Enfin, à l'unanimité moins 5 voix, une motion était adoptée. D'un ton inhabituellement dur, elle condamnait la politique « des responsables et des technocrates du gouvernement et du patronat ».

CFDT : le recentrage

« Ne tournons pas autour du pot : nous sommes là pour définir ensemble les moyens de surmonter les graves insuffisances du syndicalisme et du mouvement ouvrier face à la crise... »

Dès les premiers mots de son discours du 38e congrès de la CFDT à Brest (du 8 au 12 mai 1979), Edmond Maire, le secrétaire général, en indique l'enjeu : le cap sur le socialisme autogestionnaire ; l'équipe dirigeante entend dégager la stratégie syndicale de toute emprise politique et donner la priorité à l'action syndicale en dehors de toute échéance électorale. « Nous devons apprendre à conjuguer mai 1968 et mars 1978 » devait indiquer Edmond Maire pour résumer l'orientation proposée.

Lancé dès la fin de 1977, ce recentrage suscite des réactions vives mais dispersées : les uns critiquent l'attitude passive de la Confédération à l'égard de l'ouverture sociale du gouvernement ; les autres jugent excessives les critiques portées à rencontre de la CGT et de ses journées nationales d'action ; certains, enfin, mettent en cause le fonctionnement interne de la Confédération. Face à ces nombreuses critiques, l'équipe confédérale pouvait considérer comme un résultat inespéré l'approbation du rapport d'activité par 57 % des mandats (31 % contre et 12 % d'abstentions). Le rapport d'orientation fixant la politique de la centrale pour les trois ans à venir (avec la durée du travail, l'amélioration des systèmes de garantie collective et les bas salaires comme axe d'actions prioritaires) devait bénéficier d'une majorité un peu plus favorable, puisqu'il était adopté par 63,4 % des voix contre 27,2 % et 9,3 % d'abstentions. Toutefois, un camouflet est infligé à la direction confédérale sur la question de la compensation salariale à la réduction de la durée du travail. Le projet confédéral stipulait que « les revendications adaptées comme les formes de la compensation doivent faire l'objet de débats avec les travailleurs et les travailleuses ». Sous l'impulsion de 25 syndicats de la banque, la résolution est amputée de cette phrase, ce qui rendra plus difficile la progression du débat et surtout d'éventuelles négociations nationales sur cette importante question. Contrairement à la position confédérale, la majorité du Congrès entend ne pas soumettre les revendications sociales à la prise en compte des exigences de rentabilité économique.

Parallèlement aux débats d'orientation, la Commission exécutive enregistre quelques modifications à la suite du départ de trois dirigeants : tandis qu'Edmond Maire est réélu avec 75 % des voix, Jacques Chérèque (métallurgie) est nommé secrétaire général adjoint ; Noël Mandray (chimie) et Georges Begot (banques), tous deux réservés à l'égard du recentrage, sont élus dans l'équipe de direction.

CGT : Recherche de l'ouverture

« Il faut nous habituer à écouter des opinions différentes, y compris lorsqu'elles sont présentées dans une forme outrancière et intolérante. »

Cette déclaration de G. Séguy, secrétaire général, résume l'orientation de la majorité des dirigeants cégétistes lors de leur 40e congrès, à Grenoble, du 26 novembre au 2 décembre 1978. Même si les votes ont confirmé les règles d'unanimisme traditionnel à la CGT, les critiques n'ont pas manqué contre la nouvelle ligne confédérale.

Ces critiques viennent de ceux qui pensent que la CGT a toujours été démocratique et qu'il y a mieux à faire qu'à étaler sa diversité : « La dureté de la lutte des classes ne nous permet pas des clubs de discussion », devait, par exemple, déclarer Georges Frischmann (PTT), connu pour ses options communistes. Mais l'opposition vient aussi de ceux qui poussent à une ouverture plus importante, notamment en direction des socialistes. Ainsi, Claude Germon, membre de la commission exécutive et maire socialiste de Massy, devait intervenir pour réclamer davantage de démocratie : ... « il faut permettre à tous les adhérents de s'exprimer par un vote sur tous les rapports... Il faut rassembler tous les salariés, quelles que soient leurs opinions. Pour ce qui est de la direction confédérale, regardons les choses bien en face : il n'y a pas une réelle ouverture ».