Amérique

Canada

Ottawa. 21 850 000. 2. 1,6 %.
Économie. PNB (71) 4 301. Production (71) : G 151 + A *112 + I 159. Énerg. (*71) : 3 167. C.E. (71) : 19 %.
Transports. (*71) : 3 518 M pass./km, 173 094 Mt/km. (*71) : 6 967 200 + 1 856 000.  : 2 381 000 tjb. (*71) : 7 051 M pass./km.
Information. (71) : 115 quotidiens ; tirage global : 4 605 000. (71) : *16 850 000. (71) : *7 610 000. (69) : fréquentation : 78,9 M. (71) : 10 253 000.
Santé. (70) : 31 166. Mté inf. (70) : 19.
Éducation. (69). Prim. : 3 841 040. Sec. et techn. : 1 812 871. Sup. : 562 648.
Institutions. État fédéral indépendant en 1931 (Statut de Westminster). Constitution de 1867. Gouverneur général représentant la Couronne britannique : Jules Léger. Premier ministre : Pierre Elliott Trudeau.

Trois crises : politique, inflation et énergie

L'inflation, la chute du gouvernement minoritaire du Premier ministre Pierre Elliott Trudeau et la crise du pétrole sont les préoccupations majeures des Canadiens. Ces questions prennent, au printemps 1974, des proportions exceptionnelles, reléguant au deuxième rang les élections provinciales.

Inquiétudes

Pour la première fois depuis vingt-deux ans, l'économie souffre d'une poussée inflationniste que les efforts conjugués des gouvernements fédéral et provinciaux ne parviennent pas à freiner. La flambée des prix à la consommation est aussi prononcée qu'à l'époque de la guerre de Corée, en 1950-51, alors que l'inflation atteignait 11,8 %. Depuis un an, le coût de la vie grimpe d'environ 1 % par mois. C'est l'effondrement. En avril 1974, le pourcentage annuel de l'inflation s'élève à 10,4 %. Les produits alimentaires coûtent 18,6 % de plus, les vêtements, 10 %, le logement, 7,5 %.

Pour les consommateurs, le dollar canadien ne vaut plus que 62 % de sa valeur réelle.

L'érosion toujours plus accentuée des revenus des travailleurs force le gouvernement libéral d'Ottawa à adopter des politiques anti-inflationnistes dans les secteurs les plus touchés. Le 4 septembre 1973, il soumet à l'approbation des députés de la Chambre des communes fédérale un train de mesures législatives que le Nouveau parti démocratique (NPD), qui détient le pouvoir de faire pencher la balance, s'empresse d'appuyer. Les nouvelles lois réduisent le prix du lait, maintiennent le prix du pain, haussent les allocations familiales et les pensions de vieillesse, gèlent les prix du pétrole jusqu'en 1974 et, enfin, mettent en place des mécanismes de contrôle des prix du pétrole et des exportations de la viande aux États-Unis. Le 16 octobre, le ministre des Finances, John Turner, ajoute à ces mesures l'indexation de l'impôt des particuliers au coût de la vie. Cette dernière mesure est imitée par les gouvernements de neuf des dix provinces canadiennes, à l'exception du Québec.

Cette politique anti-inflationniste ne donne aucun résultat tangible. Durant l'hiver les prix continuent de monter.

Blocage

L'aggravation de la situation permet au Parti conservateur de Robert Standfield, l'opposition officielle à Ottawa, de réclamer le gel des prix et des salaires. Le Premier ministre P. E. Trudeau s'y refuse. En période de paix, dit-il, un tel contrôle est toujours impopulaire. Les conservateurs lui répliquent que les États-Unis l'appliquent depuis plusieurs mois et qu'ils enregistrent un taux d'inflation moins élevé que dans la plupart des pays d'Europe.

Pendant que le débat entre libéraux et conservateurs se prolonge à la Chambre des communes, les sociétés canadiennes enregistrent une augmentation de 28 % de leur profit net. Le gouvernement Trudeau constate alors l'échec de ses politiques anti-inflationnistes. En février, le Premier ministre amorce une nouvelle lutte contre la hausse des prix en déclarant : « Nous ne laisserons pas les sociétés rapaces amasser des profits inattendus et immérités aux dépens des Canadiens. »

Il faut cependant attendre le 29 avril pour qu'un projet de loi vienne concrétiser la volonté des libéraux de contrer les ambitions démesurées des sociétés. Le ministre fédéral de la Consommation et des Corporations, Herb Gray, présente aux députés le projet d'une législation visant à bloquer temporairement les prix de produits qui font l'objet de bénéfices excessifs et de les ramener à leur niveau antérieur. Ce projet de loi contient également des dispositions empêchant les sociétés de créer artificiellement une pénurie en constituant des stocks. Toutefois, l'opposition doute des intentions du gouvernement. Les conservateurs et les néo-démocrates exigent des actions plus draconniennes. Le Parti libéral, le 7 mai, propose un budget aux visées anti-inflationnistes, pour réduire prudemment l'expansion de l'économie. Il frappe lourdement les compagnies minières et pétrolières tout en soulageant un peu les contribuables-consommateurs.

Censure

Le geste du gouvernement arrive trop tard. La défaite des libéraux s'avère l'unique préoccupation des hommes politiques fédéraux. Le 8 mai, les néo-démocrates et les conservateurs s'unissent pour faire tomber le gouvernement Trudeau, sur une motion de censure qui condamne le budget exposé par le ministre des Finances, John Turner. C'est la première fois dans l'histoire politique canadienne que l'opposition, à la Chambre des communes, vote contre un budget gouvernemental, mais c'est la troisième fois qu'un gouvernement est renversé par la Chambre. Toute la vie politique est suspendue aux élections qui doivent se dérouler le 8 juillet 1974.