Édition

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Après la crise provoquée l'an dernier par la récession mondiale de 1990-1991 et la guerre du Golfe, les éditeurs ont renoncé à baser leur stratégie sur une hypothétique reprise. 1992 a été pour eux l'année de l'« adaptation », à un niveau et à des habitudes de consommation plus mesurés.

Avec des ventes au détail en progression de 2 % à 5 % en francs courants selon les circuits entre janvier et octobre, d'après les données du magazine professionnel Livres Hebdo, 1992 devait se terminer sur une croissance nulle ou négative en volume. Le recul apparaît plus marqué pour les secteurs scolaire. Droit-économie-gestion, dictionnaires et encyclopédies, et surtout les sciences humaines et les beaux livres. Les ventes de la littérature générale restent stables, alors que les ouvrages pratiques et les livres au format de poche, qui bénéficient de leur prix plus modéré, sont plus favorisés, tout comme le secteur jeunesse, qui enregistre encore de bons résultats, même s'il ne progresse plus au rythme très soutenu des dernières années.

Nouveautés

Après plusieurs années de forte hausse, la production de nouveautés et de nouvelles éditions s'est stabilisée, se situant en 1992 à 24 129 titres, contre 24 041 en 1991, où elle avait encore progressé de 13,7 % (Données Livres Hebdo, Électre Biblio.). Les nouveautés en sciences sociales se sont encore multipliées malgré les difficultés de ce marché, mais les éditeurs ont notablement réduit la production dans certains secteurs comme les sciences pures, la poésie et la bande dessinée. 1992 a été marquée dans l'édition par de fortes réductions d'effectifs, des restructurations dans les grands groupes, et la faillite ou le rachat de très nombreuses petites maisons.

Groupes

Le mouvement de concentration, qui a particulièrement touché l'édition au cours des années 1980, se poursuit ainsi, même si les groupes n'ont pu encore prouver une meilleure viabilité que les maisons moyennes comme Gallimard, Flammarion, le Seuil ou Albin Michel, qui ont jusqu'à présent mieux résisté à la crise. A la fin de l'année, 33 licenciements au Livre de Paris ont porté à 230 en dix-huit mois le nombre de suppressions de postes dans cette filiale de vente directe d'Hachette. Le premier groupe français de communication ayant par ailleurs annoncé sa fusion avec Matra, autre société contrôlée par Jean-Luc Lagardère, 1993 devrait voir apparaître Hachette Livre, filiale d'édition du nouveau groupe fusionné, réalisant un chiffre d'affaires annuel de sept milliards de francs. Parallèlement, le Groupe de la Cité, qui affiche un chiffre d'affaires du même ordre, est engagé dans un important mouvement de regroupement de ses structures de distribution du livre. Il a aussi procédé à des dizaines de licenciements et de suppressions de postes aux Presses de la Cité, chez Bordas, aux Dictionnaires Le Robert, chez Nathan et au Groupe de la Cité international. D'autres licenciements et suppressions de postes ont également été notés dans de très nombreuses sociétés d'édition de toutes tailles, notamment chez Masson-Belfond, Glénat, Vuibert et aux éditions La Découverte. Symptomatiquement, c'est précisément en 1992 qu'a été créée une cellule édition au sein de l'ANPE.

Faillites, rachats et fusions ont jalonné l'année. Le groupe Magnard s'est adjoint Vuibert. Le Lombard a été rattaché à Dargaud, qui a acquis les éditions Blake et Mortimer. Bernard Barrault a vendu sa société à Flammarion. Arnette a repris Medsi, Lamarre a acquis Doin, Adam Biro a été racheté par Adès (groupe Musidisc), Messidor par Scandédition, Ramsay par Michel Lafon, EPA par Denis Jacob et Editeuris, Delachaux et Niestlé par la Camif. First a également été repris, tandis que Lierre et Coudrier était déclaré en cessation de paiement, et les Éditions ouvrières, placées sous administration judiciaire. Parmi les diffuseurs, Stendhal a été racheté par Delpha, et EA-Diff. a déposé son bilan.

Distribution

L'édition a aussi eu à souffrir de l'échec relatif de la réforme du transport du livre. La nouvelle plate-forme Servilivre, constituée à la fin du printemps à l'initiative des éditeurs et des libraires qui souhaitaient améliorer les délais de livraison et en diminuer les coûts, n'a pas donné jusqu'à présent les résultats escomptés.

Fabrice Piault
Journaliste à Livres Hebdo