Le Japon semble ainsi s'orienter vers une diplomatie discrète mais indépendante grâce à sa puissance économique et financière face à un monde en difficulté, et notamment au monde socialiste. C'est ainsi que M. Mikhaïl Gorbatchev s'est rendu à Tokyo au mois d'avril pour proposer à la Diète japonaise l'idée d'un système de sécurité régionale en Asie et dans le Pacifique, mais aussi et surtout pour solliciter une aide économique dont l'URSS a le plus grand besoin. En retour, le Japon espérait obtenir la rétrocession des îles Kouriles du Sud, occupées par les troupes soviétiques depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Le but de Tokyo est d'étendre ainsi sa zone de pêche dans le Pacifique et de préparer des revendications ultérieures sur les Kouriles du Nord. Cette volonté se heurte toutefois aux intérêts des flottes soviétiques, qui ont besoin de cette voie de pénétration dans le Pacifique.

Les entretiens entre MM. Mikhaïl Gorbatchev et Toshiki Kaifu n'ont permis aucun progrès sur le contentieux territorial, mais il faut signaler tout de même que les milieux d'affaires de la Province (russe) d'Extrême-Orient, dont le chef-lieu est Vladivostok, entendent faire de cette région une zone économique ouverte aux investissements capitalistes, et notamment japonais. Une sorte de coopération économique régionale est ainsi en voie de formation sous l'influence prépondérante du Japon ; elle comprendra également la Chine et les deux Corées.

La situation des États insulaires du Pacifique, grands ou petits, n'est guère brillante. En Nouvelle-Zélande, la politique sociale des conservateurs, revenus au pouvoir en 1990, se heurte à une forte opposition. Même si la rigueur commence à porter ses fruits, la crise économique continue à sévir, comme en Australie, où le nouveau ministre de l'Économie a annoncé au mois d'août une reprise volontairement lente.

En Polynésie française, les élections territoriales du mois de mars ont permis le retour de Gaston Flosse à la tête du gouvernement, en remplacement d'Alexandre Léontieff, devenu minoritaire, mais, en juillet, les violentes manifestations qui ont éclaté à Papeete ont déstabilisé quelque peu la présidence. En Nouvelle-Calédonie, l'application des accords de Matignon suscite quelques inquiétudes. L'avenir reste également incertain dans des pays aussi divers que le Vanuatu, où le Premier ministre Walter Lini, au pouvoir depuis 1979, a été renversé par le Parlement en septembre, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, où l'armée est intervenue en avril dans l'île de Bougainville contre les rebelles de l'Armée révolutionnaire (BRA), ou les Philippines, qui ont connu une nouvelle vague de violence au début de l'année et au commencement de l'automne, ainsi qu'une crise politique en septembre, due au désaccord entre la présidente Cory Aquino et le Sénat de Manille sur le maintien des bases américaines, sans oublier, en juin, le réveil du volcan Pinatubo, qui a fait de nombreuses victimes et quelque 300 000 sinistrés.

Malgré cela, et en dépit des troubles ethniques et de l'agitation sociale, qui perdurent de manière endémique dans les petits archipels, la zone du Pacifique jouit d'une certaine détente, sinon d'une détente certaine.

Jean-Pierre Gomane