Journal de l'année Édition 1996 1996Éd. 1996

Patrimoine

Patrimoine

Une fois encore, les journées du Patrimoine, qui se tenaient pour la douzième fois, les 16 et 17 septembre, dans l'ensemble de l'Hexagone, ont montré l'intérêt que portent les Français à leur patrimoine : 7 millions de visiteurs (contre 6,5 millions l'an passé) ont profité de l'ouverture souvent exceptionnelle de 10 192 monuments publics ou privés. Le ministre de la Culture, Philippe Douste-Blazy, n'a pas manqué de mentionner la portée économique de ce patrimoine qui dévore un milliard et demi de francs, soit 10 % du budget de son ministère : « un million de francs investis dans la restauration créent 2,3 emplois, contre 1,5 dans la construction neuve ». Il a rappelé que 3 500 chantiers s'ouvrent chaque année pour le seul patrimoine, sous la direction du ministère de la Culture : « Ils permettent le maintien d'un vaste réseau de PME spécialisées en travaux d'art et de restauration, détentrices d'un savoir-faire précieux et dépositaires des techniques traditionnelles. » Quant à l'entretien, il concerne chaque année plus de 3 000 artisans qualifiés.

Optimisme

Fort de ce soutien institutionnel, le « grand patrimoine » ne se porte pas trop mal en dépit des inévitables Cassandre. Bien sûr, quelques cathédrales – celle de Beauvais, par exemple – doivent toujours être soumises à une surveillance de tous les instants. Bien sûr, l'appétit des promoteurs qui lorgnent désormais cette bonne affaire que semble être devenue l'exploitation du patrimoine culturel n'est jamais rassasié. Chambord, le Mont-Saint-Michel ou le palais des Papes à Avignon sont régulièrement investis de projets plus ou moins farfelus destinés à étancher la soif du « tourisme de masse ». Avec, parfois, l'aide de municipalités ou d'élus locaux. Mais des décisions comme celle du Conseil d'État, qui, au printemps de 1995, a permis l'élaboration d'un nouveau statut pour Versailles, sont des avancées significatives. Désormais, le nouvel Établissement public de Versailles rassemble sous la même houlette château, musée et parc. Son budget (190 millions de francs) sera renforcé. Les recettes des entrées (112 millions de francs) devraient être affectées à... Versailles, en dehors d'une somme forfaitaire (une vingtaine de millions de francs) destinée à alimenter la Réunion des Musées nationaux. La programmation de la restauration des bâtiments ou du parc devrait être amplement facilitée.

Mais, surtout, l'Établissement public a pour vocation de récupérer les morceaux épars de l'ancien domaine royal, tombés au fil du temps dans l'escarcelle de diverses administrations. Un montage juridique reposant sur la copropriété et l'indivision a été mis sur pied. Un certain nombre de terrains et de bâtiments relevant autrefois du domaine royal (et dont la liste a été dressée) sont désormais indivis entre l'Établissement public de Versailles et l'actuel affectataire. Si ce dernier n'en a plus l'usage, il doit se retirer de l'indivision. La propriété complète en revient alors au « Grand Versailles », sans bourse délier. C'est le cas de l'hôpital militaire Larrey, l'ancien Grand commun du château, qui a cessé de fonctionner depuis la fin de 1995. Ce sera le cas, dans un futur plus ou moins proche, du camp des Mortemets ou du camp des Matelots, vastes terrains de 56 et de 70 hectares, propriété du ministère de la Défense, des 80 hectares expérimentaux de l'Institut national de la recherche agronomique (ministère de l'Agriculture) ou des 205 hectares de l'arboretum de Chèvreloup détenus par le ministère de l'Éducation nationale. Au total, le domaine de l'Établissement public de Versailles, formidable poumon vert au sein d'une région sururbanisée, pourrait passer, au cours du prochain siècle, de 812 à plus de 1 200 hectares. Jean-Pierre Babelon a été nommé directeur de l'Établissement public et Hubert Astier, ancien chef de cabinet de Jacques Toubon, préside au conseil d'administration.

Industrie

Si le patrimoine « noble » s'en tire finalement plutôt bien, le patrimoine industriel français reste largement négligé. Sans doute des initiatives locales ont-elles été appuyées ici ou là depuis une vingtaine d'années. Mais ces efforts fragmentaires ne rencontrent pas au sein de l'Administration un écho suffisant pour que s'élabore une véritable politique nationale.