Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

phare (suite)

Portée des phares

On distingue, d’une part, la portée géographique, déterminée en tenant compte de la courbure de la terre et de la réfraction dans les couches atmosphériques, laquelle, par incurvation des rayons lumineux, accroît la portée rectiligne ; d’autre part, la portée lumineuse, qui dépend à la fois de l’intensité de la lumière, de l’absorption par l’atmosphère et du seuil de perception rétinienne de l’observateur.

• Portée géographique. Sa valeur P est donnée par la formule suivante :

dans laquelle H est la hauteur du feu du phare au-dessus du niveau de la mer, m le rapport du rayon de courbure R des rayons lumineux au rayon terrestre r au niveau de la mer et h la hauteur de la vigie du navire au-dessus de la mer. Selon l’indice de réfraction de l’atmosphère, m varie de 2 à 20, et la portée géographique est accrue de 4 à 40 p. 100 de ce que serait la portée si les rayons lumineux étaient rectilignes.

• Portée lumineuse. Elle est toujours plus ou moins inférieure à la portée géographique. On définit la portée dépassée durant 50 p. 100 du temps et celle, plus faible, qui est dépassée durant 90 p. 100 du temps.

La portée lumineuse s’est constamment améliorée depuis un siècle et demi. Elle a été marquée par deux grandes étapes. Tout d’abord Augustin Fresnel* (1788-1827) équipa les phares de lentilles à échelons (prismes concentriques) ; puis, peu après la Première Guerre mondiale, André Blondel (1863-1938) substitua aux anciennes lampes à pétrole ou à huile de colza des lampes électriques à filament, de fonctionnement plus régulier que les lampes à arc. On utilise aussi des lampes à gaz, avec manchon Auer, au nitrate de thorium.


Équipement

Les phares en mer sont aménagés pour offrir aux gardiens et mécaniciens tout ce qui leur est nécessaire durant leur temps de présence : chambres, cuisines, salles de séjour, magasins pour vivres de réserve, magasin pour combustible de chauffage, etc. Pour les relèves et pour les renouvellements d’approvisionnements, un système de va-et-vient, avec treuil, câbles et poulies, permet de procéder aux manœuvres nécessaires, notamment par gros temps, entre le bateau approvisionneur et le phare lui-même. Les phares modernes possèdent une plate-forme pour hélicoptère, tel le phare The Royal Sovereign, mis en service en 1971 au large de Hastings (Sussex, Grande-Bretagne).

Pour les phares du littoral, les logements des gardiens sont généralement à terre.


Conception, dispositions générales et construction des édifices de phares

Les phares classiques sont en maçonnerie de pierres taillées et appareillées ou en béton, béton armé ou béton précontraint. Pendant longtemps la maçonnerie a été préférée au béton pour l’étanchéité des parois. En pleine mer, la tendance actuelle consiste à recourir à des éléments préfabriqués à terre et montés sur place. Certains sont constitués par une ossature d’acier laminé, comme le phare de l’îlot Cabri, à la Martinique. Les phares en maçonnerie ou en béton sont des tours légèrement tronconiques à l’extérieur et creuses en forme de cylindre vertical à l’intérieur ; ils comportent des ouvertures latérales (fenêtres à appuis extérieurs très inclinés) et un escalier central, souvent hélicoïdal, qui relie entre elles les différentes salles étagées ; la partie basse, jusqu’à une certaine hauteur, est pleine (pour des raisons de stabilité au vent et, en pleine mer, aux lames). Toutefois, la partie centrale de ce soubassement constitue souvent un magasin.

La plupart des phares modernes, d’ailleurs très rares, comprennent, dans leur équipement, un groupe électrogène avec batterie d’accumulateurs et une plate-forme pour hélicoptère. Mais la plupart des phares actuellement en service, sinon la quasi-totalité, sont d’un type plus classique.

La hauteur des phares est variable : elle oscille généralement entre 30 et 70 m et elle dépend de la portée à atteindre. À la partie supérieure se trouve une plate-forme de service, entourée d’une balustrade et surmontée de la lanterne.


Stabilité des phares

Sous les rafales, les phares subissent des oscillations qui peuvent nuire à l’éclairage. Pour déterminer leur stabilité, on a longtemps appliqué la règle de Fresnel, aux termes de laquelle la stabilité à adopter doit être égale à 5 fois celle qui est nécessaire au maintien de la stabilité de l’ouvrage résistant à un vent de 275 kg/m2 de pression, les ouragans pouvant exceptionnellement exercer des pressions de 440 kg/m2. Pour le calcul, on fait appel à la théorie générale de la flexion d’une pièce fléchie, encastrée à sa base. La pression du vent sur une surface oblique étant le produit de celle qui est exercée sur une surface normale par le sinus de l’inclinaison, on adoptait, comme pression totale du vent, dans le cas d’une tour cylindrique, la quantité surface du plan diamétral.

Mais si la pression du vent entre seule en compte pour les phares à terre, il faut, pour les phares en pleine mer, faire intervenir également la force vive des lames, surtout des lames de fond ; sur les grands fonds, le choc énorme des masses d’eau oblige à soigner tout particulièrement les fondations. Aussi l’édification, souvent sur écueils isolés, rend-elle l’approche et le débarquement des matériaux extrêmement difficiles.

Pour les phares construits à terre, si P est le poids total, D le rayon de la périphérie de base la plus menacée et F la force du vent appliquée à une hauteur h de cette périphérie, la stabilité exige que le moment de renversement Fh soit inférieur au moment du poids par rapport à l’arête, Fh < Pd, mais cette condition nécessaire n’est pas suffisante. Il faut encore que, en aucun point, la maçonnerie ou le béton non armé ne soient mis en traction. Si N est le poids de la tour au-dessus de la section considérée, ω la surface de cette section, I le moment d’inertie de la section, v la distance à l’axe du point où s’exerce l’effort y et M le moment fléchissant des forces extérieures appliquées depuis le sommet jusqu’à la section considérée, on a, en se fondant sur la théorie de la flexion d’un solide encastré dans sa fondation,

Pour que la maçonnerie, ou le béton non armé, ne soit pas soumis à un effort de traction, il faut

Si la tour est circulaire, de rayon extérieur R et de rayon intérieur r, en remplaçant ω, v et I par leur valeur, on a