Dernier facteur positif expliquant les prouesses de l'économie nippone : en matière énergétique, la politique judicieuse de réduction de la dépendance à l'égard du pétrole. La remarquable résistance de l'économie à l'augmentation du prix du baril de brut entraînée par l'invasion du Koweït reflète les succès de la politique poursuivie depuis une quinzaine d'années par les autorités japonaises : le pétrole ne représente plus que 58 % de la consommation en énergie contre 77 % en 1973, année de la première crise pétrolière.

Le premier créancier mondial

Malgré les ajustements, durement ressentis par certains, qui ont commencé à intervenir sur les marchés financiers, la poursuite de l'expansion de l'économie « réelle » devrait permettre au Japon de renforcer encore sa position de puissance économique mondiale, notamment dans le domaine financier. La montée en puissance financière du Japon, qui s'explique par le haut niveau de compétitivité de son industrie et par les excédents commerciaux qui en résultent, s'est manifestée au cours des dernières années par une forte augmentation des sorties de capitaux. Alors que les États-Unis étaient le premier créancier du monde au début des années 1980, à la fin de cette décennie, ils étaient devenus le principal débiteur. Le Japon a pris leur place de premier créancier mondial.

L'accroissement des investissements japonais directs à partir de 1986, en raison de la vive appréciation du yen, et la concentration des actifs dans les pays de l'OCDE ont été les caractéristiques de l'expansion financière nippone de ces dernières années. Depuis 1986, le relâchement de la politique monétaire, nécessaire pour lutter contre le caractère déflationniste de l'appréciation du yen, a d'autre part entraîné une nette valorisation des actifs financiers et immobiliers. Le loyer de l'argent étant devenu plus élevé et les sources spéculatives s'étant taries (notamment la Bourse), on notait en fin d'année un « recroquevillement » financier du Japon. Les sorties de capitaux japonais ont enregistré un sérieux coup de frein : de 192 milliards de dollars en 1989, elles devaient tomber aux alentours de 100 milliards au cours de l'année qui vient de s'achever. Cette contraction devrait se faire sentir notamment sur les placements financiers comme les bons du Trésor américains. En revanche, le flux des investissements industriels devrait se maintenir.

Dans le domaine des relations du Japon avec l'extérieur, deux développements ont marqué l'année 1990 : d'une part, la conclusion en juin des délicates négociations américano-nippones sur les « obstacles structurels » ; d'autre part, une évolution dans l'orientation de l'aide japonaise au tiers-monde dont une conception plus politique a prévalu.

Sur le premier point, les Américains, s'apercevant que ni les négociations commerciales ni l'appréciation du yen n'avaient d'impact sur un déficit commercial qui allait au contraire en grandissant, ont cherché à remédier aux causes dites structurelles du déséquilibre. Les échanges bilatéraux sont ainsi devenus le thème d'une approche globale. Les Japonais ont certes dû faire des concessions (notamment en ce qui concerne les travaux publics et le système de distribution), mais ils ont aussi trouvé dans cette pression américaine un instrument commode pour faire évoluer des dossiers qui s'avéraient bloqués par les rapports de force internes. (Ainsi, il est clair qu'un réaménagement des règles d'implantation des grandes surfaces bénéficiera au premier chef aux grands magasins japonais trop contents que ce soient les Américains qui aient contraint leur gouvernement à faire fléchir les petits commerçants...).

En ce qui concerne l'aide au développement, le riche Japon de cette fin de décennie est devenu le premier bailleur de fonds du tiers-monde en volume, mais non en pourcentage, par rapport au PNB, ravissant cette place aux États-Unis avec un montant de près de 10 milliards de dollars en 1989 (soit une augmentation de 5,6 % en un an). Malgré un certain redéploiement en direction de l'Afrique, l'aide bilatérale nippone reste concentrée sur l'Asie (2/3 du total).