Lors du congrès du Baas du 17 juin au 22 juin, il est par ailleurs élu secrétaire général du bureau politique du parti, la réunion du Parlement le 25 devant ouvrir la voie au plébiscite, courant juillet, qui entérine l'élection avec 97 % des voix. Bachar a réussi à consolider sa position à l'égard des trois piliers du pouvoir : l'armée, le parti Baas et les services de renseignements qu'il a contribué à rajeunir.

Bachar, le « Docteur-Monsieur Propre »

Grand, les yeux bleus, une fine moustache, célibataire, Bachar el-Assad a souvent été présenté comme l'opposé de son frère aîné Bassel, brillant ingénieur, à la personnalité charismatique et sportif de renom qui en 1987 décrochait la médaille d'or d'équitation aux jeux méditerranéens de Lattaquieh. Lui était au contraire décrit comme énigmatique, sans assurance particulière et affligé d'un défaut d'élocution. Pourtant, le brillant étudiant en médecine apprend peu à peu à se faire respecter. En tant que président de la Société civile informatique syrienne d'abord, dans laquelle le « Docteur B » œuvre au développement de l'usage des ordinateurs et d'Internet et passe pour un homme entreprenant, moderne et ouvert sur le monde. Comme « Monsieur Propre » chevalier blanc de la lutte contre la corruption ensuite. Dans l'armée enfin, où il reçoit dès 1999 le grade de colonel. En imposant une limite d'âge de soixante-cinq ans dans les sphères étatiques, il pousse par ailleurs vers la sortie le chef d'état-major et bon nombre de responsables des services spéciaux. Par ailleurs, il n'oublie pas de peaufiner son image internationale en effectuant plusieurs voyages, au Liban et dans le Golfe.

D'un pays désorganisé et fragilisé par les nombreux coups d'État, Hafez el-Assad, « l'autocrate à la main de fer », a réussi en trente ans à établir une puissance régionale stable. L'opposition est étouffée et l'opinion acquise à coups de répression. Les minorités sont intégrées dans un fort sentiment national. Pour asseoir son pouvoir, Bachar devra néanmoins faire face à l'opposition de son oncle. Le frère déchu n'a pas renoncé au pouvoir et critique déjà l'inexpérience du neveu en utilisant la chaîne de télévision Arab News Network, dirigée par son fils et qui diffuse depuis Londres. Bachar devra également se méfier d'une éventuelle revanche des sunnites majoritaires, écartés par Hafez et qui pourraient profiter de la transition.

Parmi les gros dossiers de la succession, Hafez el-Assad transmet à son fils le soin de renforcer « la tutelle » sur le Liban, déjà terrain d'exercice du jeune Bachar qui y a installé ses propres réseaux. Mais le dossier le plus épineux reste celui du Golan. Le jeune successeur reste sur les pas de son père (il conserve d'ailleurs l'inamovible ministre des Affaires étrangères, Farouk El Chareh, au sein du bureau politique) et exige d'Israël un retrait total du territoire syrien occupé, la seule base de discussion possible étant la ligne du 4 juin 1967 qui prévalait avant la guerre des Six-Jours. Même si les négociations ont repris depuis le 13 juin, le processus de paix israélo-syrien souffre pour le moment d'une conjoncture défavorable : consolidation nécessaire des positions en Syrie, nécessité de ressouder la coalition de Barak en Israël et campagne électorale aux États-Unis.

Céline Cabourg

Redresser l'économie

Depuis deux ans, l'économie syrienne se dégrade et le pays traverse une véritable récession. Plusieurs facteurs expliquent ces mauvais résultats : la conjoncture défavorable et la sécheresse qui touche l'agriculture dans son ensemble et le coton en particulier, le tarissement des ressources en pétrole qui représentent 30 % du PIB et 55 % des recettes d'exportation, les 20 milliards de dollars de dette contractée auprès des pays de l'ancien bloc de l'Est et enfin des législations trop rigides qui découragent les investisseurs. Pièce maîtresse de la stratégie de Bachar, le Liban fait figure de poumon économique pour la Syrie, placé ainsi sous la coupe politique et économique de ce dernier.