Sous le contrôle des Nations unies et de la Croix-Rouge, commence, le 19 septembre 1973, un des ponts aériens les plus importants de l'histoire. Le 30 avril 1974, les 92 000 soldats pakistanais internés en Inde sont de retour dans leur pays. À cette date, plus de 100 000 Bengalis (sur 160 000) ont quitté le Pakistan, qui a ouvert ses frontières à 50 000 non-Bengalis (expression pour désigner les Biharis qui avaient choisi leur camp en 1971). Ce qu'Islamabad ne veut pas, ce sont les indigents que Dacca lui propose. On pense que le Pakistan accueillera finalement environ 140 000 Biharis.

Économie

Le Consortium d'aide international accorde cependant de nouveaux crédits à Islamabad, in extremis, au vu de sa réussite économique : hausse du PNB de 5,5 %, excédent de la balance commerciale de 16 millions de francs, de la balance des paiements de 26 millions de francs. Ce résultat est dû à la croissance des exportations (+ 75,5 % en 1973), coton, riz, produits manufacturés, supérieure à celle des importations (+ 46 %).

Le Pakistan, en 1974, continuera à exporter du riz, qui n'a pas souffert des inondations de septembre 1973 (les plus graves de mémoire d'homme). Elles ont dévasté 60 000 kilomètres carrés et provoqué des dégâts estimés à 1,5 milliard de francs. Cette catastrophe a contraint le Pakistan, malgré une production record (8,5 millions de tonnes) à importer 500 000 tonnes de blé.

L'année 1974 s'annonce sous un jour moins favorable que l'année précédente. Pour limiter la hausse des prix et le chômage, aggravé par le renchérissement des matières premières, et réorienter les crédits bancaires vers des secteurs délaissés comme l'agriculture (9 % des crédits, alors qu'elle contribue au PNB pour 45 %), le gouvernement abandonne le libéralisme économique. Les banques sont nationalisées le 1er janvier 1974, ainsi que le commerce maritime, le pétrole, l'huile végétale.

La nouvelle Constitution entre en vigueur sans surprise, le 14 août 1973. Le Premier ministre, Ali Bhutto, 45 ans, demeure en place ; le président, Chaudhri Elahi, 69 ans, également. En septembre, A. Bhutto demande et obtient la prorogation pour six mois de l'état d'urgence (il renouvelle sa demande pour une même durée en mars 1974), « en raison de l'absence de normalisation dans le sous-continent et de la situation à la frontière afghane ».

Agitation

Autant le Premier ministre se révèle habile manœuvrier en politique étrangère, autant dans les affaires intérieures il pèche par excès d'autorité. L'opposition, en août 1973, boycotte l'Assemblée nationale et les assemblées régionales de la province du Nord-Ouest et du Baloutchistan. Elle réclame dans les deux provinces le retour des gouvernements élus, démis par le gouvernement central en février 1973.

Des dizaines de dirigeants et plus d'un millier de sympathisants sont arrêtés. En octobre, le gouverneur du Baloutchistan, Khan Bugti, démissionne. Il rejoint son prédécesseur, Bukhsk Bizenjo, dans le camp des opposants qui, avec le chef du NAP, Wali Khan, ont proclamé à Peshawar, la capitale de la province pathane : « Le temps des négociations est révolu. »

Plusieurs attentats coûtent la vie aux membres des deux groupes. Wali Khan y échappe à quatre reprises. L'ex-maréchal Asghar Khan (Istiqlal) dénonce le « règne de la terreur », la censure de la presse, la torture. Dans les campagnes, à la répression répondent les embuscades tendues par les rebelles baloutches (un millier) et pathans (2 000 environ), appuyés par des résistants occasionnels. Selon eux, les militaires (forts de deux divisions) auraient perdu plus de 2 000 hommes, chiffre sans doute exagéré.

Même si Wali Khan déclare : « les conditions d'un nouveau Bangla Desh sont réunies », il réaffirme son attachement au Pakistan et à un État fédéral comprenant Baloutches et Pathans. Il connaît les revendications des bouillants montagnards et des nomades des deux provinces : c'est essentiellement l'allégement du centralisme d'Islamabad. « Ce que nous voulons, c'est plus d'autonomie. Que ferions-nous de l'indépendance ? » Son second, Khattak Khan, en revanche, a cherché refuge en Afghanistan, où vivent l'autre moitié des Pathans. Il y entraîne, dit-il, 3 000 hommes, prêts à détacher le Pakhtounistan et le Baloutchistan du Pakistan.