De fait, les ministres des Finances de l'Union européenne réunis à Dublin, les 20 et 21 septembre, précisent encore leurs engagements réciproques : la stabilité budgétaire au sein de la zone euro sera assurée par une action préventive adoptée dans chaque pays grâce à des « programmes de stabilité » et par le renforcement de la surveillance multilatérale, mais aussi par une mesure dissuasive, la pénalisation des pays franchissant la « ligne rouge » (déficit public de 3 % du PIB, dette nationale de 60 % du PIB). Par ailleurs, un « Conseil de stabilité » serait créé. Il ne comprendrait que les ministres des pays de la zone euro et constituerait un sous-ensemble de l'actuel Conseil des ministres de l'Économie et des Finances (ECOFIN). Il ne serait cependant pas habilité à prendre les décisions juridiques que seul ECOFIN, en vertu du traité de Maastricht, est autorisé à adopter. Enfin, les pays ayant vocation à rejoindre l'Union économique et monétaire (UEM), dès 1999, évolueraient dans une bande de fluctuation de plus ou moins 15 % autour des taux pivots, dans une sorte de système monétaire européen bis (SME-bis). La Banque centrale européenne interviendrait automatiquement pour soutenir les devises. Le statut de l'euro permettrait la continuité des contrats, tout en affirmant sa parité absolue avec l'écu.

Bref, malgré les vents contraires, l'euro, dont le Conseil européen a décidé la création en décembre 1995, garde une bonne chance de finir par s'imposer et de donner à l'Europe une puissance monétaire correspondant à son poids économique et commercial dans le monde. De nombreuses questions, certes, restent encore à régler avant l'institution de la monnaie unique, mais l'opinion prévaut, à la fin de l'année 1996, que la création du SME-bis ou la mise en place d'un pacte de stabilité budgétaire ont moins d'importance que le comportement favorable des marchés financiers et la volonté politique actuelle de donner le jour à l'euro, aussi forte à Paris et à Bonn qu'à Rome, Bruxelles et Madrid. En novembre, le retour de la lire dans le SME (elle l'avait quitté en 1992) confirme cette tendance.

De la présidence irlandaise à la présidence néerlandaise

La présidence irlandaise de l'Union européenne est marquée par deux réunions du Conseil européen. La première, de caractère extraordinaire, se tient le 5 octobre à Dublin. La seconde s'est également réunie à Dublin, les 13 et 14 octobre. Objectif proclamé de « Dublin I » : tenter de donner à la CIG une nouvelle impulsion. En fait, le temps consacré à la crise aiguë du processus de paix israélo-palestinien (le rôle politique de l'Union européenne au Moyen-Orient est de moins en moins proportionné à son engagement financier dans la région) ne permet pas, à proprement parler, au cours d'une rencontre aussi brève, d'aller au fond des problèmes sur lesquels bute la CIG. Les chefs d'État et de gouvernement se contentent donc de confirmer que la CIG devrait se terminer au plus tard à Amsterdam, le 14 juin 1997, au terme de la présidence irlandaise, tandis que MM. Chirac et Kohl réaffirment leur volonté de maintenir un « niveau d'ambition élevé ». Par ailleurs, il est convenu de présenter un projet « complet » de traité révisé au Conseil européen de décembre. Réunis à Dublin les 13 et 14 décembre, les Quinze se penchent en priorité sur la question de la monnaie commune et s'accordent sur un « pacte de stabilité et de croissance », destiné à poser les règles budgétaires que les pays de la zone euro devront observer après l'entrée en vigueur de la monnaie unique en janvier 1999. La logique de ce pacte est l'obtention d'un quasi-équilibre budgétaire à moyen terme et, dans le court terme, du maintien rigoureux d'un déficit inférieur à 3 % du PIB. Si la norme n'est pas respectée, le pays contrevenant s'expose à de lourdes sanctions. Les Allemands souhaitaient que l'application de ces sanctions soit automatique, sauf circonstances exceptionnelles, définies par une baisse d'activité supérieure à 2 % en un an. Les autres pays ont finalement obtenu que le seuil de ces circonstances exceptionnelles soit limité à 1,5 %, qu'il y ait concertation politique au sein du Conseil européen entre 0,75 % et 1,5 %, et application automatique des sanctions au-dessous de 0,75 %. Cet arrangement permet de confirmer la date de naissance de la monnaie commune à la date prévue, alors que depuis plusieurs semaines, certains craignaient un report à une date ultérieure.