Pour sa part, la CEE, qui détient 10 % du marché mondial, talonne les États-Unis dans le domaine des exportations de céréales, de produits laitiers, de sucre, mais aussi de maïs et de graines oléagineuses. Cette concurrence est évidemment jugée insupportable outre-Atlantique. Sous la pression − qui est également exercée par d'autres pays exportateurs −, la Communauté européenne s'est alors engagée à réduire de 30 % jusqu'en 1996 le soutien global qu'elle apporte à son agriculture (base 100 en 1986).

Cette remise en cause de sa politique agricole devrait conduire la CEE à ne plus subventionner les productions, mais plutôt à aider les agriculteurs. À ce titre, certains produits pourraient être volontairement surpayés pour tenir compte de l'entretien des paysages, de la protection des espaces naturels ou de la mise en valeur de terres fragiles − toutes sortes de tâches que le « paysan » est à même de remplir mieux que quiconque −, ou de certaines initiatives propres à maintenir l'activité de l'agriculteur tout en la prolongeant (dans le domaine du tourisme, par exemple).

Pour que la France soit à la hauteur de cette ambition, il est urgent qu'une véritable politique rurale vienne maintenant se substituer à la traditionnelle politique agricole.

Gilbert Rullière
Directeur de recherches au CNRS, spécialisé dans l'économie agricole, Gilbert Rullière enseigne la gestion et l'économie du financement des entreprises à l'université de Lyon-I.