Le tout-à-l'égout n'est pas une solution pour les villages et les petits bourgs. La quantité d'eau effectivement utilisée par habitant pour les besoins personnels est largement inférieure à 100 l/jour. En l'absence d'usines, qui sont les plus gros utilisateurs d'eau en agglomération, les eaux usées qui circulent dans les égouts sont en quantité insuffisante pour entraîner les déchets solides. Les égouts sont souvent bouchés et débordent. C'est ce qui se passe, par exemple, au Kenya.

Sauf pour les centres-villes et les immeubles à étages où le tout-à-l'égout et l'eau courante sont les seules solutions raisonnables, il faudra donc avoir recours, pour les quartiers périphériques des villes et les campagnes, aux techniques simples, voire même aux technologies dites appropriées, mettant en valeur l'ingéniosité des habitants et les ressources locales.

Quelques pays ont déjà pris les devants : au Bangladesh, on creuse des puits à un rythme tel que chaque famille aura en 1985 de l'eau à moins de 200 mètres de son logement. En Inde, la moitié des bidonvilles de Calcutta sont déjà équipés de latrines publiques.

Unité

Dans les zones rurales, pour l'adduction d'eau à moindre frais, certains pays du tiers monde utilisent les canalisations en bambou ou les qanats, galeries légèrement inclinées captant les eaux souterraines. Pour obtenir de l'eau de boisson pure, avec des moyens financiers restreints, on la filtre dans des sortes de colonnes formées de trois ou quatre récipients superposés. L'eau descend par gravité à travers du sable, de la fibre de noix de coco, de la balle de riz grillée, etc.

En Europe même, il est probable que, pour des zones rurales où la densité de population est assez faible (Massif central, Massif armoricain) et où la nappe phréatique est facilement accessible, il est plus rentable de forer un puits que d'étendre le réseau de distribution d'eau courante. Le BRGM, en France, a calculé qu'au taux de 300 à 500 F le mètre linéaire de forage, le coût total d'une installation (pompe comprise) pour un particulier agriculteur serait de 50 000 à 60 000 F.

Dans les pays à climat tempéré, les précipitations atmosphériques (neige et pluie) sont très largement suffisantes pour couvrir les besoins. Pour la France, par exemple, le réapprovisionnement annuel est de 200 milliards de mètres cubes d'eau pour une consommation annuelle globale de 25 à 30 milliards de mètres cubes. En théorie, les ressources hydriques sont largement excédentaires, mais la pollution risque de fausser les calculs. Pour évaluer le taux de pollution de l'eau, le ministère de l'Environnement et de la qualité de la vie a institué une unité appelée « habitant-équivalent » : c'est la pollution produite par un habitant en 24 heures ; elle équivaut à 57 g de matière oxydable. Par exemple, pour chaque tonne produite, la sidérurgie crée 5 800 habitants-équivalents, l'industrie des cuirs et peaux 3 600 habitants-équivalents.

Rhin

Traversant une des régions les plus industrialisées d'Europe, le Rhin coule sur 1 320 km. Environ 16 % du bassin du fleuve sont urbanisés, environ 10 millions de personnes boivent l'eau du Rhin après épuration, et le fleuve charrie en permanence les déchets de 60 millions de riverains et d'innombrables industries. En 1973, la moitié seulement des eaux usées étaient traitées avant d'être rejetées dans le Rhin.

Durant la décennie 1910, aux Pays-Bas, on péchait 2 000 t de saumons par an ; en 1970, on n'en a pas pris un seul. Outre le lit du fleuve, certaines nappes souterraines de la vallée sont polluées par des produits chimiques toxiques dérivés du benzène, que l'on est obligé de pomper à grands frais, et par du chlorure de sodium provenant des usines de traitement des potasses d'Alsace, depuis que l'on ne rejette plus directement dans le Rhin que la moitié des effluents de ces usines (Journal de l'année 1975-76).

Dans le courant des années 70, on s'est efforcé d'abaisser le taux de pollution du Rhin. En 1977, 66 % des riverains allemands et, en 1978, 65 % des riverains suisses étaient raccordés à des réseaux d'égouts avec station d'épuration. Depuis 1976, une convention internationale limite la pollution chimique du fleuve, en interdisant notamment le mercure, le cadmium, l'aldrine et le DDT.