Philippe V

Louis XIV et le duc d'Anjou
Louis XIV et le duc d'Anjou

(Versailles 1683-Madrid 1746), roi d'Espagne (1700-1746).

1. La guerre de la Succession d'Espagne et les traités d'Utrecht

Second fils du Grand Dauphin et de Marie Anne Christine de Bavière, il porte d'abord le titre de duc d'Anjou. Le testament du roi Charles II (1er novembre 1700), accepté par Louis XIV le 16 novembre 1700, fait de lui l'héritier de la monarchie espagnole, à condition que ne soient jamais réunies les couronnes de France et d'Espagne ; cette dernière est aussitôt revendiquée par l'archiduc Charles (→ Charles VI, empereur), qui recevra l'aide d'une coalition européenne (→ guerre de la succession d'Espagne).

Paresseux, timide, neurasthénique, Philippe V est encouragé à la lutte par sa femme, Marie-Louise de Savoie, épousée en septembre 1701, et par la princesse des Ursins, camarera mayor. Tandis que les agents de Louis XIV (→ Orry) s'efforcent de rénover l'Espagne, Philippe participe à la campagne d'Italie (1703), puis revient défendre l'Espagne, où l'archiduc, débarqué en 1705, trouve des partisans. Deux fois chassé de Madrid (1706 et 1710), le petit-fils de Louis XIV refuse, contre son grand-père, d'abandonner son trône, qui est raffermi par la victoire de Vendôme à Villaviciosa (décembre 1710) ; mais la Catalogne ne se soumettra qu'en 1714.

Contraint de renoncer à la couronne de France et de céder les Pays-Bas, le Milanais, Naples, la Sardaigne, la Sicile, Minorque et Gibraltar (→ traités d'Utrecht [1713] et de Rastatt [1714]), Philippe V ne pense qu'à revenir sur ses engagements.

2. La vaine reconquête de l'Italie

Après la mort de sa première femme (février 1714), qui lui a donné deux fils, Louis et Ferdinand, il se remarie avec Élisabeth Farnèse (décembre 1714), qui lui donnera notamment deux autres fils, Charles et Philippe. Le roi tombe immédiatement sous la coupe de son épouse, qui veut établir ses fils en Italie : elle fait renvoyer la princesse des Ursins et Orry, et impose Alberoni comme Premier ministre. Philippe V s'engage alors dans une reconquête de l'Italie, attaquant la Sardaigne et Naples (1717), et doit finalement s'incliner devant la Quadruple-Alliance (1718-1720) après la défaite navale de Passero (août 1718).

Ayant renvoyé Alberoni à la demande de Guillaume Dubois (1719) et renoué de bons rapports avec Paris, Philippe V, dont la neurasthénie s'aggrave, abdique en faveur de son fils aîné Louis (10 janvier 1724), puis reprend le trône à la mort de celui-ci (31 août 1724).

Le traité de Séville (1729), confirmé par celui de Vienne (1731), vaut à Charles (futur → Charles III), l'aîné d'Élisabeth Farnèse, l'expectative de Parme, de Plaisance et de la Toscane. L'intervention espagnole contre Charles VI dans la guerre de la succession de Pologne (1734-1736) permet à l'infant Charles d'échanger les duchés (qui reviennent à François de Lorraine) contre Naples et la Sicile (Vienne, 1738).

3. La guerre de la Succession d'Autriche

La rénovation maritime et coloniale due au ministre Patiño (1736), et poursuivie par le marquis de la Ensenada (1743-1746), provoque la déclaration de guerre de l'Angleterre (1739), mécontente que Philippe fasse pourchasser par des garde-côtes les navires contrebandiers anglais, qui abusent du vaisseau de permission, et suspende le privilège de l'asiento (1739), qu'il songe à ne pas lui renouveler en 1749.

Philippe, se rapprochant de la France (accords de Fontainebleau, 1743), ne s'engage pas moins dans une nouvelle campagne en Italie (→ guerre de la Succession d'Autriche), dont il ne verra pas la fin.

4. Une politique de réformes annonciatrice du despotisme éclairé

À sa mort, son fils Ferdinand VI lui succède dans un royaume où les constructions, inspirées de Versailles (La Granja, Riofrío, Aranjuez, Palais royal de Madrid), rappellent aujourd'hui encore le règne du premier Bourbon.

Par rapport à la maison d'Autriche, les modifications introduites par les Bourbons sont importantes. Les conseils de gouvernement sont remplacés par des secrétaires d'État responsables devant le roi, qui, lui, n'est plus responsable devant la nation mais seulement devant Dieu : ces réformes annoncent le grand mouvement de la Ilustración (despotisme éclairé). En outre, le droit public de la couronne d'Aragon est abrogé et remplacé par le castillan. L'administration provinciale et financière commence à être réorganisée sur la base des intendants à partir de 1711. Les rapports avec l'Amérique se renforcent, surtout depuis la perte des territoires européens ; l'alliance française, recherchée, s'efforce de compenser, par l'union des deux armées, la grandissante puissance britannique.

Pour en savoir plus, voir l'article Espagne : histoire.