Après de multiples réunions, les négociations entre patronat et syndicats pour assurer l'équilibre financier de l'assurance chômage échouent le 8 octobre. Les syndicats — une première sur un sujet aussi difficile — avaient présenté un plan commun, mais le patronat se refusait à toute augmentation nouvelle des cotisations des entreprises.

Pierre Bérégovoy réunit le 28 octobre l'ensemble des partenaires sociaux et prend une série d'engagements destinés à rendre plus acceptable une augmentation des cotisations à l'UNEDIC (au 1er novembre, la cotisation des salariés est passée de 0,84 % à 1,32 % et celle des entreprises de 2,76 % à 3,48 %).

Dans la foulée, tant pour manifester son mécontentement que pour bâtir un nouveau système, le CNPF dénonce la convention UNEDIC. Une nouvelle réunion, véritable parodie tragi-comique de la négociation, échoue le 19 novembre, obligeant le gouvernement à intervenir par décret.

Réalisme

Si les syndicats, en établissant un plan commun d'économies, manifestent à cette occasion un certain réalisme, la politique contractuelle montre ses limites, l'interventionnisme de l'État traduisant la carence des partenaires sociaux à s'entendre. Le même scénario risque cependant de se reproduire sur l'adaptation des régimes complémentaires à l'abaissement de l'âge de la retraite, le patronat s'étant opposé, lors de la reprise des négociations le 22 décembre, à toute nouvelle augmentation de charges, et l'État n'ayant pas encore précisé quelle contribution il était enfin prêt à accorder à un éventuel système transitoire.

Pourtant, dans ce contexte difficile, où la rigueur économique le dispute à la rigueur sociale, les confédérations syndicales optent pour une attitude globalement positive face au pouvoir. Il n'y a pas eu d'affrontement, et, malgré coups de colère et haussements de ton, les syndicats se sont montrés plutôt modérés. En d'autres temps, un blocage des salaires, une diminution de la garantie de ressources, l'institution d'un forfait hospitalier auraient déclenché d'importantes grèves

Rigueur

Les centrales ouvrières ont préféré faire preuve de réalisme tant économique que... politique. La CGC, cependant, a accentué son opposition à la politique gouvernementale, demandant le départ du Premier ministre et organisant une manifestation parisienne de protestation le 18 novembre. Néanmoins, lors d'un inter-congrès les 15 et 16 octobre, elle s'est livrée à un toilettage de sa doctrine qui peut ouvrir la voie à quelques adaptations, au moins dans les entreprises.

Pour la CGT, toujours en phase d'apprentissage du changement, l'orientation gouvernementale va plutôt dans le bon sens, malgré quelques erreurs et insuffisances. Soucieuse de faire du maintien du pouvoir d'achat des salariés son principal cheval de bataille, elle s'est opposée au blocage mais sans impulser de grandes actions. Elle a cependant appelé avec plus d'insistance à l'intervention des travailleurs, considérant que celle-ci peut permettre de corriger les options négatives d'un gouvernement jugé sensible à l'opinion des salariés.

Pour sa part, la CFDT, satisfaite de constater que le gouvernement commençait en partie à faire sienne la rigueur qu'elle préconisait, est demeurée proche du pouvoir. Mais elle lui a reproché à plusieurs reprises de naviguer à vue et s'est heurtée à lui sur la remise en cause de l'engagement d'augmenter le pouvoir d'achat du SMIC d'au moins 4 % en 1982.

Divisés

FO s'est montrée plus dure, dénonçant très vivement le corset imposé à la politique contractuelle, la diminution du taux des préretraites et les ambiguïtés d'interprétation auxquelles une circulaire de Jean Le Garrec a ensuite donné lieu. Mais André Bergeron, désireux de ne pas créer de difficultés supplémentaires au gouvernement, s'est personnellement opposé à une demande de grève générale de ses militants. La CFTC a elle aussi élevé le ton, manifestant ses inquiétudes quant aux risques de « glissement vers l'étatisme » et de « régression sociale ».

Si les syndicats ont harmonisé leurs positions sur l'assurance chômage, ils sont demeurés divisés. La rencontre entre Henri Krasucki et Edmond Maire le 27 septembre n'a permis aucun rapprochement. FO, la CFTC et la CGC ont renoncé à la manifestation commune de rentrée dont ils avaient envisagé l'opportunité en juillet. Les rivalités liées à la campagne pour les élections prud'homales ont joué. Et les mutations électorales provoquées par le scrutin du 8 décembre ont été plus importantes que prévues.

Recul

L'important recul de la CGT — moins 5,59 points — n'a pas bénéficié à la CFDT ni à FO, qui ont faiblement progressé.