Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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orogenèse (suite)

Pour une faille de décrochement ordinaire, la direction des mouvements de la faille est la même que celle du déplacement apparent des structures coupées par la faille, et chacune des lèvres se déplace en sens opposé. Dans le cas des fractures, sur les crêtes océaniques de dorsales en expansion, la direction des mouvements relatifs entre les crêtes doit être opposée à celle du déplacement apparent, et il n’y a pas de mouvements relatifs en dehors du secteur compris entre les deux crêtes. Dans le premier cas, le déplacement relatif des deux lèvres a tendance à augmenter au fur et à mesure du jeu de la faille, tandis que, dans le second cas, il n’en est rien.

C’est par un processus de ce type qu’a été d’ailleurs interprétée la fameuse faille de San Andréas, de l’ouest de l’Amérique du Nord, grande faille coulissante qui s’étend du golfe de Californie au nord de San Francisco.

• La tectonique des plaques. Si la superficie du globe est sensiblement constante, l’expansion océanique doit être compensée par des destructions de surface au niveau de la lithosphère. Pour trouver ces zones où disparaît de la matière, il faut faire appel une fois encore à la séismologie. L’activité séismique le long des crêtes océaniques et des failles transformantes est généralement peu profonde ; par contre, dans certains domaines insulaires circumpacifiques, la profondeur des foyers est très variable et peut atteindre jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres. De plus, la répartition de ces foyers est tout à fait remarquable, car ils se répartissent grossièrement suivant un plan incliné, appelé plan de Benioff. Ce plan correspond à la surface de lithosphère qui s’enfonce obliquement dans l’asthénosphère.

Toutes ces nouvelles données ont trouvé une explication harmonieuse dans le concept de tectonique des plaques, ou tectonique globale, proposé presque simultanément par D. Mac Kenzie, J. R. Parker (1967), Xavier Le Pichon (1968) et B. A. Morgan (1968). Selon cette hypothèse, le monde entier est composé d’un petit nombre d’unités qui se comportent comme des plaques rigides. Celles-ci grandissent perpendiculairement de part et d’autre de la crête médio-océanique ; la direction de leur déplacement est donnée par celle des failles transformantes, et, à l’extrémité opposée, ces plaques s’enfoncent dans l’écorce le long de fosses bordant les arcs insulaires. Elles sont en réalité des calottes qui pivotent autour d’un axe de rotation distinct de l’axe de rotation terrestre. Formée par la lithosphère, c’est-à-dire caractérisée par une certaine rigidité, une plaque peut comprendre indifféremment des surfaces océaniques ou des surfaces continentales.

On sait que la lithosphère peut supporter pendant un certain temps des contraintes de l’ordre du kilobar sans fluer, alors que l’asthénosphère ne le peut pas, que l’activité séismique est concentrée dans la lithosphère. On peut ainsi expliquer la répartition et la profondeur des séismes.

Enfin, la tectonique des plaques fournit aujourd’hui un modèle cinématique qui rend compte de l’activité tectonique actuelle à la surface de la Terre et explique les zones orogéniques comme des zones où se produisent des mouvements différentiels entre plaques rigides. Il reste à la mettre à l’épreuve de nos connaissances des chaînes anciennes.


Lithosphère, asthénosphère, mésosphère

La structure du globe en noyau, en manteau et en croûte repose avant tout sur la séismologie ; celle-ci utilise la réflexion ou la réfraction des ondes séismiques (provoquées par les tremblements de terre) sur différents niveaux situés à l’intérieur de la Terre, qui jouent le rôle de réflecteurs. Les ondes enregistrées par des séismographes indiquent deux surfaces principales de discontinuité : l’une à faible profondeur, la discontinuité de Mohorovičić, qui sépare la croûte du manteau ; l’autre, plus profonde (vers 2 900 km), qui marque la limite entre le noyau et le manteau.

Les concepts de mésosphère, d’asthénosphère et de lithosphère servent à expliquer la consistance des différents niveaux du globe. La lithosphère (de 50 à 100 km) est rigide et repose sur l’asthénosphère, dont les roches réagissent à la manière d’un liquide, de sorte que la lithosphère, qui peut comporter aussi bien des continents que des fonds océaniques, peut acquérir une certaine mobilité et se déplacer sur l’asthénosphère. Vers 700 à 800 km, on pénètre dans la mésosphère rigide (par opposition à la mésosphère plus interne, située au centre du globe), de sorte que les courants de convection, qui peuvent être le mobile du déplacement des plaques, sont situés dans l’asthénosphère.

P. C.

➙ Alpes / Chaîne de montagnes / Géologie / Tectonique.

 D. H. et M. P. Tarling, Continental Drift. A Study of the Earth’s Moving Surface (New York, 1971 ; trad. fr. la Dérive des continents. Conceptions nouvelles, Doin, 1973). / C. Allègre et M. Mattauer, Structure et dynamique de la lithosphère (Hermann, 1972).

Orphée

En gr. Orpheus, poète musicien de la légende grecque.


Orphée apparaît, dès le vie s. av. J.-C., sous les traits du citharède dont la lyre et la voix enchantent la nature entière ; on le représente même aux Enfers, apaisant par son chant les dieux des Morts. Plus tard, la légende d’Eurydice a fourni une raison à cette descente aux Enfers, et, d’abord, ainsi qu’il est rapporté par Diodore de Sicile, Orphée ramenait sa femme à la lumière. C’est que l’orphisme est essentiellement une religion du salut. Tels sont les deux versants du mythe : d’une part, avec les poèmes orphiques, dont la composition s’étend du ive s. av. J.-C. à la fin du paganisme, Orphée est le poète qui révèle l’origine du monde, des dieux et des hommes, le fondateur d’une religion qui s’enchevêtre avec le culte de Dionysos et côtoie le néo-platonisme et la gnose ; d’autre part, il est l’amant malheureux d’Eurydice. Le génie de Virgile a imposé cette image pathétique dans l’épisode qui occupe la fin du livre IV des Géorgiques : poursuivie par Aristée, Eurydice, fuyant, est mordue par un serpent et meurt ; Orphée descend aux Enfers, émeut les dieux de la Mort et ramène Eurydice, à la condition de ne pas la regarder avant d’être revenu à la lumière ; impatient, il se retourne et perd pour la seconde fois et à jamais la femme aimée ; inconsolable, il repousse les avances des ménades, qui le mettent en pièces ; sa tête, livrée aux flots de l’Hèbre, répète encore aux échos le nom d’Eurydice. Sans doute, l’idéal orphique du poète chantant l’harmonie de l’homme et de la nature et victorieux de la mort est-il présent dans les Bucoliques ainsi que dans cet épisode des Géorgiques, mais la valeur émouvante de cet amour à la fois vaincu et plus fort que la mort domine le mythe. Peu après, Ovide raconte à son tour la triste et belle histoire au livre X des Métamorphoses, avec cette variante : après la seconde perte d’Eurydice, renonçant à aimer aucune autre femme, Orphée se retire chez les Thraces et leur enseigne l’amour des garçons.