déplacement

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


En allemand : Verschiebung, « déplacement », « manœuvre », de ver-, à valeur de renforcement, et schieben, « pousser », « faire glisser ».

Psychanalyse

Mécanisme caractéristique des processus inconscients (processus primaire) par lequel l'investissement – la quantité d'énergie psychique – lié à une représentation en est détaché et transféré à une autre, selon une liaison associative. Le déplacement rend en outre possible la sommation des investissements sur une représentation à la croisée de plusieurs chaînes associatives, et favorise ainsi la condensation.

Le déplacement se retrouve au principe de toutes les formations de l'inconscient (acte manqué, lapsus, mot d'esprit, symptôme psycho-névrotique), mais l'interprétation du rêve(1) est, pour Freud, l'occasion privilégiée de son étude. Le déplacement est, avec la condensation, la prise en compte de la figurabilité et l'élaboration secondaire, un des quatre mécanismes du travail du rêve qui transforme le contenu latent du rêve en son contenu manifeste. Le rêve est ainsi autrement centré, accentué : ce qui est nodal n'est indiqué que par des détails. Le déplacement sert donc, dans le rêve, la censure. Il revêt aussi une fonction défensive, dans les névroses phobiques et de contrainte, par exemple.

Relisant Freud à la lumière de la linguistique, R. Jakobson(2) et Lacan(3) s'accordent à identifier déplacement et métonymie – Lacan précisant que le désir est métonymique. Mais la notion de déplacement excède celle de métonymie. Le mécanisme du déplacement opère localement, comme dans le travail du rêve, mais entre aussi en jeu dans des échanges dont la dimension excède celle de mécanismes locaux – projection ou encore transfert, avec lequel Freud le confond parfois. Dans la pensée magique, le déplacement, qui dénie les séparations, relève d'une dynamique narcissique. Il restaure ainsi une continuité de seconde espèce qui vise à retrouver les modes de relation premiers à la mère.

Christian Michel

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Freud, S., Die Traumdeutung (1900), l'Interprétation des rêves, chap. VI, 2, PUF, Paris, 1967.
  • 2 ↑ Jakobson, R., « Deux aspects du langage et deux types d'aphasie » (1956), in Essais de linguistique générale, Minuit, Paris, 1963.
  • 3 ↑ Lacan, J., « L'instance de la lettre dans l'inconscient » (1957), in Écrits, Seuil, Paris, 1966.

→ affect, condensation, inconscient, magie, « névrose, psychose et perversion », processus, rêve