Quelques jours après la constitution de son gouvernement, Alain Juppé, Premier ministre, prononce deux déclarations de politique générale, l'une devant l'Assemblée nationale le 23 mai (447 voix pour, 85 voix contre), l'autre le lendemain devant le Sénat (232 voix pour, 78 voix contre).

Alors que les 6 et 7 juin, chacune des deux assemblées organise en son sein un débat à la suite d'une déclaration du gouvernement sur la situation en ex-Yougoslavie, le gouvernement fait également une déclaration sur sa politique européenne à l'Assemblée nationale le 20 juin suivant. Et, si les travaux législatifs commencent fin juin, c'est en fait au cours de la session extraordinaire de juillet que le Parlement adopte les premières dispositions législatives du nouveau septennat.

Les premières mesures économiques et sociales

Devenue une pratique habituelle au lendemain d'une élection présidentielle, l'adoption de la loi portant amnistie exprime traditionnellement une volonté d'apaisement politique et social et offre une chance de réinsertion aux contrevenants. Cette année, elle se distingue cependant des précédentes en étant plus restrictive qu'elles, notamment en matière d'infractions ayant entraîné l'interdiction du territoire français et de contraventions au Code de la route. En outre, son examen est rendu délicat par l'épineuse question de l'amnistie de l'entrave à l'interruption volontaire de grossesse, laquelle est finalement exclue du champ d'application de la loi.

Plusieurs textes économiques et sociaux sont inscrits à l'ordre du jour de cette session extraordinaire, afin de mettre rapidement en œuvre certaines promesses électorales du président de la République. Ainsi, le plan d'urgence pour l'emploi, qui prend la forme de deux projets de loi – le projet instituant le contrat initiative-emploi et le projet relatif à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale –, repose sur des mécanismes simples essentiellement tournés vers l'allégement des charges des entreprises qui doivent permettre un impact important sur les embauches, en particulier des personnes le plus en difficulté.

Le projet de loi de finances rectificative pour 1995, quant à lui, s'inscrit dans la double perspective de maîtrise des déficits publics et de priorité donnée à l'emploi. L'équilibre des comptes, réalisé sous la contrainte du respect des critères de convergence fixés par Maastricht, est obtenu au prix d'une augmentation, présentée comme provisoire, de la pression fiscale. Quant aux mesures nouvelles, elles concernent à titre principal deux actions prioritaires du gouvernement : l'emploi et le logement. Il convient de relever que l'adoption de la loi de finances rectificative est précédée par l'examen d'une proposition de loi tendant à relever de 18,6 % à 20,6 % le taux normal de la TVA à compter du 1er août 1995. Bien que constituant un élément essentiel du collectif budgétaire, cette mesure fiscale doit, pour des problèmes de calendrier parlementaire, faire l'objet d'une adoption anticipée par le biais d'une initiative parlementaire. Selon la procédure habituelle, ce relèvement du taux n'aurait pu entrer en vigueur avant le 10 août, occasionnant vraisemblablement des problèmes difficilement surmontables aux professionnels ayant à appliquer la hausse.

Une demi-douzaine d'autres projets de loi sont également adoptés définitivement lors de cette session : le projet de loi de programmation du « nouveau contrat pour l'école », qui donne en particulier une base législative à la nouvelle organisation pédagogique des collèges et qui prévoit la programmation jusqu'en 1999 des moyens budgétaires pour les mesures du contrat ayant des incidences financières ; le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1993 ; le projet de loi portant transposition de la directive no 93/7 du 15 mars 1993 du Conseil des Communautés européennes relative à la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d'un État membre ; le projet de loi relatif à la partie législative du livre III du code des juridictions financières, qui porte codification des dispositions relatives à la Cour de discipline budgétaire et financière ; un accord avec les Pays-Bas concernant le contrôle des personnes sur les aéroports de Saint-Martin, île antillaise mi-néerlandaise, mi-française, plaque tournante du trafic illicite des stupéfiants ; l'approbation d'une convention sur la sûreté nucléaire qui, signée à Vienne (Autriche) le 17 juin 1994, constitue le premier accord international dans le domaine de la sûreté des centrales nucléaires civiles fixes.