Journal de l'année Édition 1993 1993Éd. 1993

En politique internationale, la Hongrie, animée par le souci de ses minorités vivant dans les pays voisins, s'efforce de ne pas se laisser entraîner dans les bouleversements postyougoslaves. Tout en étant solidaire de la Pologne et de la Tchécoslovaquie dans la politique européenne du « Triangle de Vysehrad », la Hongrie s'oppose fermement à la construction et à la mise en marche d'une centrale hydroélectrique sur le Danube, grande entreprise commune avec la Tchécoslovaquie depuis 1977. Cette centrale menacerait en effet gravement l'équilibre écologique des eaux du Danube et tout le système de navigation du grand axe Rhin-Danube-mer Noire. Le conflit prend des dimensions considérables en octobre et en novembre, et se trouve loin d'accéder à sa solution. Cependant, la Hongrie ne formule aucune revendication de modification de frontières.

Tchécoslovaquie

Les 5 et 6 juin, pas moins de 46 partis se sont présentés aux élections législatives. En République tchèque (Bohême), la droite libérale de Vaclav Klaus (Parti civique démocratique) l'emporte avec 33 % des suffrages. En Slovaquie, la « gauche » nationaliste, et notamment le Mouvement pour une Slovaquie démocratique de Vladimir Meciar (33 %), totalise plus de 48 % des voix et remplace au pouvoir les chrétiens-démocrates de Jan Carnogorski, qui n'ont obtenu que 9 % des suffrages. M. Meciar comme le président et le vice-président de l'Assemblée nationale slovaque sont issus de l'ex-PCT (Parti communiste). Après la « séparation de velours », décidée le 19 juin (confirmée le 6 octobre par les deux Premiers ministres tchèque et slovaque), le président fédéral Vaclav Havel, symbole de la « révolution de velours », quitte ses fonctions. Défenseur comme lui de l'unité de la Tchécoslovaquie, le président de l'Assemblée nationale, Alexandre Dubcek, meurt le 7 novembre, des suites d'un accident de la route. Autre symbole de la nouvelle Tchécoslovaquie, le cardinal Tomasek s'est éteint au mois d'août. La situation économique, avant et pendant le processus de séparation, ne cesse de diverger entre les deux États : préoccupante en Slovaquie, elle permet un optimisme prudent en Bohême et en Moravie. Ainsi, la République tchèque a réussi à avoir un excédent budgétaire de 6 milliards de couronnes, tandis que la Slovaquie comptabilise un déficit de 2 milliards. Le taux de chômage a dépassé 11 % en Slovaquie, alors qu'il plafonne à 7 % en Bohême. Dans la perspective de la séparation, la politique étrangère des deux pays se dessine déjà assez différemment. Prague regarde l'orientation du « Triangle de Vysehrad » quelque peu froidement, tandis que Bratislava souligne son attachement à la formule triangulaire menant à l'association et à la participation à la CEE. Cette formule devrait se muer automatiquement en « quadrilatérale ». La question reste ouverte.

Les dirigeants des deux pays s'inquiètent des destinées de la minorité tchèque et slovaque en Serbie et envisagent (la Slovaquie surtout) avec vigilance toute idée de modification des frontières liée à l'existence en Slovaquie d'une minorité hongroise (de 500 000 à 650 000 personnes selon les estimations). Dans ce contexte, le conflit hungaro-slovaque à propos de la centrale hydroélectrique sur le Danube a pris des dimensions tant économiques et écologiques que politiques, difficiles à apprécier. La République tchèque tend à se rapprocher de l'Allemagne alors que la Slovaquie réévalue les perspectives d'une coopération plus étroite avec la Pologne et l'Ukraine. L'objectif d'intégration dans la CEE a été et est toujours le souci dominant des deux pays.

Roumanie

« Nous étions tous communistes », déclare le président Iliescu pendant la campagne de septembre. On ne peut mieux résumer la situation politique roumaine. Il n'empêche : au scrutin présidentiel de septembre-octobre, l'opposition libérale menée par Emil Constantinescu obtient tout de même 39 % des voix contre 61 % pour les « postcommunistes démocratiques » de M. Iliescu. C'est déjà mieux que les 85 % du même Iliescu en 1990. N'ayant pas de majorité au Parlement, celui-ci est contraint de proposer à l'opposition la formation d'un gouvernement de salut national composé de spécialistes, parmi lesquels Nicolae Vacaroiu, économiste-expert, qui est devenu Premier ministre. Au programme : poursuite de la réforme économique et démocratique, et freinage de la récession galopante.