De même, les syndicats ont cherché à développer et à enrichir la négociation, qui se portait bien, en dépit d'un certain attentisme, face à une conjoncture incertaine. Les accords se sont multipliés, en particulier au niveau des entreprises, et portaient surtout sur les salaires (les négociations de branches sur les bas salaires, décidées en 1990, et qui doivent aboutir d'ici à la fin de 1992, ont été bien avancées, mais celles sur les grilles de classification et les déroulements de carrière, beaucoup moins), mais concernaient également le temps de travail, la formation et la gestion prévisionnelle pour l'emploi. Au niveau interprofessionnel, la négociation sur la formation professionnelle commencée en février s'est achevée le 3 juillet sur un accord. Le texte a été repris dans un projet de loi qui a réformé la loi de 1971. Depuis le 23 septembre, les partenaires sociaux se sont rencontrés pour trouver les moyens de pallier le déficit croissant de l'UNEDIC à la suite de l'aggravation du chômage. À cette occasion, le patronat s'en est pris aux « faux chômeurs » (les salariés intermittents du spectacle). De même, la négociation sur l'apprentissage s'est ouverte le 31 octobre. Enfin, le 25 octobre, l'État et les partenaires sociaux ont signé un accord en vue de maîtriser les dépenses de santé.

Des mesures pour l'emploi

En revanche, dans la fonction publique, la négociation s'est révélée plus difficile étant donné que la politique contractuelle était en panne depuis avril 1990, mais le gouvernement a tenté de renouer le dialogue avec les syndicats et un compromis a été finalement trouvé le 22 octobre. Les fonctionnaires ont obtenu une hausse générale de leurs rémunérations de 6,5 % d'ici au 1er février 1993.

Dans ce climat social pesant, le gouvernement, toujours accroché à sa politique de maintien des grands équilibres et de désinflation compétitive, mais limité dans sa marge de manoeuvre par le ralentissement économique, a demandé une mobilisation générale des entreprises. Le ministre du Travail, Mme Martine Aubry, n'a pas hésité à critiquer certains mauvais plans sociaux (trop de préretraites ou de chèques de départ). Dans le même temps, les mesures en faveur de l'emploi se sont multipliées : développement du chômage partiel, revalorisation du SMIC, plan emploi privilégiant l'accès au travail au détriment des mesures d'assistance et lutte contre le travail clandestin. Parallèlement, un plan en faveur des petites et moyennes entreprises a été annoncé.

Dominique Colson

Budget

Dans un contexte de croissance ralentie et donc de moindres rentrées fiscales, MM. Bérégovoy et Charasse, en présentant un budget 1992 pour « la compétitivité et l'emploi » n'ont pas voulu céder aux pressions en faveur de la relance et ont préféré maintenir le cap de la rigueur en freinant les dépenses pour éviter un dérapage du déficit.

À la différence des années précédentes, les dépenses stagnent pratiquement, puisqu'elles ne progressent que de 3,1 %, soit à peine plus que l'inflation prévue (2,8 %). Surtout, elles s'accompagnent pour la première fois d'une suppression globale de 2 732 emplois. Compte tenu de certaines dépenses incompressibles (traitement des fonctionnaires, charge de la dette), la marge de manœuvre est faible et les dépenses supplémentaires sont, dans leur intégralité, accordées à cinq grandes priorités qui relèvent, pour la plupart, de choix antérieurs : éducation et formation (+ 5,9 % et 5 700 créations d'emplois), industrie et recherche (+ 5,9 %, et, pour la recherche industrielle, + 13 %), solidarité (+ 5,9 milliards de F, en particulier pour le RMI), justice (+ 4,8 % et 477 créations d'emplois) et Aide publique au développement (+ 2,2 milliards de F). En dehors de quelques autres traitements préférentiels (culture, politique de la ville, jeunesse et sports, sauvegarde de l'environnement, logement social), tous les autres postes font l'objet d'économies et de suppressions d'effectifs. Les objectifs déclarés sont « le renforcement de la cohésion et de l'appareil productif à l'approche du grand marché européen et l'affirmation de la place de la France dans le monde ».

Des transferts entre contribuables

Les recettes n'augmenteront que de 2,6 %, soit plus faiblement que les dépenses, pour atteindre 1 240,82 milliards de F. Si, après cinq à six ans de baisse ininterrompue, la relance par la réduction des impôts est exclue, il n'est pas question, en revanche, et malgré les contraintes budgétaires, d'aggravation globale de la pression fiscale, mais plutôt de transferts entre contribuables. Ainsi, pour renforcer le tissu des PME, des allégements fiscaux leur sont accordés : baisse de l'impôt sur les bénéfices distribués de 42 à 34 % (soit, dorénavant, le même taux que pour les bénéfices non distribués) ; crédit d'impôt lors d'une augmentation de capital ; uniformisation à 18 % des impôts sur les plus-values autres que financières ; réduction des droits de mutation... En compensation, l'impôt sur les plus-values financières est passé de 25 à 34 % le 1er juillet. Les particuliers, quant à eux, ne sont pas concernés, hormis par quelques mesures en faveur du logement neuf locatif.