sculpture
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin sculptura, de sculpere, « tailler », « graver ».
Notion utilisée de manière métaphorique chez Platon et Aristote, amplifiée chez Hegel, profondément remaniée (par les artistes) au cours du xxe siècle.
Esthétique
Représentation tridimensionnelle et matérielle d'un objet dans l'espace dans un but artistique ou ornemental.
Traditionnellement conçue comme le traitement d'un volume et comme la mise en forme d'un matériau dans un espace tridimensionnel (ronde-bosse, haut-relief, modelage), la notion de sculpture évolue considérablement au long du xxe s. À la suite d'Aristote, la philosophie a longtemps fait de la sculpture (et de la statue) le symbole même de l'action de la forme (ou de l'idée) sur la matière : « Ce n'est pas le bois qui fait le lit, ni l'airain la statue, mais il y a quelque autre chose qui est cause de changement(1) ». Hegel voit dans la sculpture, considérée comme un art classique trouvant son apogée dans l'art grec, le triomphe de l'esprit humain sur l'animalité(2). En revanche, Kant se méfie des pouvoirs de séduction de la sculpture, le réalisme et la tridimensionnalité de la statue risquant d'en faire un dangereux trompe-l'œil. Focillon trouve encore dans le « plein » le propre de la sculpture(3).
Longtemps cantonnée, dans la sphère occidentale, à quelques matériaux traditionnels (bois, pierre, marbre, bronze...), traitée sur le mode d'un volume clos, la sculpture subit de profonds changements au xxe s., sur le double plan du matériau – n'importe quel matériau, si incongru soit-il, pouvant servir les intentions du sculpteur – et du traitement du volume, celui-ci pouvant désormais être ouvert et la sculpture organisée, dispersée ou disséminée dans l'espace où elle porte alors le nom d'« environnement » ou d'« installation ». La sculpture inclut désormais la transparence (Gabo), traite du vide (Giacometti), se fait linéaire (Lichtenstein). Surtout, la notion même de sculpture connaît un bouleversement radical avec la notion de « sculpture élargie », élaborée par Beuys(4) : l'artiste œuvre en se servant de l'homme même et de ses actions comme d'un matériau, d'où la notion de « sculpture sociale ». L'artiste devient alors sculpteur de la vie sociale et collective.
La leçon de ces transformations est que la sculpture ne se définit plus par sa seule relation à l'espace ; elle inclut désormais à titre essentiel une dimension philosophique, conceptuelle et politique.
Florence de Mèredieu
Notes bibliographiques