Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Ardennes 08

Départ. de la Région Champagne-Ardenne ; 5 219 km2 ; 309 306 hab. (Ardennais). Ch.-l. Charleville-Mézières. S.-préf. Rethel, Sedan, Vouziers.


La population est concentrée à 80 p. 100 dans la vallée de la Meuse et ses prolongements, entre deux ensembles peu peuplés : le massif ancien de l’Ardenne et les premiers reliefs du Bassin parisien.

Le quart sud-ouest du département est occupé par l’extrémité septentrionale de la plaine de craie champenoise, riche région agricole à grandes exploitations orientées vers les céréales, la betterave à sucre et la luzerne. Rethel (8 500 hab.) y est la seule ville notable, sur un passage privilégié (cartonneries, textile, mécanique) ; la plaine n’a que quelques industries agricoles.

Entre la Champagne crayeuse et le massif ancien s’étire la région des « crêtes préardennaises ». Ici, les différences de dureté des couches sédimentaires font apparaître une succession de lignes de côtes, de dépressions humides et de plateaux calcaires tantôt forestiers et tantôt céréaliers, selon des alignements N.-O. - S.-E. L’ensemble est morcelé en collines par les petits affluents de l’Aisne et de la Meuse. Les crêtes préardennaises sont des campagnes à population âgée et à forte émigration, mais où les nombreux départs ont permis l’expansion d’exploitations assez grandes (50 à 100 ha) associant l’élevage laitier à la culture céréalière, avec quelques vergers dans la partie centrale. De petits bourgs y assurent les services ; seul Signy-l’Abbaye a une industrie notable (skis et raquettes de tennis). L’extrémité nord-ouest de cette bande appartient déjà à la Thiérache herbagère et bocagère, spécialisée dans le lait sur des exploitations plus petites. Au sud-est, les Ardennes possèdent le nord de l’Argonne (relief boisé taillé dans une formation localement gréseuse, la gaize) et de la Champagne humide, dominé par Vouziers (5 465 hab.).

Au nord, le plateau ancien de l’Ardenne (489 m aux Hauts Buttés) est traversé par la frontière belge. Il est recouvert par une médiocre chênaie.

C’est dans les vallées que se concentrent la plupart des activités. La vallée de la Meuse de Sedan à Charleville-Mézières est le grand axe du département. Elle est prolongée à l’ouest par la dépression de la Sormonne, au pied du plateau de Rocroi (ardoisières), à l’est par la vallée de la Chiers, dans le pays de Carignan (3 724 hab.). Elle est partiellement doublée au centre, vers le nord, par une dépression qui marque peut-être un ancien cours et concentre des industries (Vrigne-aux-Bois). Plus au nord encore, parallèlement à la Meuse, la vallée de la Semoy introduit une coulée de terroirs agricoles, d’ateliers dispersés et d’aménagements touristiques (Haulmé).

À Mézières, la Meuse se détourne brusquement vers le nord et tranche le massif ancien par une vigoureuse vallée aux amples méandres et aux paysages pittoresques (rochers des Quatre-Fils-Aymon, Dames-de-Meuse, etc.), perpendiculairement à l’axe ardennais qui s’est soulevé tardivement. Les villes industrielles (Nouzonville, Monthermé, Revin, Fumay, Givet) s’y succèdent, et tous les moyens de transport s’y insinuent. La Meuse est navigable et reliée en amont au réseau lorrain, au sud à l’Aisne par le canal des Ardennes (1833) ; mais les grosses péniches belges ne peuvent remonter au-delà de Givet, où a été installé un silo.

C’est la métallurgie qui domine la vie ardennaise (30 000 salariés). Concentrée dans la vallée de la Meuse, elle est d’origine ancienne, née de la présence de main-d’œuvre disponible, comme dans maint massif forestier, de charbon de bois et d’un peu de fer. Elle s’est surtout orientée vers la fonderie (premier département de France) et continue à produire des fabrications délicates (boulonnerie, pièces pour automobiles, etc.) dans des ateliers très dispersés et de petites usines. Cependant, elle a également développé la sidérurgie, qui subsiste en quelques grandes usines (Chiers à Blagny et à Vireux-Molhain, Vallourec à Sedan, Wendel à Messempré) auxquelles s’ajoute la première fabrique française de tubes en cuivre (Tréfimétaux à Givet). Par ailleurs, la fonderie a évolué vers la fabrication d’appareils ménagers et sanitaires en des firmes connues (Arthur Martin, Faure, Pied-Selle, Porcher, Deville, etc.), surtout de Revin à Mézières. Plus récemment, deux grandes entreprises rassemblant plusieurs milliers d’ouvriers ont développé des fabrications nouvelles : matériel de travaux publics (Richier), revêtements de sol (Sommer) à Charleville, Sedan et Mouzon.

Par contre, il subsiste peu de chose du passé lainier de la région de Sedan (3 000 salariés) ; une usine plus récente produit de la rayonne à Givet.

Ces activités industrielles sont solides, mais le nombre d’entreprises (plus de 3 000) diminue, et le nombre de salariés stagne. Aussi les taux d’accroissement de la population urbaine sont-ils modérés. Les Ardennes sont dominées par l’agglomération de Charleville-Mézières (70 000 hab.), dont le rayonnement commercial couvre la plus grande partie du département. Sedan (30 000 hab. pour l’agglomération) garde son indépendance à 20 km du chef-lieu, auquel elle doit être reliée par une autoroute. L’ensemble tire parti de sa situation au carrefour de l’axe Valenciennes-Thionville et de l’axe Paris-Reims-Luxembourg, et compte développer ses relations avec la Belgique, déjà concrétisées par la mise en route de la centrale nucléaire de Chooz, près de Givet (2 TWh par an). Au nord-ouest, les villes industrielles de la Meuse encaissée se disputent la prééminence : Givet (8 152 hab.) et Revin (11 806 hab.) émergent.

L’activité agricole n’est pas négligeable, puisque les Ardennes entretiennent 300 000 bovins et produisent 3 Mq de céréales et plus de 4 Mq de betteraves ; l’élevage fournit les deux tiers du produit des 7 500 exploitations ardennaises (moyenne, 41 ha). La forêt (150 000 ha, plus que les labours) est une ressource d’appoint.

La population ardennaise est féconde (solde naturel supérieur à 5 p. 1 000) et stabilisée malgré une forte émigration, surtout vers Paris et Reims. En retour, les Ardennes reçoivent un flux saisonnier notable, surtout en provenance du Nord et de la Belgique, grâce à leurs sites touristiques et de séjour (vallées du plateau ancien, étang de Bairon, près de Vouziers, Argonne).

R. B.

➙ Champagne-Ardenne / Charleville-Mézières.