Météo : l'Automne

De l'équinoxe à la fin du mois de septembre, aucun événement particulier n'a marqué l'actualité météorologique. Du 22 au 26, le passage d'une perturbation évoluant dans un flux de sud et la présence en altitude d'une goutte froide circulant du NNO au SSE sont à l'origine de pluies orageuses localement abondantes. Du 27 au 30, le champ de pression sur l'Europe occidentale et méditerranéenne et le renforcement d'un anticyclone centré sur les îles Britanniques expliquent la baisse sensible des températures (les flux dans les basses couches s'orientent au nord) ainsi que la faiblesse ou l'absence de pluies. Quoi qu'il en soit, la sécheresse persiste sur la majeure partie du territoire et notamment dans l'Ouest : les cumuls pluviométriques mensuels calculés pour les stations de Dinard, Angers et Lann-Bihoué sont, avec 11, 9,8 et 6,7 mm respectivement, les plus faibles depuis plus de 30 ans.

Le bel été indien de la Saint-Luc

Octobre est un mois chaud et sec. Les températures moyennes doivent leurs valeurs inhabituelles à la canicule automnale qui s'est manifestée pendant la deuxième quinzaine dans le Nord, le Nord-Est, l'Ouest, le Sud-Ouest et le Centre-Est. L'été indien 1989, celui de la Saint-Luc, est celui de tous les records ; parmi les températures maximales élevées, on peut citer les chiffres suivants : 29,8 °C à Dax le 21, 22,5 °C à Lille-Lesquin, 23,4 °C à Beauvais, 27,5 C à Châteauroux le 22, 12 °C au mont Aigoual, 22,8 °C à Belfort, 24 °C à Lyon-Satolas le 26 ; et, parmi les températures moyennes quotidiennes : 17,8 °C à Paris-Montsouris le 24, 17,5 °C à Lyon-Bron le 30. Les précipitations sont quasi normales en Corse et dans le Nord-Est et très déficitaires dans le reste du territoire. Précisons qu'octobre est le sixième mois consécutif à pluviométrie déficitaire. Les pluies les plus remarquables sont le fait des perturbations plus ou moins actives qui ont traversé le pays du 6 au 11, du 18 au 21 et du 28 au 31 : 27 mm à Millau ou 20 mm en 3 heures à Saint-Yrieix le 28. Au 31 octobre, la majeure partie du pays présente un bilan hydrique des plus médiocres. Le rapport R/RU de la réserve disponible à la réserve utile n'est supérieur à 50 % que dans les régions suivantes : le Finistère occidental, les secteurs de Cherbourg, Colmar et Montpellier, le littoral du Pas-de-Calais et le Doubs. La sécheresse qui affecte surtout les régions situées à l'ouest de la ligne Caen-Nice est sans doute – compte tenu de ses multiples effets sur l'élevage, la pisciculture, le remplissage des lacs de retenue, le fonctionnement des cours d'eau (dans la région Centre, plus de 300 km de rivières, ruisseaux ou canaux sont à sec) – la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale. D'après le ministère de l'Agriculture, les pertes cumulées s'élevaient à 10 milliards de F le 15 octobre, date à laquelle 22 départements ont été déclarés sinistrés.

Novembre est caractérisé par l'alternance de périodes douces, pluvieuses et venteuses et de périodes fraîches ou froides et sèches ; seul le Sud-Ouest a bénéficié d'une étonnante douceur tout au long du mois. Les contrastes thermiques sont attestés par les quelques records suivants : – 8,4 °C le 16 à Apt-Saint-Christol, – 10,9 °C à Colmar, – 4,1 °C à Pontivy le 26, – 9,8 °C à Nevers le 27... ou, pour les températures maximales : 20,7 °C à Brest, 19,5 °C à Lorient le 13, 19,1 °C à Auxerre le 19. Les précipitations, globalement déficitaires, sont inégalement réparties dans le temps et dans l'espace. Si les abats abondants et intenses observés ici et là (71 mm à Ambérieu en 14 heures le 3, 270 mm à Villefort du 20 au 22...) n'ont guère atténué le déficit en eau des sols, ils ont provoqué des inondations dans le Roussillon le 18, moins graves néanmoins que celles qui, cinq jours plus tôt, avaient dévasté l'Andalousie. Ailleurs dans le monde, le typhon Gay a balayé le golfe de Thaïlande le 6 (250 marins portés disparus) ; le 15, Huntsville (Alabama) est ravagée par une tornade meurtrière (19 morts, 450 blessés).

Dans les stations, les canons font la neige

Décembre est bien le mois de transition entre l'automne et l'hiver. Du 1er au 10, les conditions anticycloniques et les types de temps qui leur sont associés prévalent sur l'ensemble de la France. Les vents de secteur est sont faibles, les nuages bas et les brouillards souvent givrants réduisent l'ensoleillement dans les plaines et les vallées. Les températures minimales varient entre 0 et – 10 °C dans le Nord, le Nord-Est et le Centre-Est. La pollution atmosphérique atteint ou dépasse le seuil d'alerte à Paris, Rouen et Lyon. Seules la façade atlantique et les régions situées au sud de la ligne Bordeaux-Carcassonne-Nîmes-Castellane jouissent de conditions météorologiques agréables : ensoleillement satisfaisant, températures positives supérieures aux normales saisonnières et pluies qui réduisent quelque peu la sécheresse des sols. Du 7 au 10 décembre, une des plus fortes tempêtes jamais enregistrées dans le golfe du Saint-Laurent provoque le naufrage de plusieurs navires et la mort de 48 marins. À partir du 11 et jusqu'au solstice d'hiver, le pays, traversé par de nombreuses perturbations actives circulant dans un flux d'ouest ou de sud-ouest, connaît un épisode doux, pluvieux et venteux. Les températures atteignent en effet des valeurs records : 20,3 °C à Colmar le 16, 14,5 °C à Chartres le 21 ; les précipitations sont abondantes et les vents forts sont fréquents. Le 15, une dépression centrée sur les Açores se déplace rapidement vers l'Irlande ; elle entraîne dans son sillage une tempête qui ravage les littoraux depuis le sud-ouest de la péninsule luso-ibérique jusqu'à l'Écosse. Cette violente tempête (20 morts) occasionne des dégâts matériels importants. Au 21 décembre, la sécheresse perdure, et l'enneigement dans les stations de sports d'hiver est très faible, voire nul. Ainsi l'automne 89 restera-t-il dans les mémoires comme l'automne de tous les contrastes.

Philippe C. Chamard