Pour les aménageurs régionaux, le problème est complexe : ils se trouvent placés entre, d'un côté, « une pression économique quasi inéluctable » (désengagement minier, fragilité des activités anciennes) et, d'un autre côté, « une revendication sociopolitique majeure, expression de l'inquiétude d'une société locale traditionnellement minière ».

Or, les marges de manœuvre régionales sont faibles : pas de maîtrise de l'évolution économique, pas de pouvoir de maintenir un certain mode de vie. Dans ces conditions, deux options sont envisageables :
– donner la priorité à l'emploi. Par une action principalement quantitative, on essaie de régulariser et d'endiguer les crises en implantant des emplois nouveaux pour compenser les suppressions. Revers de la médaille, la création d'emplois peu qualifiés et leur localisation en fonction de bassins de main-d'œuvre correspondant aux anciennes activités minières figent la société en son état antérieur et maintiennent l'inorganisation du tissu urbain ;
– préparer les conditions du redéveloppement. Il s'agit là d'une politique longue et difficile, dont les effets ne peuvent être escomptés qu'à moyen terme. Elle exige en effet d'effacer tout d'abord « une certaine logique minière d'occupation de l'espace », logique dont on voit la trace dans les terrils, les zones d'effondrement, les carreaux abandonnés, les canaux et voies désaffectés, mais dont on peut suivre aussi l'organisation au sol : habitat linéaire de long des routes, tissu urbain haché par de multiples coupures, centres coupés de leur périphérie.

À la place de tous ces souvenirs plus ou moins vivaces d'un univers révolu, on tenterait de faire triompher une nouvelle logique urbaine : faire évoluer le paysage, réaliser tous les équipements nécessaires, remodeler l'habitat, créer des foyers de redéveloppement, appuyés sur les zones urbaines et qui permettraient de relancer « un marché large et différencié de l'emploi ».

Dans une région où l'explosion urbaine a détruit le type de relations entre bourgs et campagne qui était antérieur à l'industrialisation et où l'urbanisme concerne 86 % de la population, ce vaste programme ne sera pas, c'est certain, facile à réaliser. C'est pourquoi, finalement, la nécessaire conciliation entre les impératifs du développement et les nécessités de la sauvegarde de l'existant apparaît comme un fondement de toute politique régionale.

Picardie

Assurer le plein-emploi

Bien avant l'éclatement de la crise économique, il était évident pour tous les responsables que l'économie régionale devait être en mesure de mieux assurer l'emploi de tous ses habitants.

Longtemps terre d'émigration, la Picardie était aussi vouée à l'emploi d'une main-d'œuvre saisonnière immigrée. C'était notamment le cas pour l'exécution de travaux agricoles dont la mécanisation a progressivement réduit l'ampleur. Actuellement, l'industrie, le bâtiment et les travaux publics utilisent une main-d'œuvre immigrée considérée comme trop importante. Elle pourrait être réduite par une amélioration des conditions de travail et des rémunérations, qui rendrait ces secteurs plus attractifs pour la main-d'œuvre régionale.

En effet, dans le contexte actuel, les membres des assemblées régionales accordent la priorité « à tout ce qui peut être mis en œuvre pour que chaque Picard dispose d'un emploi correspondant à ses capacités. Cette préoccupation est désormais devenue essentielle ».

Il s'agit tout d'abord de promouvoir une politique d'industrialisation rationnelle, fondée sur une active politique de formation. Car, si la région picarde dispose d'un potentiel industriel important, la sous-qualification y demeure excessive : le pourcentage global cadres plus personnel d'exécution qualifié dépasse à peine 60 % pour une moyenne nationale de 68 %.

Cet objectif qualitatif passe aussi par l'adaptation du secteur tertiaire, qui ne réunit que 38,9 % des actifs, contre 44,7 % pour la France entière. Opérations de décentralisation de la toute proche agglomération parisienne, expansion des activités d'ingénierie et de recherche, des services commerciaux et administratifs des entreprises, encouragement au développement de l'appareil hôtelier, tous ces moyens doivent être mis au service de la politique de réhabilitation du tertiaire.