Ce n'est pas sans une certaine déception que nous avons vu l'acteur Richard Attenborough réaliser un consciencieux et académique hommage à Winston Churchill (Les griffes du lion) dans la tradition des pieuses hagiographies, lui qui avait il y a quelques années tourné Ah ! Dieu, que la guerre est jolie !, grinçante satire antimilitariste mise en scène avec verve et humour.

Pays de l'est

La Hongrie, qui depuis bientôt huit ans domine sur le plan qualitatif toute la production des pays d'Europe centrale, nous a proposé un chef-d'œuvre de Miklós Jancsó, Psaume rouge. Jancsó – dont on a pu voir également Agnus Dei, chronologiquement antérieur à Psaume rouge – est enfin reconnu comme l'un des cinéastes majeurs de son temps.

L'URSS, grâce à deux films d'Andrei Mikhalkov-Kontchalovski (Le nid des gentilshommes et surtout Oncle Vania) et à L'oiseau blanc taché de noir, de Iouri Ilienko ; la Pologne, grâce à l'excellente Troisième partie de la nuit, d'Andrzej Zulawski, chef de file très doué de la nouvelle génération cinématographique de son pays ; la Tchécoslovaquie, grâce à des œuvres déjà anciennes (Marketa Lazarova, de Frantisek Vlacil, et la Famille Homolka de Jaroslav Papousek), n'ont pas été absentes de la programmation des écrans français, mais ces quelques échantillons – même de qualité – ne représentent que faiblement la production générale de nations qui s'imposent avec difficulté sur les marchés de l'Europe occidentale.

Il faut signaler également l'apparition du cinéma bulgare en circuit commercial avec L'iconostase, de T. Dinov et C. Christov, et La corne de chèvre de Methodi Andonov.

Divers

Le Suédois Ingmar Bergman n'a pas fini de nous étonner. Bergmaniens et anti-bergmaniens semblent cette fois s'être réconciliés autour d'un véritable chef-d'œuvre : Cris et chuchotements.

Nul n'a jamais mieux peint cette tragique musique de l'âme, nul n'a jamais mieux décrit cette angoisse de vivre, cette révolte devant la souffrance, cette impuissance de l'homme à donner un sens à la mort. Cette poignante sonate en rouge majeur est admirablement interprétée par trois actrices familières de l'univers de Bergman : Liv Ullmann, Harriet Andersson et Ingrid Thulin et une nouvelle venue -admirable – Kari Sylwan.

Un tel film risque d'oblitérer la plupart des autres œuvres imparfaites issues des quatre coins du monde. Ce serait profondément injuste. Les rares films d'Amérique latine (Vote + fusil du Chilien Helvio Soto, John Reed Mexico insurgente du Mexicain Paul Leduc), du Moyen-Orient (Les dupes de Tawfiq Salah) et du Maghreb (Décembre de Lakhdar-Hamina) projetés en France ne sont qu'un faible reflet de la prodigieuse vitalité du cinéma dans ces régions.

La saison 1972-73 a mis en valeur le nouveau cinéma japonais, dont les meilleurs représentants sont Nagisa Oshima (La cérémonie), Shuji Terayama (Jetons les livres et sortons dans la rue) et Yoshihige Yoshida (Aveux, théories, actrices).

L'école canadienne (Gilles Carle avec La vraie nature de Bernadette, Claude Jutra avec Mon oncle Antoine, Denys Arcand avec La maudite galette) et l'école suisse (Michel Soutter avec Les arpenteurs, Claude Goretta avec L'invitation) confirment, avec talent, les espoirs des années précédentes.

En Allemagne, Volker Schlöndorff (Feu de paille) et Peter Fleischman (Les cloches de Silésie) nous ont offert des films contestataires en prise directe avec la réalité contemporaine.

Fiches techniques des principaux films

Les titres des films en couleurs sont suivis d'un astérisque.

AGNUS DEI* (H)

Mise en scène : Miklós Jancsó / Scén. original / Images : Janos Kende / Interpr. : Josef Madaras, Mark Zola, Lajos Balazsovits / (Lusofrance).

L'AMOUR L'APRÈS-MIDI* (F)

Mise en scène : Éric Rohmer / Scén. original / Images : Nestor Almendros / Interpr. : Bernard Verley, Zou Zou / (Warner-Col.)

LES ARPENTEURS (CH)

Mise en scène : Michel Soutter / Scén. original / Images : Simon Edelslein / Interpr. : Marie Dubois, Jean-Luc Rideau, Jacques Denis / (Films St André des Arts).

L'ATTENTAT* (F-I-RFA)

Mise en scène : Yves Boisset / Scén. original / Images : Ricardo Aronovitch / Interpr. : Jean-Louis Trintignont, Michel Piccoli, Gian Maria Volonte / (CIC).

L'AUTRE* (USA)

The Other