Ces problèmes de répartition des personnels ont été accrus à la rentrée de 1982 par la décision prise par le gouvernement de résorber l'auxiliariat.

Les années précédentes, les ministres de l'Éducation nationale avaient toujours la possibilité de recruter des maîtres auxiliaires à la rentrée ou en cours d'année pour remplacer les professeurs absents. En 1982, Alain Savary ayant interdit de faire appel à de nouveaux personnels non titulaires, les recteurs disposaient de beaucoup moins de souplesse. Néanmoins, après quelques jours d'attente, les bavures de la rentrée ont disparu, grâce à une meilleure répartition des personnels, titulaires ou non, et à un encouragement aux enseignants du Sud à venir travailler dans le Nord.

Les 12 700 000 élèves de l'enseignement public et privé qui ont repris les cours à cette rentrée l'ont fait dans un climat qu'Alain Savary souhaite différent. Plutôt que de commencer à réformer les structures, le ministre s'attache d'abord à transformer les esprits. Un certain nombre de textes applicables à la rentrée et qui ont été longuement discutés auparavant donnent aux personnels, aux parents, aux élèves, la possibilité de prendre ensemble des initiatives dans un nouveau climat, où l'hostilité, trop souvent de mise entre ces partenaires, devrait céder la place à une communauté scolaire.

Ouvrir l'école sur la vie, travailler en équipe, apprendre aux jeunes la responsabilité, tels sont les principaux axes autour desquels parents, enseignants et élèves doivent bâtir le projet de chaque établissement. Ces directives, qui se veulent incitatives, peuvent entraîner des modifications, même ponctuelles, dans la vie des établissements. Dans les 2 500 lycées, une consultation nationale des enseignants le 6 octobre, puis des enseignants, des élèves et des parents le 13 décembre a permis aux personnels et aux usagers de faire connaître leurs avis sur les orientations à donner aux formations ou, plus simplement, de formuler des propositions pour améliorer la vie dans leur propre établissement.

Dans une lettre adressée aux enseignants le jour de la rentrée, Alain Savary écrit : « L'État ne peut rien à lui seul. Dans le domaine de l'éducation, il ne peut rien améliorer ou transformer sans l'accord de la société, l'appui des familles et peut-être surtout sans la volonté des enseignants. » Souhaitant favoriser les initiatives et les recherches, le ministre de l'Éducation nationale considère que les personnels dépendant de son administration doivent être « des acteurs pleinement responsables ». Il attend d'eux que, dès cette année, une amélioration se produise dans la vie des établissements en attendant les réformes qui sont en chantier dans plusieurs groupes de travail. Avant l'éclosion des réflexions en cours et des décisions politiques qui suivront, l'année scolaire 1982-83 est un test quant à la volonté des personnels et des usagers de participer à une rénovation en profondeur du système éducatif.

Privé contre public

Alain Savary, ministre de l'Éducation nationale, présente, le lundi 20 décembre, son projet Enseignement public et enseignement privé. Ce projet concerne l'avenir des 10 000 écoles privées (environ 2 millions d'élèves) aidées par l'État dans le cadre des lois Debré et Guermeur (Journal de l'année 1976-77). Alain Savary propose d'insérer l'enseignement privé au sein du service public ; la sectorisation serait étendue à l'enseignement privé. Les statuts des personnels seraient harmonisés. Les négociations sur la base de ces propositions doivent débuter dans les premiers jours de janvier. D'ores et déjà, les principales organisations de défense de l'enseignement privé rejettent le projet Savary et se mobilisent contre ce qu'ils appellent la socialisation de l'enseignement libre. Un peu partout en France, les manifestations en faveur du maintien de l'école libre se multiplient. La guerre scolaire est rallumée.

Supérieur : mieux orienter les étudiants

Après avoir choisi de recréer un grand ministère de l'Éducation nationale incluant l'enseignement supérieur, le gouvernement a affirmé son intention de modifier les formations dispensées dans les universités et les grands établissements. Une commission animée par Claude Jeantet a été chargée de réfléchir sur une réforme de la loi d'orientation de l'enseignement supérieur élaborée en 1968 par Edgar Faure. Selon le ministre, il s'agit d'augmenter le nombre des étudiants – actuellement près de 900 000 – pour le porter à un niveau équivalent à celui qui est atteint dans d'autres pays développés, tels les États-Unis et le Japon.

Cela nécessite la mise en place de méthodes d'enseignement permettant de mieux orienter les étudiants vers les métiers d'avenir et de donner à leur formation une finalité professionnelle plus marquée. Ces nouvelles missions confiées aux établissements d'enseignement supérieur obligent ces derniers à s'ouvrir davantage sur leur environnement, notamment économique, mais aussi régional et international. Elles impliquent aussi un rapprochement entre les universités et les grandes écoles, en incitant chacune de ces catégories à poursuivre simultanément des activités d'enseignement, de recherche fondamentale et appliquée et de formation continue.