Journal de l'année Édition 1996 1996Éd. 1996

À l'exemple de ce qui peut être observé à l'étranger, ces investisseurs se soucient surtout de renforcer le contrôle des actionnaires sur les dirigeants des entreprises. Cherchant à obtenir le meilleur rendement pour leurs placements et sans pour autant participer aux décisions stratégiques, ils donnent aux dirigeants un seul but, celui de maximiser le profit et les dividendes. Sous leur influence, les sociétés françaises sont amenées à se préoccuper des actionnaires minoritaires français, ceux dont le pouvoir a été confisqué à travers un processus bien connu. Ainsi, pour la première fois en 1995, les célèbres fonds américains de pension vont exercer systématiquement leur droit de vote lors des assemblées générales des sociétés non américaines dont ils sont actionnaires. Les gestionnaires de ces fonds y sont contraints par un règlement du département du travail américain du 29 juillet 1994. Jusqu'à présent, seules les sociétés américaines étaient concernées par cette mesure. Les investisseurs étrangers, qui détiennent le tiers des actions de la place de Paris, pourraient donc se transformer en « faiseurs de roi » dans les conseils d'administration français. Il est probable que les dirigeants des entreprises françaises seront de plus en plus sous contrôle.

En Grande-Bretagne, à la suite de plusieurs scandales financiers retentissants (Polly Peck, Maxwell, BCCI...), le Financial Reporting Council et la Bourse de Londres ont créé en mai 1991 une commission présidée par sir Adrian Cadbury. Son objectif est de clarifier le rôle des acteurs d'une société (administrateurs, actionnaires, auditeurs) et d'édicter un certain nombre de recommandations pour améliorer le corporate governance (système de direction et de contrôle des sociétés). Le travail de cette commission a abouti à la rédaction d'un code de bonne conduite qui prône les mesures suivantes : division des responsabilités au sein du conseil d'administration, avec distinction entre les postes de Chairman et de Chief Executive Officer ; présence d'administrateurs extérieurs « disposant d'une véritable indépendance » ; existence de comités externes d'audit pour préparer comptes et rapports aux actionnaires et assurer leur diffusion.

Au cours de l'année 1994, la reprise a été très bénéfique pour les grands groupes français : les résultats se sont nettement améliorés puisque, en moyenne, les bénéfices ont doublé, alors que les chiffres d'affaires ne progressaient que de 5,2 %. Cette rentrée de bénéfices a été affectée en priorité au désendettement, les groupes achevant ainsi une lente mutation qui les fait passer d'une économie d'emprunt à un développement sur fonds propres.

Gilbert Rullière