Journal de l'année Édition 1992 1992Éd. 1992

Le point sur...

Europe orientale

Même si les communistes ont perdu le pouvoir dans un pays de plus, la Bulgarie, et s'ils ont été contraints de le partager avec l'opposition dans un autre, l'Albanie, la libéralisation est restée bien timide en Europe orientale, et notamment dans l'ancienne Union soviétique, qui s'est disloquée depuis l'échec du putsch conservateur du 19 août.

Les communistes gouvernaient encore la Bulgarie après les élections libres du 10 juin 1990. Le succès de l'Union des forces démocratiques (UFD) aux législatives du 13 octobre 1991 a donc surpris. Ce jour-là, le rassemblement de l'opposition a obtenu 34,38 % des voix, le Parti socialiste (ex-communiste), 33,11 %, et le parti de la minorité turque, ou Mouvement pour les droits et libertés (MLD), 7,56 %. Étant donné sa courte victoire, l'UFD devra s'allier au MLD pour gouverner. M. Felip Dimitrov, le jeune avocat qui préside l'UFD, devrait devenir Premier ministre.

En Albanie, plusieurs vagues d'émigration sauvage ont gravement ébranlé le dernier régime stalinien d'Europe : après celle de juillet 1990, où 4 500 personnes avaient pu partir, 10 000 habitants de souche grecque ont rejoint la Grèce en janvier 1991. Le 20 février, à Tirana, des dizaines de milliers de manifestants ont renversé la statue d'Enver Hodja, le fondateur du régime communiste. Début mars, 20 000 Albanais se sont rués sur des bateaux pour se rendre en Italie ; mais, dès le 10, 2 000 d'entre eux ont dû revenir après avoir reçu un mauvais accueil à Brindisi. La victoire du Parti du travail (communiste) aux élections législatives des 31 mars et 7 avril, où il a remporté 168 des 250 sièges du parlement grâce aux votes des campagnes, contre 75 aux opposants du Parti démocratique, a découragé la population. Après trois semaines de grève générale, un nouveau Premier ministre, M. Ylli Bufi, a été nommé le 5 juin pour former un gouvernement de coalition avec l'opposition. Mais, du 7 au 10 août, 20 000 Albanais ont encore débarqué sur la côte des Pouilles, à Bari, avant d'être tous rapatriés.

Depuis le succès remporté par les anciens communistes aux élections législatives et présidentielles du 20 mai 1990, la Roumanie vit sous un régime très autoritaire. Comme ils l'avaient fait en juin 1990, les mineurs de la vallée du Jiu ont envahi Bucarest le 25 septembre, cette fois pour manifester contre la politique de rigueur des autorités. Après trois jours de violences au cours desquels cinq personnes ont trouvé la mort, le président Ion Iliescu a accepté la démission de M. Petre Roman, qui était Premier ministre depuis décembre 1989. À la suite de longues tractations, dues à une sourde lutte pour le pouvoir menée entre le clan de M. Roman et celui du chef de l'État, un nouveau gouvernement a été formé le 15 octobre. Dirigé par M. Theodor Stolojan, un député non inscrit, il comprend de nombreux membres du Front de salut national, toujours contrôlé par d'anciens communistes, et quelques représentants du parti libéral, seule formation de l'opposition ayant accepté d'y participer.

Les difficultés de la transition

Dans trois autres pays d'Europe orientale, où les communistes ont perdu le pouvoir en 1989 ou en 1990, le pluripartisme se heurte à de nombreux obstacles : ainsi, en Hongrie, moins du quart des électeurs ont voté lors des élections partielles de mars et d'avril.

En Tchécoslovaquie, la peur, composante essentielle du régime communiste, est toujours présente, l'opposition entre Tchèques et Slovaques perdure, et l'extrême droite s'affirme. En outre, les vainqueurs des élections législatives de juin 1990 – le Forum civique tchèque et le Public contre la violence en Slovaquie – se sont désagrégés en avril. Le premier mouvement s'est divisé entre une aile gauche assez faible – le Mouvement civique, proche de M. Vaclav Havel – et une aile droite ultralibérale. Cette dernière – le Parti démocratique civique – est de plus en plus influente ; elle est dirigée par M. Vaclav Klaus, ministre des Finances.