Dans les premières, on doit ranger le consul allemand à Saint-Sébastien, l'ambassadeur de Suisse au Brésil.

Au moment du procès de Burgos le 1er décembre 1970, à 10 heures du soir, le consul allemand à Saint-Sébastien, Eugène Beihl, disparaît de son domicile. Il est emmené vers une destination inconnue par des amis politiques des accusés. On reste sans nouvelles de lui jusqu'à Noël quand, à la veille du verdict, il est subitement libéré.

Ce rapt contribue à détériorer les relations entre Madrid et Paris, déjà délicates à l'époque, en raison des prises de position hostiles au procès qui apparaissent dans l'opinion publique française. La presse espagnole révèle que E. Beihl est détenu en France par ses ravisseurs. Celui-ci confirme le fait quelques mois plus tard. Il ajoute qu'il a même réussi à s'enfuir, le 13 décembre, qu'il est entré dans un café pour demander qu'on appelle la gendarmerie, mais qu'il n'a pas réussi à se faire comprendre et que ses geôliers l'ont alors repris.

À la même époque, à Rio de Janeiro, l'ambassadeur suisse au Brésil, Giovanni Enrico Bucher, disparaît, tandis qu'un message transmis aux autorités par l'intermédiaire d'un prêtre indique qu'il ne sera rendu qu'en échange de la libération de 70 prisonniers politiques. Après avoir ordonné de vaines recherches, le gouvernement finit par accepter de négocier et par céder. À la mi-janvier, il fait prendre aux 70 prisonniers politiques désignés par les ravisseurs un avion en direction du Chili. Le surlendemain, après quarante jours de captivité, G. E. Bucher est remis en liberté.

Les victimes

Tous les gouvernements, cependant, ne consentent pas encore à céder au chantage, bien que, les années précédentes, des drames aient déjà coûté la vie aux victimes d'enlèvement. Le gouvernement d'Istanbul, en mai 1971, veut faire preuve de fermeté lors de l'enlèvement d'Ephraïm Elrom, consul général d'Israël dans la capitale turque. Il refuse de se laisser impressionner. Les ravisseurs, qui appartiennent à une organisation gauchiste, exigent au nom du Front de libération turc la libération de leurs amis politiques emprisonnés et menacent de fusiller le diplomate (qui avait été un des officiers chargés de l'interrogatoire d'Eichmann) s'ils n'obtiennent pas satisfaction. Le vice-président du Conseil réplique en faisant savoir que le gouvernement turc « ne ferait aucune concession et prouverait au monde entier qu'il y a, en Turquie, un véritable État ». Le couvre-feu est institué, une fouille systématique des immeubles de la capitale est entreprise. Le 23 mai, six jours après l'enlèvement, le corps d'Ephraïm Elrom est retrouvé dans un appartement vide.

Avec le temps de l'enlèvement des diplomates, celui des otages est-il définitivement arrivé ? Car, après les ambassadeurs et les consuls, les hommes politiques, les responsables économiques voient venir leur tour. Tandis qu'au Canada, en automne 1970, le ministre du Québec Pierre Laporte est assassiné par le FLQ, les enlèvements se sont multipliés en Amérique du Sud, notamment en Uruguay. Dans ce pays, les Tupamaros, qui détenaient depuis juillet le consul brésilien, ne se sont pas contentés de s'emparer, en janvier 1971, de l'ambassadeur de Grande-Bretagne, Geoffroy Jackson. Ils se sont successivement saisis, en une seule année, d'un agronome américain, d'un procureur général de l'Uruguay et du directeur de l'Électricité nationale, principal conseiller du président de la République.

Plus grave encore : va-t-on assister à la prise d'enfants comme otages ? C'est en tout cas ce que donne à craindre l'affaire Sibel Erkan qui s'est déroulée en Turquie une semaine après la découverte du corps du consul général d'Israël. Deux des assassins présumés de ce dernier, des jeunets gens, identifiés et poursuivis, se réfugient dans la banlieue d'Istanbul, dans la villa d'un officier, le commandant Erkan. Après avoir fait sortir la femme et le plus jeune fils de l'officier, ils décident de garder en otage sa fille de quatorze ans, Sibel. Ils menacent de la tuer si on ne les laisse pas sortir librement. Cette fois encore, les autorités ne cèdent pas. Après un siège de quarante-huit heures, auquel participe le propre père de l'otage, des tireurs interviennent : ils blessent mortellement l'un des deux ravisseurs, s'emparent de l'autre et sortent indemne la fillette, qui gît au sol, ligotée.