Le public attend beaucoup d'une réforme qui a fait couler tant d'encre et dont il a tant entendu parler. Quelques mois plus tard, force est de constater, avec le recul, que les programmes (perturbés pendant plusieurs semaines de grèves) subissent souvent, au tout dernier moment, des modifications dues à un manque d'organisation. Les téléspectateurs n'y trouvent évidemment pas leur compte. La cohabitation entre créateurs et gestionnaires se révèle plus difficile dans la pratique que sur le papier. Un malaise a disparu, un autre s'installe, et la morosité subsiste.

Les programmes de l'été sont construits autour de films souvent bien choisis et de feuilletons présentés en deuxième diffusion – Quentin Durward, La maison des bois, La princesse du rail –, de quelques séries étrangères et des inévitables Jeux sans frontières qui ont cessé de passionner.

ARTHUR CONTE, le nouveau PDG de l'Office, est né le 31 mars 1921 à Salses (Pyrénées-Orientales). Fils de viticulteur, il devient journaliste en 1945. Écrivain (La légende de Pablo Casals, Sans de Gaulle, Lénine et Staline), plusieurs de ses livres reçoivent des prix : Les promenades de M. Tripoire (prix Courteline 1955), La vigne sous le rempart (prix Sully-Olivier de Serres 1957), Yalta ou le partage du monde (prix Historia 1964). Maire de Salses depuis 1947, ancien ministre, il est l'ami des hommes politiques et des poètes. Il pratique le golf.

Harmonisation

En septembre, Arthur Conte précise, au cours d'un entretien accordé à un journaliste de l'agence France-Presse, les grandes lignes de sa politique. L'une des principales réformes qu'il préconise réside dans la nécessité de complémentarité et d'harmonisation des programmes des deux chaînes, chacune conservant sa propre personnalité. L'idée n'est pas nouvelle ; depuis des années, on assiste à une oscillation permanente entre concurrence et complémentarité. L'annonce de cette complémentarité future entre l'information des deux chaînes inquiète les critiques ; ils craignent d'y voir la fin d'une émulation qui a fait ses preuves quant au regain d'objectivité.

Le PDG précise encore quelques points importants : les émissions historiques retrouveront une place de choix dans la grille des programmes, les littéraires seront profondément remaniées et les enfantines entièrement revues. Jacqueline Joubert, ancienne speakerine devenue productrice puis directrice d'une section de production d'émissions de variétés, est chargée d'étudier les problèmes des émissions pour la jeunesse. Le directeur annonce aussi la réforme des journaux télévisés et la décision de recruter de jeunes écrivains de talent.

La nouvelle grille fait son apparition en octobre. Les changements sont timides. Les dossiers de l'écran sont désormais diffusés le mardi au lieu du mercredi en raison du déplacement du congé scolaire. On assiste, sur les deux chaînes, à un double chassé-croisé entre les programmes du mardi et du mercredi et ceux du jeudi et du vendredi. 72, nouveau magazine, ne suscite pas l'intérêt du public, saturé d'information ; Actuel 2 ne fait guère preuve d'originalité dans sa formule.

Ce sont finalement, une fois encore, les films – un secteur où la qualité s'installe –, les séries américaines et les variétés (sans variété) qui dominent. Après des mois d'effervescence de couloirs, le programme se révèle aussi terne que par le passé.

Feuilletons

Les fêtes de fin d'année proposent une avalanche de feuilletons, dont certains sont bien faits ; mais la concurrence joue et il est impossible de les suivre tous. Cela est heureux, car le téléspectateur moyen, s'il pouvait les voir tous, risquerait de fâcheuses confusions entre les diverses intrigues. Beaucoup de films aussi – Tom Jones, Le milliardaire, Rio Bravo, Il ne faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages, Les clowns, Les fêtes galantes, La maison des Bories, Le guépard –, quelques variétés – gala de l'UNICEF, Sylvie Vartan vue par Reichenbach –, les habituels classiques que l'on croit imposés par les circonstances – Les précieuses ridicules, Barbe-Bleue, La traviata, Les mousquetaires au couvent –, et quelques dramatiques – Dodin Bouffant – complètent un programme construit autour des feuilletons. Mais le grand événement reste le lancement, le 31 décembre, de la troisième chaîne. Vingt-six pour cent des Français – régions de Paris, Lille et Strasbourg – peuvent suivre, en moyenne, trois heures de programme quotidien.