Éducation

La réforme Fontanet n'a pas été examinée

L'élection présidentielle du mois de mai, suite au décès du président Pompidou, n'a pas permis au Parlement d'examiner, comme prévu au cours de sa session de printemps, la réforme de l'enseignement secondaire dite « réforme Fontanet ». Ce projet de loi a soulevé de nombreuses controverses chez les enseignants, les parents d'élèves, les partis politiques et les syndicats. Le projet a été une des préoccupations principales de la vie scolaire pour la période 1973-74. Pour ces raisons, on retrouvera ci-dessous l'analyse de ce texte et les principales indications sur les polémiques qui se sont produites.
Le nouveau ministre de l'Éducation, René Haby, déclare, le 29 mai, que la réforme de son prédécesseur « serait bien sûr poursuivie ». Mais, a-t-il ajouté, elle nécessite une nouvelle étude avant d'être présentée devant le Parlement.

L'agitation dans les lycées, le malaise des professeurs, le désarroi des parents d'élèves ont mis en lumière depuis deux ans la crise de l'institution scolaire.

Le trouble s'est transporté de l'enseignement supérieur à l'enseignement secondaire, le mai 1968 des étudiants a fait place au printemps 1973 des potaches, à la révolte des aînés a succédé le ras-le-bol des cadets. Comme Edgar Faure, qui avait tenté, il y a cinq ans, de porter remède aux faiblesses de l'Université par une ambitieuse loi d'orientation (Journal de l'année 1968-69), Joseph Fontanet, ministre de l'Éducation nationale du dernier gouvernement Messmer, s'efforce, au printemps 1974, de guérir les maux du second degré par une vaste réforme.

Inadaptation

Ces maux, on le sait mieux après les multiples enquêtes, études, analyses consacrées à la question, résultent de l'inadaptation de notre enseignement secondaire à ses tâches nouvelles. Chargée jusqu'à une époque récente de transmettre la culture à un petit nombre de privilégiés, l'école accueille désormais, en raison de la relative démocratisation de l'enseignement, des jeunes gens de plus en plus soucieux de leur avenir professionnel.

Or, elle continue d'avantager les héritiers au détriment des plus nombreux qui, défavorisés déjà par leur origine sociale, sont soit éliminés en cours de scolarité, soit orientés vers les filières les moins formatrices. Ni la justice ni l'efficacité n'y trouvent leur compte.

Ce bilan, Joseph Fontanet l'a dressé au terme d'une longue série de consultations : des sondages d'opinion ont été effectués par l'IFOP et la SOFRES, au cours de l'été 1973, auprès des usagers de l'école (élèves, parents, professeurs, employeurs, etc.) ; des enquêtes sur le terrain ont été menées en octobre dans toutes les académies ; un colloque national a réuni en novembre, à l'initiative du ministre, près de 600 représentants de toutes les organisations intéressées (le Syndicat national de l'enseignement supérieur – SNES – tient, du 2 au 3 mars, en réplique à ce colloque jugé « truqué », des « états généraux » des mouvements politiques et syndicats de gauche).

Innovations

La loi, en son article premier, définissait la fonction de l'enseignement du second degré, qui devait répondre à une double aspiration : « le développement de l'égalité des chances entre tous les élèves » et « la préparation de ces derniers à une insertion harmonieuse dans la vie active, ainsi que l'exercice de leurs responsabilités futures de citoyens ».

Deux innovations témoignent, à la rentrée 1973, de ce désir d'ouverture : introduction de l'information sexuelle, affectation de 10 % de l'horaire annuel à de libres activités éducatives. Mais les dispositions qui auraient dû être votées par le Parlement au printemps voulaient aller plus loin, en modifiant les structures de l'enseignement secondaire.

– Premier cycle. La principale nouveauté est la suppression des filières (type lycée, CEG, classes de transition) au profit d'un tronc commun. Ces trois sections des collèges d'enseignement secondaire (leur création, en 1963, avait eu pour objet d'unifier les formations dans le premier cycle, mais reproduisait en fait les clivages antérieurs) se distinguent notamment par les méthodes pédagogiques et par la qualification des maîtres (professeurs certifiés, professeurs d'enseignement général des collèges, instituteurs).