classes (paradoxe des)

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».

Logique, Mathématiques

En construisant, parallèlement à Frege, les premiers systèmes de logique, Russell se heurta dès 1901 au fameux paradoxe des classes (dit paradoxe de Russell)(1). Si on admet que toute classe peut appartenir à elle-même : la classe de toutes les classes est une classe, elle peut aussi ne pas s'appartenir : la classe des hommes n'est pas un homme. Mais alors la classe de toutes les classes qui ne s'appartiennent pas s'appartient-elle ? Si oui, elle possède la propriété qui la caractérise et ne s'appartient pas ; sinon, elle ne possède pas sa propriété caractéristique : il est faux qu'elle ne s'appartienne pas, donc elle s'appartient. On aboutit à un paradoxe : chaque branche de l'alternative conduit inéluctablement à une contradiction.

Russell communiqua à Frege ce paradoxe sous la forme suivante : soit W la classe des classes C qui ne s'appartiennent pas : {C : C ∉ C}, on a alors : (C) [(C ∈ W) = (C ∉ C)]. Puisque W est une classe comme une autre, on peut la substituer à la variable C dans la formule précédente, ce qui inéluctablement engendre la contradiction : [(W ∈ W) = (W ∉ W)](2).

Retrouvant les réflexions des Mégariques sur les limites de la rationalité discursive, Russell prit très au sérieux ce paradoxe et chercha le moyen de l'éviter. Après six ans d'efforts, il proposa une solution : sa théorie des types. Il s'agissait de prohiber la circularité tératologique en interdisant à une classe de s'appartenir, toute classe devant être d'un type supérieur à ses membres.

Denis Vernant

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Russell, B., Principes des mathématiques, chap. X, § 100-106, in Écrits de logique philosophique, trad. J.-M. Roy, PUF, Paris, 1989, pp. 148-158.
  • 2 ↑ Russell, B., Lettre du 16 juin 1902.
  • Voir aussi : Vernant, D., la Philosophie mathématique de B. Russell, chap. ii, § 41-42, pp. 271-289.

→ antinomie, types (théorie des)