Parallèlement, d'appréciables gains de productivité ont été réalisés puisque les effectifs, eux, n'ont crû que de 1,5 % en moyenne : 260 000 salariés en 1974, 280 000 en 1979. Sur les 50 milliards de F de chiffre d'affaires réalisés par les marchands de canons français, 40 % concernent l'aéronautique, 20 % l'électronique, 16 % les armes classiques (artillerie, blindés, marine) et 6 à 7 % le nucléaire. Le reste — environ 18 % — se partage entre la mécanique, l'automobile et la chimie.

Sans doute la plupart des pays qui fabriquent des armes affichent-ils tous de belles performances, mais il semble que la France a su profiter mieux que d'autres (comme la Grande-Bretagne) de l'envol des nouveaux marchés, grâce à une bonne image de marque technologique et à une réputation d'indépendance politique.

Spécialisation

Ce haut niveau technologique est le fruit d'une spécialisation de la France dans trois domaines où seuls les USA et l'URSS sont également présents : les avions de combat, les missiles haut de gamme et l'électronique professionnelle. L'atout politique et l'atout technologique se renforcent mutuellement, car, chaque fois qu'un pays du tiers monde souhaite se doter d'un matériel ultrasophistiqué tout en s'interdisant de négocier avec Moscou ou Washington, il n'a d'autre recours que d'acheter français, quel que soit le prix. D'où une rente de situation génératrice à la fois d'un courant d'affaires substantiel et de bénéfices importants.

La France n'est pas absente pour autant des marchés plus classiques (artillerie légère, armes de poing), mais c'est avant tout pour satisfaire ses propres besoins, car, comme ce genre de production est à la portée de beaucoup de pays, la concurrence internationale est très vive, de même que les prix ne sont guère rémunérateurs. De plus, il faut compter avec de nouveaux venus, comme le Brésil ou Israël, qui ont les dents d'autant plus longues que, pour des raisons politiques, ils tiennent beaucoup à percer sur ce type de marché.

Grâce à ses Mirage, Dassault est le porte-drapeau de l'industrie française de l'armement. Au cours des cinq dernières années, son chiffre d'affaires militaire a progressé de 85 % et atteint désormais près de 6,5 milliards de F, dont 72 % à l'exportation. Les commandes étrangères ont connu une progression encore plus vertigineuse (+ 180 %) pour dépasser 11 milliards de F en 1979. L'an passé, Dassault a exporté 92 Mirage (36 à la Jordanie, 32 au Pakistan, 24 à l'Iraq), contre 33 seulement en 1978. Lors de la dernière tournée au Moyen-Orient de Valéry Giscard d'Estaing, on a même parlé d'une éventuelle commande de 450 Mirage 2000 (le successeur du Mirage F-I) financée en majeure partie par l'Arabie Saoudite. Si elle se vérifie, voilà 40 milliards de F qui entreront dans l'escarcelle de Dassault au cours des années 80.

Autre champion des armes françaises : la SNIAS. Surtout connue à travers les déboires de Concorde et les succès de l'Airbus, qui sont l'un et l'autre des appareils civils, la société est pourtant très ; engagée dans les équipements militaires, qui représentent environ la moitié de son chiffre d'affaires total. C'est dire que la SNIAS pèse presque autant que Dassault dans le domaine militaire, bien que sa division « avions » (essentiellement des Transall) soit relativement modeste : 700 millions de F seulement de chiffre d'affaires. Ses hélicoptères pèsent un peu plus lourd, mais c'est surtout à sa division « engins tactiques » qu'elle doit son développement, notamment à l'exportation puisque 70 % de sa production est vendue à l'étranger. Principaux chevaux de bataille : le Milan, le Hot, le Roland et l'Exocet.

Sophistication

Si Dassault et la SNIAS sont les plus gros producteurs et exportateurs de matériel militaire, de nombreuses autres entreprises sans compter les arsenaux spécialisés dans l'artillerie et les blindés, contribuent à l'activité « armement » de l'industrie française : SNECMA (moteurs ATAR pour Mirage), Turboméca (moteurs légers pour avions d'entraînement), Manurhin (armes de poing), Brandt (obusiers), Sintra et Crouzet (électronique), Panhard (engins blindés de reconnaissance), etc.