Les dérives du football business

Sport-spectacle le plus populaire au monde, parfaitement relayé par la télévision, le football est devenu l'enjeu d'un commerce très lucratif. Riches et influentes, les fédérations sont de véritables superpuissances et les clubs, des entreprises souvent prospères. Quant aux joueurs, stars désormais millionnaires, ils s'offrent des carrières parfois fulgurantes, pressés par trop d'enjeux.

Zinedine Zidane : « Je trouve toutes ces sommes ridicules. Je ne pense pas valoir 480 millions de francs. Et d'ailleurs personne ne les vaut. » Zinedine Zidane est un héros et sa parole est d'or. Aussi, lorsque le meneur de jeu de l'équipe de France, championne d'Europe et du monde, critique ouvertement les affolantes indemnités de transfert offertes par un club – le Real Madrid – pour acquérir son nom et son talent, il convient de s'interroger. Le marché du football serait-il devenu assez fou pour que même ses premiers rôles, ses acteurs les plus en vue – et donc les plus grassement rémunérés – s'alarment et s'écœurent ?

En 2000, l'économie du foot a une nouvelle fois crevé les plafonds et repoussé les limites de la décence. Le Portugais Luis Figo et l'Argentin Hernán Crespo, acquis respectivement pour 390 (59,5 millions d'euros) et 370 millions de francs (56,5 millions d'euros) par le Real Madrid et la Lazio de Rome, sont les nouveaux recordmen de ce sport d'un genre un peu particulier : le transfert. Dépassé, enfoncé, le score de la merveille brésilienne Ronaldo qui avait défrayé la chronique en 1997 en passant du FC Barcelone à l'inter de Milan pour 170 millions de francs (26 millions d'euros). Le Français Fabien Barthez, quant à lui, est devenu le gardien de but le plus cher de l'histoire en quittant Monaco pour Manchester United en échange de 80 millions de francs (12,2 millions d'euros).

Les salaires des stars du football et les montants des droits télévisés ont suivi la même courbe inflationniste. Parmi les joueurs les mieux payés du monde, l'Italien Alessandro Del Piero émargeait en 2000 à 3 millions de francs (457 350 euros) mensuels à la Juventus de Turin. À l'orée de la saison 2000/2001, Del Piero était détrôné par l'Espagnol Raul, 23 ans, dont les revenus au Real Madrid sont estimés à 3,6 millions de francs (560 000 euros) par mois : plus de 43 millions annuels (6,7 millions d'euros), nets d'impôts, auxquels il convient d'ajouter les lucratifs revenus provenant de sponsors. Ceux-ci ne sont-ils pas capables d'acheter l'image – pourtant ternie – d'un Nicolas Anelka pour 5 millions de francs par an (762 250 euros). Des chiffres à faire tourner la tête.

Un spectacle lucratif

Car le football, en Europe et dans le monde, est devenu un véritable business. Les télévisions sont prêtes à surenchérir à l'infini pour acquérir les droits de retransmission des grands événements et même de matches d'intérêt secondaire dont les taux d'audience ne cessent de croître. À la veille de la victoire des Bleus en finale de l'Euro 2000. la Fédération française de football (FFF) s'assurait ainsi une manne de 1 milliard de francs en vendant à TF1 le droit de diffuser les matches de l'équipe de France dans la période 2001-2005... à l'exclusion des matches de Coupe du monde et de Championnat d'Europe !

Pour avoir le droit d'équiper les champions du monde pendant trois ans, le fabricant de vêtements et de matériels de sport Adidas a pour sa part versé à la même FFF 350 millions de francs (53,3 millions d'euros). Enfin, la société ISL Worldwide a payé 830 millions d'euros à la Fédération internationale de football association (FIFA) pour acquérir les droits de retransmission du Mondial 2002. Elle réclame en retour aux chaînes intéressées près de dix fois plus que ce qu'elles avaient dépensé en 1998. Déjà fixés, les droits du Mondial 2006, qui se déroulera en Allemagne, devraient atteindre 950 millions d'euros.

Dans ce genre de compétition, il vaut mieux être du côté des vainqueurs. Et pas seulement pour la gloire ! Pour avoir remporté l'Euro 2000, la France a empoché 61 millions de francs (9,31 millions d'euros) de primes de la part de l'Union européenne de football association (UEFA). Éliminés sans brio, le Danemark, la Suède, l'Allemagne ou la Slovénie ont tout de même récolté 20 millions de francs (3 millions d'euros).