Journal de l'année Édition 1971 1971Éd. 1971

Conflits

Moyen-Orient

Multiples initiatives diplomatiques sans résultat

En juin 1971, douze mois après l'annonce du plan Rogers (le projet de paix du secrétaire d'État américain), aucune solution au conflit n'est en vue. Cependant, l'année écoulée a connu la phase diplomatique peut-être la plus fructueuse depuis la fin de la guerre des Six-Jours de juin 1967.

À la surprise générale, le président Nasser annonce, le 23 juillet 1970, qu'il accepte d'appliquer le plan américain. Son engagement a d'autant plus de poids que le Rais vient de séjourner près de trois semaines en Union soviétique, où il a eu des discussions serrées avec les principaux dirigeants du Kremlin. Bien que ces derniers ne prennent pas publiquement position, tout indique qu'ils ont donné leur caution au projet américain.

Le plan Rogers

Le plan Rogers est présenté comme un mode d'application de la résolution 242 du Conseil de sécurité, du 22 novembre 1967. Il propose tout d'abord aux belligérants de conclure un nouveau cessez-le-feu pour trois mois (celui de juin 1967 ayant été annulé par la guerre d'usure menée sur le canal de Suez) et de reprendre le dialogue, par le truchement de Gunnar Jarring. En fait, les propositions américaines vont plus loin que la résolution 242 : elles prévoient, dans une phase ultérieure, des conversations directes entre les belligérants, dont le but serait « l'instauration d'une paix juste et permanente ».

Le président Nasser acceptait donc, en principe, une procédure qui devait conduire, dans l'esprit de ses promoteurs, à la reconnaissance de jure de l'État d'Israël et à la conclusion d'un accord de paix contractuel, comme n'a cessé de le réclamer l'État d'Israël.

La décision de Nasser d'accepter le plan Rogers suscite l'indignation des organisations palestiniennes (contre lesquelles il prend des mesures répressives) et une vive opposition de plusieurs États arabes, notamment de l'Algérie, de l'Irak, de la Syrie et de la République populaire du Sud-Yémen. Les autres pays arabes observent le silence ou bien se rallient au point de vue du Caire. Parmi ces derniers figurent la Jordanie, le Liban, la Libye et le Soudan. L'opposition qui se manifeste su sein du parti unique égyptien, l'Union socialiste arabe, et dans certains milieux politiques et militaires est vite maîtrisée par le Raïs.

Vis-à-vis des pays arabes, la décision de Nasser n'est pas dépourvue d'un certain courage politique ; vis-à-vis des dirigeants israéliens, elle pose avec acuité le problème de l'évacuation quasi totale des territoires occupés, réitéré dans le projet américain.

Nasser a-t-il également obtenu l'assurance de Washington que des pressions seraient exercées sur Jérusalem ? Le 24 juillet 1970, le président Nixon adresse une longue missive à Golda Meir, l'incitant à accepter, à son tour, le plan Rogers. Le chef de l'exécutif américain profite de l'occasion pour multiplier les assurances d'assistance dans tous les domaines, militaire, financier et économique. Le 28, le général Dayan déclare qu'Israël n'est pas assez fort pour se passer de l'appui de son seul véritable allié : les États-Unis.

Cessez-le-feu

Finalement, Golda Meir accepte le plan Rogers, le 31 juillet, décision qui provoque le retrait du gouvernement des six ministres du bloc nationaliste Gahal, dirigé par Menahem Begin. Cependant, dans un discours prononcé le 4 août, Golda Meir réaffirme qu'Israël ne reviendra jamais aux frontières antérieures à la guerre des Six-Jours et n'acceptera la mise, en œuvre de la résolution 242 qu'après qu'un accord aura été directement négocié entre les belligérants sur tous les points en litige. Les représentants des quatre grandes puissances, réunis à New York, approuvent, le 5 août, la reprise de la mission Jarring et, le 7, le cessez-le-feu entre en vigueur sur le canal de Suez (la Jordanie avait fait savoir qu'elle s'en tenait à la trêve instaurée au lendemain de la guerre de juin 1967).

G. Jarring a à peine rétabli le contact avec les représentants aux Nations unies des États belligérants, que la crise rebondit. Le 13 août, Israël accuse l'Égypte de profiter de l'arrêt des combats pour consolider ses positions militaires sur le canal, en installant ou en achevant la mise en place de rampes de fusées. En conséquence, le gouvernement Golda Meir décide, le 30 août, de se retirer de la négociation Jarring (décision qui sera mise en vigueur le 9 septembre). Ce n'est qu'après une dizaine de plaintes formulées par Jérusalem à l'ONU que le département d'État américain confirme, le 3 septembre, les accusations israéliennes et demande à l'Égypte et à l'URSS de rectifier la situation sur le canal de Suez. Le gouvernement égyptien proteste, le 4 septembre, et fait valoir qu'il a le droit d'entretenir et, pour des raisons de sécurité, de déplacer des missiles à l'intérieur de la zone du cessez-le-feu, large de 50 km à l'ouest du canal.