Au seuil de l'an 2000, les choses seraient-elles déjà jouées en faveur de la gauche ? Ce serait très abusif de le prétendre. Non seulement le pays reste électoralement partagé en deux camps sensiblement égaux, l'effondrement du RPR aux élections européennes étant assez largement compensé par le succès relatif des listes Pasqua et Bayrou ainsi que par le score, plus difficile à interpréter, de la liste Chasse, Pêche, Nature et Traditions qui passe la barre des 5 % et envoie 6 de ses représentants à Strasbourg. Si Jacques Chirac a perdu bien des batailles au cours des dernières années, il n'a pas encore perdu la guerre, tant s'en faut. L'extrême droite continuant de se déchirer, le maître chanteur qui ces dernières années pensait tenir le sort des modérés entre ses mains a désormais perdu l'essentiel de sa capacité de nuisance. À peine fondé, le RPF de MM. Pasqua et de Villiers est entré dans une grave crise d'orientation, le président du Conseil général des Hauts-de-Seine refusant de sacraliser le clivage droite-gauche sur lequel celui de la Vendée fonde sa stratégie. Au RPR, l'indépendance retrouvée du parti se paie inévitablement par des démonstrations appuyées de fidélité à la personne de Jacques Chirac, candidat incontournable du mouvement à l'élection présidentielle. À l'UDF, enfin, l'autonomie stratégique reconquise rencontre également ses limites : celle d'un groupe parlementaire d'abord, dont les membres sont peu soucieux d'hypothéquer leur propre réélection par le soutien de la candidature de l'un des leurs à l'Élysée, et celle d'une partie de la direction du mouvement, conduite par Philippe Douste-Blazy qui joue d'autant plus activement la carte du soutien à l'Élysée que François Bayrou semble travaillé par la tentation inverse.

Non, décidément, les tumultes de l'année n'empêcheront pas M. Chirac d'achever 1999 dans une relative quiétude politique, seulement troublée par la fureur des éléments déchaînés !

Jean-Louis Bourlanges,
député au Parlement européen