Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pansement (suite)

Pansement d’une plaie


Principes

La cicatrisation d’une plaie peut être obtenue par première intention, les deux lèvres de la plaie se joignant bord à bord (c’est le cas si on fait une suture après parage de la plaie [v. opération chirurgicale]), ou bien par seconde intention, en l’absence de suture (dans ce cas, l’épiderme doit recouvrir progressivement la surface sous-jacente).

Cette cicatrisation est entravée par l’infection. Il est donc de première importance d’assurer la propreté de la plaie et des téguments voisins. Pour ce faire, on devra raser les poils, ou les cheveux, nettoyer la peau à l’eau bouillie savonneuse, puis à l’alcool jusqu’aux lèvres de la plaie. La plaie elle-même doit être respectée, à peine touchée et on doit en tout cas s’efforcer de ne pas faire saigner (veiller aux changements de pansements, à l’humidification suffisante des compresses séchées par de l’eau bouillie). Il peut être nécessaire de laver la plaie et pour ce faire on utilise la solution de Dakin (hypochlorite de sodium neutralisé par le permanganate de sodium).


Rôle du pansement

Il est double : absorber et protéger. L’absorption des liquides de la plaie porte sur le sang, les sécrétions, les sérosités, le pus, les produits toxiques. L’occlusion et la protection évitent les contacts et l’apport de germes microbiens.


Les divers pansements

« Certaines plaies ne nécessitent aucun pansement, plus nuisible qu’utile en raison de la chaleur qu’il entretient, de la sudation et des macérations qui peuvent en être la conséquence, en raison de son adhérence à certains tissus de bourgeonnement, ce qui entrave l’épidermisation » (Talbot).

C’est ainsi qu’il est inutile dans bien des cas d’occlure d’un pansement les plaies chirurgicales suturées et aseptiques ; néfaste de recouvrir les plaies de la face, les brûlures en général. Dans le cas des brûlures, la protection peut être demandée à un voile de gaze à distance, qui empêche l’approche et le contact des insectes.
— Le pansement sec, simple protection aseptique, est le pansement classique fait de compresses stérilisées, recouvertes d’ouate, et maintenu en place par bandes ou rubans adhésifs.
— Le pansement isolant, variante du précédent, a pour but d’empêcher l’adhérence des tissus bourgeonnants aux éléments du pansement. Ainsi, en cas de greffes épidermiques par exemple, ont été préconisées de minces feuilles de métal (aluminium) ou des gazes imbibées de corps gras : vaseline stérilisée simple ou à l’iodoforme, d’argent colloïdal, de baume de Pérou. Des antibiotiques à action locale peuvent être ajoutés.
— Le pansement compressif est fait pour protéger des fuites de plasma sanguin dans les gros traumatismes des membres, ou pour assurer l’hémostase temporaire postopératoire (opérations sur les veines, sur la main, sous garrot pneumatique).
— Le pansement humide comportait une enveloppe imperméable, source de macération, qui a heureusement disparu. Il apporte une aide certaine en calmant les phénomènes inflammatoires, surtout lymphangitiques, en diminuant la douleur, par le maintien de chaleur et d’humidité. Il est fait de compresses imbibées d’eau bouillie tiède ou de sérum physiologique additionné ou non d’alcool. Il est à renouveler plusieurs fois par jour.
— Les pansements avec liquides, qu’il s’agisse de sérum ou de solution d’acide lactique, sont exécutés de façon que le liquide soit maintenu en permanence au contact de la plaie.
— Le pansement aux solutés cristalloïdes dits « sérums physiologiques » met en jeu les propriétés osmotiques des tissus. Au contact d’un sérum isotonique, la plaie trouve un milieu favorable à sa guérison spontanée. Au contact d’un sérum hypertonique, elle évacue ses sécrétions, elle se déterge. Cette méthode est fréquemment utilisée pour préparer une plaie à la greffe.
— Le pansement à irrigation continue est la méthode de A. Carrel, qui utilise l’hypochlorite de sodium introduit dans la plaie en irrigation par un tube souple. Le pouvoir bactéricide de ce soluté est élevé ; il est peu nocif pour les cellules vivantes. Il active la mortification des tissus en voie de destruction et a une action antiseptique efficace. L’arrivée de liquide neuf assure le maintien de la concentration, son évacuation assure le rejet des produits de lyse tissulaire, du produit usé, et réalise ainsi un véritable lavage de la plaie. Un petit cathéter ou un petit drain de caoutchouc percé d’orifices latéraux à son extrémité est placé au fond de la plaie ; par lui arrivera le soluté : soit de façon continue, goutte à goutte, soit de temps à autre par injection à la seringue. L’évacuation est assurée par le pansement, qu’il faut alors changer souvent, ou mieux par un deuxième cathéter dans lequel une aspiration, continue ou discontinue, est effectuée.

La méthode de Carrel ainsi appliquée a rendu de grands services. L’apparition des sulfamides, puis des antibiotiques la mit un peu en veilleuse. Ces dernières années, elle redevient actuelle, le soluté de Dakin étant remplacé par un soluté d’acide lactique dont les propriétés détergentes et cicatrisantes sont véritablement étonnantes. Ce soluté d’acide lactique est actuellement largement utilisé pour traiter les plaies et trajets fistuleux, les fistules digestives, et il rend de grands services.
— Le pansement rare s’applique surtout aux plaies osseuses. Préconisé par L. Ollier dès 1872, qui recommandait le plâtre occlusif, il a été réinventé par J. Trueta, lors de la guerre d’Espagne en 1938, et nous revint de Grande-Bretagne en 1944.

La plaie — correctement excisée et parée chirurgicalement, sans aucune fermeture et normalement pansée — est enfermée dans un plâtre occlusif, qu’on ne lève qu’au bout de plusieurs semaines. La plaie est alors souvent totalement ou partiellement comblée et cicatrisée, sans réaction locale ni générale, en dépit de l’odeur désagréable du plâtre imprégné de sécrétions.

J. P.