Un mois après une conférence fédérale-provinciale sur l'énergie, au cours de laquelle le Québec fait part de sa crainte de voir la crise pétrolière devenir l'occasion pour le gouvernement central d'un nouvel empiétement sur les juridictions des provinces, le gouvernement fédéral dévoile sa politique pétrolière. Le 6 décembre, le ministre de l'Énergie, Donald McDonald, propose que d'ici 1980 le Canada se suffise à lui-même par l'abolition de la ligne Borden (l'Ouest pourra dorénavant écouler ses excédents de pétrole vers l'Est), par l'établissement d'un régime des prix pour stimuler la mise en valeur des gisements pétrolifères, par la création d'une société d'État chargée d'accélérer la prospection et l'exploitation de nouveaux gisements, et enfin par la construction d'un oléoduc allant de l'Est à l'Ouest.

Mais les événements se précipitent :
– 27 décembre 1973 : le ministre McDonald annonce que la taxe à l'exportation passera à 6,50 dollars le baril en février. Les provinces productrices adoptent une position plus dure et exigent l'argent de la surtaxe ;
– 3 janvier 1974 : le ministre des Finances, John Turner, répond à l'Ouest que les paiements de péréquation aux provinces dépendent d'un compromis sur le pétrole ;
– 7 janvier : le gouvernement Trudeau subit une cuisante défaite à la Chambre des communes, sans toutefois être renversé. L'opposition lui conteste le droit d'instituer une surtaxe sur les exportations pétrolières ;
– 11 janvier : la Chambre des communes suspend sa décision, après avoir donné au gouvernement les pouvoirs pour faire face à tout état d'urgence, et l'autorise à établir un office de répartition des approvisionnements d'énergie ;
– 22 janvier : ouverture d'une deuxième conférence fédérale-provinciale sur l'énergie. Ottawa propose un prix unique pour le pétrole jusqu'au 1er mai et une subvention de 360 millions de dollars aux provinces de l'Est ;
– 27 mars : au cours d'une troisième conférence fédérale-provinciale, les gouvernements central et provinciaux s'entendent sur un prix unique du pétrole pour une période de douze à quinze mois. De part et d'autre on se félicite d'avoir signé cet accord historique qui met un terme à la crise.

Québec

Trois faits marquent la vie politique québécoise :
– les révélations du Parti québécois et des témoins à la Commission d'enquête sur le crime organisé concernant les liens étroits entre des membres du Parti libéral au pouvoir et la mafia américaine ;
– les élections législatives du 29 octobre 1973 ;
– les conflits d'intérêts impliquant des membres du gouvernement détenteurs d'actions dans des sociétés favorisées par le régime du Premier ministre Robert Bourassa.

Le 5 juillet 1973, le leader parlementaire du Parti québécois à l'Assemblée nationale, Robert Burns, porte au gouvernement de Robert Bourassa le coup le plus dur depuis la crise d'octobre 1970 (Journal de l'année 1970-71). Il dévoile, en effet, le contenu de conversations entre des membres du gouvernement et des chefs de la pègre, conversations enregistrées par la police au cours d'une vaste enquête sur le crime organisé. Elles démontrent, sans doute possible, que l'ex-ministre du Travail, Pierre Laporte, exécuté par les terroristes du Front de libération du Québec (FLQ), entretenait des relations suivies avec des dirigeants du monde interlope. Elles impliquent également son chef de cabinet, René Gagnon, ainsi qu'un organisateur du Parti libéral, Jean-Jacques Côté. Il sera établi plus tard, au cours des séances de la Commission d'enquête sur le crime organisé, que d'autres ministres et organisateurs libéraux étaient fréquemment sollicités par différents chefs de la mafia.

Ces révélations gênent les libéraux, qui se hâtent d'ajourner la session parlementaire. Quant au Premier ministre Bourassa, il se porte garant de l'intégrité, de la compétence et de l'expérience de feu Pierre Laporte. Il avertit également ceux qui brandissent des dossiers de police contre son gouvernement que « ce jeu se joue à deux ». Il défend les liens de ses collègues avec la pègre, en admettant qu'il est inévitable que la mafia souscrive à la caisse électorale de son parti.