Des problèmes de financement se posent, en l'absence de ratification de la convention, et donc de dégagement de crédits, pour poursuivre l'exécution des grands programmes (lanceur Ariane, laboratoire orbital Spacelab, satellite de navigation maritime Marots).

Accord

Le changement de gouvernement en France appelle de nouvelles discussions et de nouveaux retards. En décembre 1974, les ministres responsables français et allemand parviennent finalement à un accord : ils renonceront à leurs candidats respectifs au poste de directeur général, qui serait attribué au directeur de l'ESRO (Organisation européenne de la recherche spatiale, l'un des anciens organismes européens que la nouvelle ASE doit remplacer). D'autres réunions ont lieu en janvier et en février 1975 ; finalement, tout sera réglé lors de la sixième conférence, le 15 avril.

Selon la convention signée fin mai, l'ASE aura comme directeur général le Britannique Roy Gibson (jusqu'alors à la tête de l'ESRO). Il sera assisté de sept directeurs : les Français André Lebeau (directeur adjoint et responsable des plans et des programmes futurs) et Bernard Deloffre (programme Spacelab) ; les Allemands Walter Luksch (programmes de télécommunications) et Ernst Trendelenburg (programmes scientifiques et météorologiques) ; le Suédois Ove Hammarström (centre technique ESTEC), le Belge George Van Reeth (administration) et l'Italien Giovanni Fromica (centre de contrôle ESOC). Un autre Italien, Massimo Trella, est nommé inspecteur technique.

La France : ouverture sur le monde

Les Français ont obtenu, non sans mal, ce qui paraissait aller de soi : que l'ASE se serve de préférence des lanceurs et des installations des pays membres. Il reste que la France prend à sa charge 64 % du financement du lanceur Ariane et 75 % des frais de fonctionnement du Centre spatial guyanais. C'est lourd !

Le CNES (Centre national d'études spatiales) amorce une nette orientation vers les programmes européens et bilatéraux au détriment des activités uniquement françaises. Le budget pour 1975 est de 965,1 millions de francs au lieu de 925,5 en 1974.

Mais alors que l'augmentation globale n'est que de 4,2 %, celle des sommes attribuées aux programmes européens sera de 37,5 %. En 1975, 45,6 % du budget du CNES est attribué à ces programmes ; compte tenu des frais de fonctionnement de cet organisme, y compris ceux du Centre spatial guyanais, il ne reste que peu de moyens pour financer des programmes nationaux.

Le dernier satellite français doit être lancé en juillet 1975 ; la nouvelle fusée Diamant BP 4 sera alors abandonnée, et le Centre spatial guyanais (autour duquel a poussé une ville moderne de 4 000 hab.) sera fermé pour quatre ans. Le premier tir du lanceur européen Ariane ne devrait pas avoir lieu avant l'été 1979.

Satellites

Le 6 février 1975, pour son coup d'essai, le nouveau Diamant a mis sur une orbite de 805,3 à 1 138,5 km, inclinée de 49,8° sur l'équateur, le satellite géodésique Starlette. Cet engin est muni de réflecteurs qui renverront vers le sol des faisceaux de lasers terrestres. On pourra ainsi se livrer à des mesures très précises des distances séparant des points quelconques de la surface terrestre.

L'étude des déformations de l'orbite du satellite permet de mesurer les marées et, aussi, les oscillations (quelques décimètres d'amplitude) de l'écorce, appelées « marées terrestres ». Ces phénomènes sont importants par leurs effets sur le déplacement des pôles (dans un cercle de 6 m de diamètre), la dérive des continents (de 2 à 15 cm par an), les séismes et le ralentissement du mouvement de rotation de la Terre.

Dès le 5 mars, des savants américains ont commencé à utiliser les services de ce satellite français.

Starlette est une boule de 240 mm de diamètre, pesant 47 kg, et faite essentiellement d'uranium, ce qui n'a pas manqué d'intriguer. Mais il n'est nullement question d'énergie atomique et cet uranium n'est pas radioactif. On souhaitait conférer à l'engin la masse la plus grande pour un diamètre donné ; or, l'uranium est deux fois et demie plus lourd que le fer.