Les relations de la Libye avec divers États arabes se détériorent. Le 27 novembre, le roi Hussein de Jordanie accuse Tripoli d'avoir prêté main-forte aux fedayin dans un complot destiné à renverser son régime.

Après l'attentat manqué contre le roi Hassan II du Maroc en août, la radio libyenne se solidarise avec les mutins et les appelle à poursuivre leur entreprise. En février, le colonel Kadhafi déclare que dans l'intérêt de la nation arabe la monarchie marocaine devrait être renversée. Le président libyen est accusé par les autorités de Rabat d'avoir financé, entraîné et armé un groupe d'opposants qui avait attaqué, dans la nuit du 2 au 3 mars, des locaux gouvernementaux à Mouley-Bouazze, à l'est de Marrakech.

Maghreb

En revanche, le président Kadhafi déploie des efforts – partiellement couronnés de succès – pour renforcer ses relations avec les autres États du Maghreb. À l'issue d'une visite, du 12 au 17 décembre en Tunisie, au cours de laquelle il a eu de longs entretiens avec Habib Bourguiba, un communiqué commun annonce la constitution d'un « Haut Comité qui se réunira tous les trois mois à l'échelon des chefs de gouvernement », et l'installation d'une ligne téléphonique directe entre les deux chefs d'État. Les deux parties, déclare en outre le communiqué, « sont convenues de considérer le plateau continental, les fonds maritimes et les zones de pêche appartenant aux deux pays comme une unité économique devant être exploitée sur la base de la parité ». Cependant, Bourguiba repousse une offre de fusion entre les deux pays.

Plus discrets, les rapports algéro-libyens paraissent se développer plus harmonieusement « dans la perspective, déclare-t-on de part et d'autre, de l'unité arabe totale entre régimes identiques ». Le colonel Kadhafi et le président Boumediene se rencontrent les 17 et 18 février à Constantine, les 29 et 30 mars à Tripoli, les 7 et 8 avril à Hassi-Messaoud. On ignore l'objet de leurs entretiens, mais, selon certaines indiscrétions, ils auraient porté sur l'éventualité d'un conflit armé avec Israël. Le colonel Kadhafi tente de rallier les pays musulmans, en particulier africains, à la cause arabe contre l'État juif. À la conférence panislamique, qui s'ouvre à Benghazi le 24 mars, le Premier ministre libyen Abdel Salam Jalloud appelle à la libération de Jérusalem. À la conférence de l'Organisation de l'unité africaine, qui se tient du 27 au 29 mai à Addis-Abeba, le représentant de la Libye demande aux États participants de rompre toute relation avec Israël, se livre à une violente diatribe contre l'empereur d'Éthiopie, auquel il reproche ses rapports trop étroits avec l'État juif et les États-Unis.

Pressions

Le colonel Kadhafi a enregistré certains succès en Afrique. En promettant des dons ou des prêts, il a pu persuader cinq États africains de rompre avec Israël : l'Ouganda, le Niger, le Mali, le Burundi et le Tchad. Mais le chef de l'État libyen se rend compte qu'il est loin d'avoir gagné la partie car 26 autres pays africains continuent à entretenir des relations fructueuses avec Israël.

Dès l'été 1972, les attaques du président libyen contre la politique américaine au Proche-Orient s'intensifient. Elles dépassent, en virulence, celles qu'il réserve à l'Union soviétique et à ses alliés dans le monde arabe. Et si le colonel Kadhafi accorde une aide financière au sultan d'Oman pour mieux combattre les maquis d'extrême gauche dans la province du Dhofar, s'il verse des subsides aux mouvements d'opposition au régime marxisant et prosoviétique du Yémen du Sud (Aden), il normalise ses rapports avec l'Irak – à qui il avait reproché la conclusion d'un traité d'amitié avec Moscou – après que le gouvernement de Bagdad ait nationalisé le consortium pétrolier de l'IPC.

Il paraît décidé à accroître les pressions sur le gouvernement américain pour l'obliger à réduire son soutien à Israël. En novembre, il informe Washington que l'espace aérien libyen a été étendu à 185 kilomètres de la côte ; le 21 mars, deux chasseurs libyens attaquent un appareil américain en mission d'espionnage au-dessus de la Méditerranée, qui avait pénétré à l'intérieur des limites fixées unilatéralement par le colonel Kadhafi. Le 8 mai, le premier secrétaire de l'ambassade des États-Unis à Tripoli est expulsé du pays. Le 13, le président libyen, au cours d'une conférence de presse, dénonce le comportement des sociétés américaines, désigne l'une d'elles – le consortium Dasio – comme ayant introduit des agents israéliens dans le pays et proclame pour la première fois qu'il n'hésiterait pas à utiliser « l'arme du pétrole pour peser sur le déroulement du conflit israélo-arabe ».