Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

orogenèse (suite)

Un continent unique formé par rétraction initiale d’une croûte sialique continue conduit à la formation des chaînes de montagnes précambriennes et primaires. À peine recouvert par les mers épicontinentales, il flotte tel un radeau sur le sima, supposé plus dense et visqueux. Autour de lui s’étend un océan unique dont le fond est constitué de sima. La masse continentale s’est alors rompue sous l’action de la force centrifuge vers l’équateur et celle de l’action retardatrice des marées, qui provoque un déplacement de sens contraire à la rotation terrestre, c’est-à-dire vers l’ouest.

Ainsi, à la fin du Primaire, Madagascar, l’Inde, l’Australie et l’Antarctide forment un bloc unique avec l’Afrique et l’Amérique du Sud. Tous les continents sont soudés en une seule masse appelée Pangea, coupée en deux par une large mer épicontinentale allongée d’ouest en est, la Téthys, à laquelle se substituera plus tard la Méditerranée actuelle, les chaînes qui l’encadrent et les chaînes récentes de l’Asie centrale.

À partir du Jurassique, l’Antarctide et l’Australie se détachent ; Madagascar et l’Inde s’écartent de l’Afrique en réduisant la Téthys, provoquant ainsi la formation de l’Himālaya. Le mouvement vers l’ouest de l’Amérique étant plus rapide que celui de l’Ancien Monde, l’océan Atlantique se creuse et des chaînes se forment à l’ouest de l’Amérique (les Andes).

La dérive des continents pouvait expliquer les mécanismes de formation des chaînes de montagnes : les Alpes et l’Himālaya sont dus à la collision de continents situés de part et d’autre de la Téthys. Mais cette théorie avait un point faible : elle ne donnait aucune explication physique du phénomène proprement dit.

• L’expansion océanique. Toutefois, après plusieurs décennies, l’hypothèse de la dérive des continents est revenue au premier plan grâce à des méthodes indirectes.

1. Déplacement du pôle géomagnétique. Les savants qui ont étudié le magnétisme terrestre au cours des temps géologiques (paléomagnétisme*) sont arrivés à la conclusion que les continents avaient subi une dérive. En effet, lorsqu’une roche se forme, elle acquiert une aimantation permanente ayant la direction du champ magnétique régnant sur le globe à cette époque. On peut, de cette manière, reconstituer la direction des champs magnétiques à différentes époques. Or, les reconstitutions effectuées par S. K. Runcorn (1962) ont montré que les pôles successifs calculés à partir des roches américaines et ceux qui ont été calculés à partir des roches européennes de même âge ne coïncidaient pas, mais décrivaient deux courbes de déplacement. On en revenait ainsi au dédoublement des continents américains et européens, c’est-à-dire à la théorie de Wegener.

2. Étude des fonds océaniques. Parallèlement, des équipes de recherches s’attaquaient aux océans et apportaient des données nouvelles sur l’allure des fonds océaniques.

On connaît bien maintenant dans les océans de grandes lignes de reliefs immergés, les dorsales océaniques. Dans l’Atlantique, la dorsale océanique, qui occupe une position médiane, a reçu le nom de dorsale médio-atlantique ; dans le Pacifique, par contre, la dorsale n’occupe pas une position symétrique par rapport aux continents. Au centre de cette chaîne de dorsales se trouve une crête constituée de roches volcaniques de type basaltique et partagée longitudinalement par un fossé, ou rift.

Les dorsales ne sont recouvertes que par une faible épaisseur de sédiments, et les techniques d’exploration des fonds océaniques (essentiellement par séismique-réflexion continue) ont montré que leur épaisseur allait croissant lorsqu’on se rapprochait des continents. Tout se passe comme si le socle de l’océan était d’autant plus jeune qu’il se trouve plus près de la dorsale. Les prises d’échantillons par carottage ont confirmé cette hypothèse et montré que les sédiments les plus anciens se trouvaient dans les zones les plus épaisses et les plus proches des continents.

De plus, la séismologie montre que les dorsales sont des domaines où se localisent les foyers de séismes, ce qui indique qu’elles sont le siège de déformations cassantes.

Enfin, il faut ajouter que les dorsales et les espaces qui les encadrent sont le siège d’anomalies magnétiques. On savait déjà que le champ magnétique terrestre avait subi plusieurs inversions au cours des âges géologiques. Certaines roches présentent une aimantation de direction opposée à celle du champ magnétique actuel. Or, dans les dorsales, on s’aperçoit que les anomalies magnétiques sont allongées parallèlement au rift médio-océanique et forment un système de zébrures symétriques par rapport à la crête.

Vine et D. H. Matthews (1963) imaginèrent que leur aimantation avait été acquise au moment de la formation continue de ces roches pendant des périodes successives de champ direct et inverse, la largeur des bandes étant proportionnelle à la durée des périodes paléomagnétiques. Cela revient à dire que la dorsale et plus précisément le rift sont le siège d’une montée continue de laves basaltiques qui ont tendance à écarter progressivement de chaque côté les roches déjà refroidies. Ce qui conduit à la nécessité d’une expansion océanique dont le moteur peut être recherché dans des courants de convection situés sous la lithosphère.

Pour expliquer l’apparition de l’océan Atlantique, on suppose qu’un courant ascendant situé au milieu du continent primitif a repoussé de part et d’autre l’Amérique et l’Afrique : la dorsale médio-atlantique correspond aux endroits où le courant de convection du manteau est monté.

3. Les failles transformantes. L’expansion des océans a été étayée par l’introduction d’un nouveau type d’accident : la faille transformante. Une carte du fond des océans montre très nettement que les dorsales sont coupées par un grand nombre de failles transversales. Wilson (1965) remarqua que ces failles n’étaient pas de simples décrochements décalant la dorsale, mais qu’elles se rapportaient à un autre type d’accident.