi-disgrâce à la Cour. Après avoir souffert d’un abcès au foie, Racine mourut chrétiennement le 21 avril 1699. Louis XIV lui accorda la sépulture à Port-Royal.

M. S.

➙ Classicisme / Théâtre / Tragédie.

 A. Masson-Forestier, Autour d’un Racine ignoré (Mercure de France, 1910). / F. Mauriac, Vie de Jean Racine (Plon, 1928). / J. Giraudoux, Racine (Grasset, 1931 ; repris dans Littérature, Grasset, 1941). / H. Bremond, Racine et Valéry (Grasset, 1932). / T. Maulnier, Racine (Gallimard, 1935). / P. Moreau, Racine, l’homme et l’œuvre (Boivin, 1943 ; nouv. éd., Hatier, 1968). / C. Bénichou, Morales du Grand siècle (Gallimard, 1948, nouv. éd., 1967). / J. Pommier, Aspects de Racine (Nizet, 1955). / L. Goldmann, le Dieu caché (Gallimard, 1956). / R. Picard, la Carrière de Jean Racine (Gallimard, 1956). / C. Mauron, l’Inconscient dans l’œuvre et la vie de Racine (Ophrys, Gap, 1957). / R. Barthes, Sur Racine (Éd. du Seuil, 1963). / R. Elliot, Mythe et légende dans le théâtre de Racine (Minard, 1969). / M. Delcroix, le Sacré dans les tragédies profanes de Racine (Nizet, 1970). / J.-J. Roubine, Lectures de Racine (A. Colin, coll. « U 2 », 1971). / D. et D. Kaisergrüber et J. Lempert, Phèdre de Racine. Pour une sémiotique de la représentation classique (Larousse, 1972). / C. Borgal, Racine (Éd. universitaires, 1974). / A. Niderst, les Tragédies de Racine (Nizet, 1975).

racisme

Théorie selon laquelle certains groupes humains — caractérisés par leurs origines, leur nationalité, leur appartenance religieuse ou leur race — présenteraient, dans leur histoire, leurs mœurs, leur comportement, des signes d’infériorité justifiant des traitements discriminatoires à leur égard.



Introduction

À l’origine, le racisme se confond avec la xénophobie : on considère comme néfaste tout contact avec l’étranger à la tribu, qui tire sa force de son homogénéité et de l’acceptation par tous ses membres des mêmes règles et principes, inconnus ou refusés par l’élément exogène.

Dans un second stade, le refus de l’intrus est justifié par la dissemblance physique, qui devient le support du comportement raciste. À la deuxième cataracte du Nil, une stèle érigée par le pharaon Sésotris III (v. 1887 - v. 1850 av. J.-C.) déclare : « Frontière sud. Stèle élevée en l’an VIII sous le règne de Sésotris III, roi de la Haute et Basse Égypte, qui vit depuis toujours et pour l’éternité. La traversée de cette frontière par terre et par eau en barque ou avec des troupeaux est interdite à tout noir, à la seule exception de ceux qui désireraient la franchir pour vendre ou acheter dans quelque comptoir... »

Cette interdiction raciste, nuancée par l’exception de valeur économique, prend une allure prémonitoire si l’on songe au comportement nazi, quarante siècles plus tard, vis-à-vis de « certains » Juifs.

Compte tenu des enquêtes effectuées sur le racisme, l’analyse du comportement discriminatoire fait apparaître quatre éléments essentiels :
— les différences effectives ou imaginaires entre le raciste et sa victime ;
— la valorisation de ces différences au profit du raciste et au détriment de la victime ;
— la généralisation de ces différences, considérées comme définitives et absolues ;
— la légitimation de l’agression à l’encontre de la victime ou du privilège accordé à son détriment.

L’accusation raciste se fonde sur une différence biologique ou culturelle. La constatation de cette différence ne constitue pas à elle seule un geste discriminatoire. Elle n’est somme toute qu’une évidence. Mais, dans un deuxième temps, la démarche raciste tend à insister sur cette différence biologique ou culturelle, présentée comme essentielle. Il faut, par le biais de cette accentuation, susciter l’exclusion de la victime du groupe auquel se rattache le raciste. Le colonisateur justifiera son refus de l’Africain ou du Nord-Africain en insistant sur l’importance des différences de genre de vie, de niveau intellectuel, de conception de l’existence, des retards techniques. Lorsque la différence biologique est imperceptible, l’aryen insistera alors sur la différence qualitative de la tradition juive, qualifiée de dissolvante, d’instable, de péjorative. Comme le soulignent les sociologues, « ce n’est pas la différence qui appelle le racisme, c’est le racisme qui utilise la différence... »

En outre, cette différence est toujours interprétée au profit du raciste. Celui-ci ne se contente pas de la constater. Il la valorise au détriment de la victime et, par voie de conséquence, au profit de groupe ethnique auquel il appartient. Le colonisé n’est inférieur que parce que le colonisateur est supérieur.

Une démarche complémentaire vise à la généralisation. Il ne suffit pas qu’un Africain soit considéré comme péjorativement différent, il faut que tous les Africains le soient. Qu’un Juif soit usurier permet de décider de l’avidité de tout un peuple. Qu’un colonisé soit fainéant, l’on glosera sur la paresse du colonisé.

En même temps, cette généralisation se veut définitive et à la limite rejoint le mythe. Shylock a été avide et le sera toujours. L’esclave noir, voué aux tâches inférieures, s’y complaira éternellement. Par-delà les siècles, le raciste entend maintenir la pérennité des mythes. Le Juif déicide des mystères du Moyen Âge, incarnation du Diable, deviendra pour les nazis le mal qu’il faut radicalement extirper. Le colonisé, autrefois esclave aux colonies, ne peut être qu’un sous-homme à travers les travailleurs immigrés dans l’Europe industrialisée contemporaine.

Enfin, la démarche raciste se complète par la justification de l’accusateur. Si le Noir a été esclave, c’est parce qu’il le méritait. Si le Juif est exclu, c’est à la suite d’on ne sait quelle malédiction. Autrement, comment expliquer la fatalité historique qui a toujours pesé sur ces deux victimes ?