Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Paris (suite)

• Le Grand Paris, ou agglomération parisienne, ajoute à la ville tout ce qui constitue la banlieue proche et lointaine, soit environ 280 communes, 1 700 km2 et 6 200 000 « banlieusards ». Ses limites sont floues, car les circonscriptions administratives ne correspondent à aucune réalité vivante, et, de plus, elles se déplacent sans cesse en raison de la croissance constante de l’agglomération.

Dans cette banlieue, en utilisant comme critères principaux les densités de population et les migrations journalières, on peut distinguer :
a) une proche banlieue, qui forme un premier anneau, dit « urbain » (ou zone interne), peuplé de 3 millions d’habitants et qui, avec la ville de Paris, constitue l’agglomération « restreinte » de 5 300 000 habitants, laquelle s’étend sur 350 km2 environ et présente une largeur d’à peu près 10 km (elle englobe la majeure partie des départements dits « de la première couronne » [Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne]) ;
b) une grande banlieue, qui constitue tout autour de la première un second anneau, dit « suburbain » (ou « zone externe »), peuplé de 3 200 000 habitants et qui, avec l’agglomération « restreinte », constitue l’agglomération « étendue » ; ce second anneau s’étend sur à peu près 1 370 km2, possède une largeur de 35 km environ et déborde largement sur les départements dits « de la seconde couronne » : (Val-d’Oise, Yvelines, Essonne et même Seine-et-Marne).

Au total, l’agglomération étendue forme une véritable région urbaine et totalise en 1975 279 communes, 1 830 km2 (0,35 p. 100 du territoire national) et 8 500 000 habitants. Elle renferme une trentaine de communes de plus de 50 000 habitants (le tiers de toute la France), plus de 90 communes de 20 000 à 50 000 habitants et un nombre presque égal de communes de 10 000 à 20 000 habitants, soit au total près de 220 communes de plus de 10 000 habitants.


L’extension spatiale, à l’époque moderne et contemporaine

Du xvie au xviiie s., Paris s’agrandit surtout sur la rive droite en comblant quelques marais et dépasse l’ancien bras de la Seine, qui, parti de l’Arsenal, suivait à peu près le trajet des Grands Boulevards allant rejoindre le fleuve actuel vers la place de l’Alma. Sur la rive gauche, les propriétés conventuelles freinent l’expansion de la ville. Tout au début du xixe s., Paris est déjà deux fois plus étendu sur la rive droite que sur la rive gauche. Il remplit à peu près tout l’espace compris à l’intérieur de l’enceinte des Fermiers généraux, mais déjà il se prolonge par des tentacules le long des routes, principalement en direction du nord à Ménilmontant, à Belleville, à La Villette, à La Chapelle, à Clignancourt, aux Batignolles. C’est à partir de la Restauration que la rive gauche, restée le quartier de l’université, des abbayes et des couvents, connaît une extension importante à Grenelle, au Petit Montrouge, à la Maison Blanche ; mais, en 1860, le territoire compris à l’intérieur de l’enceinte de 1840 et annexé à Paris comporte encore bien des terrains non bâtis et cultivés.

À partir de la révolution industrielle du milieu du xixe s., Paris déborde son enceinte, et l’agglomération a tendance à s’étendre de préférence vers l’aval en raison des avantages qu’offrent les plaines de méandres pour l’installation des voies ferrées, des industries, pour l’expansion urbaine, et en raison de l’intensité croissante des relations avec la basse Seine et le Nord. Mais l’extension se fait aussi tout autour, en doigts de gant, puis en auréoles, en fonction des moyens de transport, surtout des lignes de chemin de fer, qui permettent peu à peu les déplacements journaliers.

Depuis un siècle et demi, l’expansion spatiale s’est essentiellement effectuée en fonction des moyens de transport : d’abord linéaire le long des routes avant le chemin de fer ; puis par taches autour des gares à partir du moment où les lignes de banlieue ont permis les va-et-vient journaliers ; enfin diffuse dans les vides du tissu urbain ou sur les franges loin des gares, avec les transports individuels et les autobus. L’influence des moyens de transport n’a, toutefois, pas été immédiate.

Vers 1900, toutes les communes limitrophes de Paris, au nombre d’une vingtaine, constituent une première couronne urbaine, industrielle et résidentielle ; mais l’urbanisation gagne déjà au nord-ouest la boucle de Gennevilliers à Asnières, Courbevoie, Puteaux, Suresnes, Colombes, à l’est Fontenay-sous-Bois, Livry-Gargan, Champigny et au sud-est Maisons-Alfort et Choisy.

Les lotissements de pavillons à jardinets sont apparus au milieu du xixe s. Ce sont des bois qui sont lotis les premiers : ceux de Romainville, et de Bois-Colombes, la forêt de Bondy aux Pavillons-sous-Bois, les bois du Raincy et de Villemomble, ceux du Vésinet. Les parcs se morcellent ensuite, surtout à partir de la fin du xixe s. : ceux de Saint-Maur, de Juvisy, de Villeneuve-le-Roi, etc. C’est après 1918 que se lotissent sur une grande échelle les terres de culture, tandis que, sans cesse plus loin de Paris, bois et parcs continuent à se bâtir.

La grande époque des lotissements de pavillons, construits le plus souvent sur des lots de 300 m2 à peine, va de 1920 à 1930 ; en dix ans, la surface de ces lotissements a quintuplé et dépasse celle de Paris, pour atteindre près de 16 000 ha. Cette urbanisation explosive sera stoppée par la réglementation intervenue en 1930, puis par la crise économique et enfin par la guerre.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’expansion spatiale de l’agglomération a connu trois étapes. Au cours de la première, jusque vers 1954, domine l’habitat individuel : on utilise les lots restés vacants des lotissements de l’entre-deux-guerres. Durant la deuxième, les grands ensembles viennent occuper à l’intérieur de l’agglomération les espaces vides, suffisamment vastes, situés souvent sur les plateaux éloignés des gares, mais relativement proches du centre de Paris par les moyens de transport individuels. Enfin, aujourd’hui, ces espaces se raréfient, et l’on construit de plus en plus sur les franges de l’agglomération étendue, puis en fonction des échangeurs d’autoroutes, à une distance de plus en plus grande de Paris. Là aussi s’implantent les zones d’activités récentes et les grands équipements (Rungis, Orly, Roissy-en-France).

C’est que les besoins d’espace urbain ne résultent pas seulement des nécessités de l’habitat. L’expansion s’exerce aussi sous la forme de tout ce que la ville dégrade, exige ou rejette autour d’elle et qui va se multipliant et se diversifiant. Elle dévore sans cesse l’espace en même temps qu’elle le diversifie de plus en plus.