Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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orogenèse (suite)

Ainsi, au cours des temps géologiques, la position relative des cratons et des orogènes a varié, et l’on peut mettre en évidence à la surface du globe une succession de grandes zones de déformations résultant des différentes orogenèses qui ont donné les chaînes de montagnes. La localisation et la direction de ces zones peuvent différer et venir ensuite s’intégrer progressivement aux zones cratoniques, qui ont tendance à s’accroître au cours des périodes géologiques.


Édification des chaînes de montagnes

La formation d’une chaîne de montagnes s’étend sur un long espace de temps et résulte d’une lente évolution de la zone sur laquelle elle va s’installer. Cette évolution n’est pas continue, mais constituée d’une succession de périodes pendant lesquelles des phénomènes variés vont se produire.

On a l’habitude de dire que tout commence au moment du dépôt des sédiments ; cela est vrai en ce sens que les terrains qui vont être tectonisés et soulevés par la suite se sont d’abord déposés dans une aire bien délimitée ; on connaît néanmoins des zones où les sédiments se sont accumulés, mais qui n’ont pas évolué par la suite. Ainsi, les séries secondaires du Jura et du bassin de Paris ont des caractères sédimentologiques très semblables ; peu déformés dans le bassin de Paris, ces terrains ont été plissés par la suite dans le Jura.

Dans les chaînes alpines, on peut suivre au cours des temps une évolution depuis le début du Secondaire, où les phénomènes de distension et de sédimentation sont prépondérants, jusqu’à une époque plus récente (du Crétacé à l’époque actuelle), pendant laquelle les phénomènes de sédimentation subsistent, encore que limités dans l’espace et dans le temps, et avec des caractères nettement différents, mais où des périodes de compression associées à un rôle important de l’érosion ont été décrites.


Les cycles orogéniques

La période de temps pendant laquelle se prépare, se développe et s’achève une chaîne de montagnes correspond à ce que les géologues appellent un cycle orogénique. Ce laps de temps représente non seulement les processus de déformation et de surrection, mais aussi les périodes de sédimentation qui les précède ainsi que les phénomènes d’érosion qui suivent.

Ces différents processus sont généralement associés, mais il est des périodes du cycle orogénique où l’un de ces facteurs devient prédominant. D’une manière schématique on pourrait proposer, pour l’évolution d’une chaîne, la succession suivante : le dépôt et la consolidation des couches, ou lithogenèse ; la déformation des couches et la formation des structures, ou tectogenèse ; la formation des reliefs, ou orogenèse ; la destruction de ceux-ci, ou glyptogenèse. Ainsi et en supposant qu’on revienne exactement au point de départ, une chaîne de montagnes s’installe sur la surface d’érosion du cycle précédent et se termine par une nouvelle pénéplaine.

Au cours des temps géologiques, plusieurs cycles orogéniques se sont succédé : calédonien, hercynien, alpin... Le cycle alpin, par exemple, débute au Trias ; les premières crises orogéniques se situent au Crétacé ; les phases paroxysmales se placent au Tertiaire, et les surrections se sont poursuivies pendant tout le Quaternaire ; l’érosion n’ayant pas encore aplani la chaîne, le cycle n’est donc pas encore terminé.


Les phases orogéniques

Plutôt que par un mouvement continu, les déformations qui conduisent à la forme d’une chaîne de montagnes se font par à-coups successifs. Une phase orogénique est donc un intervalle de temps pendant lequel se produisent des déformations ; s’il y a plissement ou fracturation, on parle de phase tectonique. Ainsi, une chaîne de montagnes sera le résultat de tectoniques superposées, dont le style pourra varier de l’une à l’autre.

Une phase tectonique est datée par le terrain le plus ancien affecté par la déformation et par le terrain le plus récent discordant. H. Stille a essayé d’établir un calendrier des phases orogéniques reconnues dans les grands cycles calédoniens, hercyniens et alpins. Toutefois, ces phases n’ont pas la même signification d’une chaîne à une autre, et il n’est pas toujours prouvé que leur âge soit identique d’un continent à un autre.


Les théories orogéniques

Ces théories essayent d’expliquer la genèse des chaînes de montagnes au cours d’un cycle orogénique. Cependant, si l’on connaît assez bien la succession des phases orogéniques dans une chaîne de montagnes, on en connaît bien moins les causes.

Des théories ont été proposées depuis longtemps ; elles font appel soit à des actions verticales (soulèvements), soit à des forces horizontales d’expansion ou de contraction. Parmi les plus anciennes, il faut citer pour mémoire la théorie des cratères de soulèvement de Leopold von Buch (1774-1853) et celle de la contraction du globe terrestre de Léonce Élie de Beaumont (1798-1874) par suite du refroidissement continu de la Terre.


Les théories verticalistes

Elles donnent la prédominance à l’orogenèse (mouvements verticaux), qui précède la tectogenèse ; dans cette perspective, les plissements sont la conséquence de mouvements verticaux. Parmi ces théories citons la théorie de l’intumescence, ou géotumeur, de E. Haarman (1930) ; la représentation que celui-ci donne de la mise en place de chaîne de montagnes est à ce titre très parlante. Le mouvement primitif de surrection pouvait amener le glissement de continents entiers et provoquer la formation de grandes ceintures orogéniques.

Les conceptions de Reinout Willem Van Bemmelen sur la notion de glissement de gravité (1955) sont du même ordre d’idée ; le bombement initial serait lié à l’individualisation sous la croûte d’une masse magmatique, ou asténolithe, de composition sialique plus légère que le sima sous-jacent, ce qui entraînerait une surrection sous l’effet de la poussée d’Archimède.


Les théories horizontalistes ou mobilistes

Certaines de ces théories admettent le déplacement des masses continentales comme cause directe de la formation des chaînes de montagnes ; la dérive des continents de Wegener (v. 1920) appartient à cette première catégorie. D’autres estiment que le moteur de la mobilité des masses continentales est le résultat d’un autre phénomène plus important (courant de convection de Griggs, déséquilibres thermodynamiques de L. Glangeaud, 1949).

• La dérive des continents. C’est en considérant les similitudes géométriques entre le dessin des côtes américaines et africaines de l’Atlantique que Wegener, à la suite de Taylor, développa l’idée de translations continentales, étayée par la superposition d’autres facteurs géologiques, paléoclimatiques et paléontologiques.