C'est pourquoi des ressources nouvelles ont dû être imaginées, le principe étant posé que celles-ci ne devraient pas cependant se traduire par une augmentation de la pression fiscale globale, qui se maintient dans la loi de finances initiale, ainsi, compte tenu des 36 milliards de recettes nouvelles, à 24,3 % du produit intérieur brut comme en 1981.

Le programme du parti socialiste prévoyait de longue date l'institution d'un impôt sur le capital en France. Une telle réforme se heurtait à de nombreuses difficultés, tant d'ordre technique, que d'ordre politique : pour les surmonter, le gouvernement choisit une solution simple et raisonnable. Cet impôt ne frappe que les fortunes supérieures à 3 millions de F ; il est déclaratif ; il comporte des taux progressifs très modérés et ne frappe l'outil de travail qu'au-delà d'un abattement spécifique de 2 millions de F, assorti d'une déductibilité de l'impôt des fonds propres réinvestis dans l'entreprise. La recette attendue de ce nouvel impôt est de l'ordre de 5 milliards de F.

Le plafonnement du quotient familial doit dégager 1 milliard et demi de F, tandis qu'une majoration exceptionnelle de 10 % sur la partie de l'impôt sur le revenu supérieure à 15 000 F rapportera 6 milliards, destinés à financer une partie de l'indemnisation des travailleurs sans emploi.

Au titre de la moralisation et de la solidarité également, les déductions forfaitaires applicables aux titulaires de revenus fonciers sont réduites, tandis que la lutte contre la fraude sera intensifiée comme en ont rapidement et spectaculairement témoigné un certain nombre d'affaires et de poursuites engagées par la Direction générale des impôts et par les douanes.

Des allégements fiscaux ont été consentis en faveur des contribuables les plus modestes, entraînant une perte de recette totale de 16 milliards et demi, compensée par l'appel à diverses recettes de poche : taxe sur les produits pétroliers, taxation des frais généraux, prélèvement sur les banques, etc.

Reprise espérée

Ce tour de vis fiscal a permis effectivement de contenir le déficit dans la loi de finances initiale. Toutefois, au lendemain de la dévaluation d'octobre 1981, réalisée par le biais d'un réajustement des parités franc-mark au sein du Système monétaire européen, le ministre de l'Économie, Jacques Delors, est revenu à la charge pour invoquer la rigueur budgétaire à l'appui de la défense du franc : il lui a été concédé une réduction suspensive du déficit d'une quinzaine de milliards de F, qui ne seraient finalement dépensés que si la conjoncture économique l'exigeait.

Or, personne ne se faisait guère d'illusion à ce sujet : l'activité économique internationale demeurant passablement atone et la reprise tardant à se manifester dans les principaux pays industrialisés, aux États-Unis et en Allemagne fédérale notamment, les prévisions sur lesquelles était fondé le budget de la France pour 1982 ne pouvaient manquer d'apparaître optimistes, même si elles s'étaient inspirées initialement d'une analyse qui ne manquait pas de logique.

Ainsi, pour réaliser d'aussi près que possible l'objectif qu'il s'était fixé d'une croissance de l'ordre de 3 % en 1982, le gouvernement ne devait-il négliger aucun des moyens à sa disposition.

Faisant suite à une année de croissance quasi nulle, 1982 devrait enregistrer à la fois une certaine reprise à l'étranger et les effets positifs des mesures de relance de la consommation populaire prises par le gouvernement Mauroy après les victoires électorales de la gauche.

Le pouvoir d'achat des ménages devrait croître en 1982 à un rythme comparable à celui de 1981 (+ 2,2 à 2,5 % contre 0,4 % seulement en 1980), compte tenu surtout du relèvement des prestations sociales. Ainsi, la consommation devrait-elle s'en trouver stimulée, grâce notamment à l'important effort de redistribution en faveur des catégories modestes par le biais des transferts sociaux et de la fiscalité.

Dette publique

En outre, après plusieurs années de langueur, la reprise des investissements devrait être, en bonne logique, au rendez-vous de 1982, du fait de la conjoncture de deux mouvements positifs : l'essor des investissements publics, d'une part, l'incitation à investir que les chefs d'entreprise, d'autre part, devraient éprouver, du fait de la reprise de la consommation. Le taux de croissance retenu pour l'ensemble de l'investissement est donc de 2,3 %, contre un recul de 3,2 % en 1981 et une progression de 2 % en 1980.