Harmonie et qualité ont rarement été sauvegardées au cours des années passées et les deux chaînes ont connu tantôt le régime de la complémentarité, tantôt celui de la concurrence.

Un privilège

Au cours de la saison 1970-71, et en dépit des souhaits formulés de concurrence harmonisée, l'anarchie de la coordination est souvent cause de l'embarras du téléspectateur ; il conserve encore un réflexe regrettable qui le conduit à consulter, en priorité, le programme de la première chaîne, celui de la deuxième n'étant là, dans l'esprit de beaucoup, que pour pallier la carence de la première.

Lorsque le choix semble difficile, en raison de programmes comparables présentés à la même heure, bon nombre de téléspectateurs se sentent frustrés et s'orientent systématiquement vers la première chaîne. Cet état d'esprit maintient les 625 lignes au rang de parentes pauvres, malgré de réels efforts et une qualité souvent supérieure.

En prenant délibérément le parti de la concurrence, même nuancée, la direction de l'Office souhaitait faire disparaître le privilège dont jouit le premier programme. Un concours avait même été organisé afin de donner à la deuxième chaîne un nouveau nom, privé de toute idée hiérarchique. Pour des raisons internes, le projet échoua. Bouleverser les habitudes des Français est une tâche bien difficile. Seuls ceux qui possèdent la couleur — bien que les prix aient considérablement baissé, c'est encore un privilège, et c'est dommage ! — sont des amateurs acharnés du deuxième programme. Ils pèchent souvent par excès contraire et refusent de regarder une émission de la première chaîne, sous prétexte qu'elle est diffusée en noir et blanc. En fait, on est amené à constater qu'il n'y a pas de choix réel.

Troisième étape

Après un été marqué, sur la première chaîne, par le retour de Jeux sans frontières et Intervilles, sur la deuxième, par l'absence de programmes particuliers et, dans les deux cas, par de nombreuses rediffusions d'émissions anciennes, le directeur général annonce une nouvelle phase de la réforme de l'Office. La création de deux unités autonomes d'information intervient en septembre 1969 (Journal de l'année 1969-70). En janvier 1970, deux directions de chaînes décentralisées et une direction de coordination sont créées. La troisième étape de la réforme concerne la réorganisation des domaines artistique et technique, des structures de production et de fabrication.

Mises au point et approuvées par le Conseil d'administration, les nouvelles dispositions s'inspirent de deux préoccupations essentielles, la qualité du programme et la recherche de l'amélioration de la gestion ; elles passent par la décentralisation. Sont ainsi créées, auprès de chaque direction de chaîne, des commissions de lecture ; au niveau de la production artistique, une vingtaine de sections spécialisées qui démultiplient les anciens services ; enfin, au niveau de la fabrication technique, une dizaine d'unités spécifiques.

Le Conseil d'administration et le directeur général ont pour mission de fixer les objectifs et les grandes orientations du programme, ainsi que l'harmonisation entre les chaînes ; mais les responsabilités et les tâches sont, à tous les niveaux, accrues, notamment celles des directeurs de chaînes qui préparent la politique du programme, décident du tournage et de la diffusion des émissions, disposent de leur propre budget et en sont responsables. Annoncées en octobre 1970, ces réformes prennent effet en janvier 1971. Elles suscitent de nombreuses inquiétudes au sein de diverses catégories professionnelles, qui craignent d'assister à un éclatement de l'Office.

Nouvelle grille

À l'automne, Maurice Cazeneuve, directeur de la deuxième chaîne, définit ses intentions devant les journalistes. Après avoir expliqué comment il a été amené à diffuser jusque-là des émissions dont il n'était pas entièrement responsable, puisqu'il n'avait pas participé à leur élaboration, il expose ce que seront les programmes de la chaîne couleur dans les mois à venir. Ses deux idées directrices, pour la préparation de cette nouvelle grille de programmes, ont été de rechercher un ton de communication directe avec le public et de viser, d'une manière systématique, des objectifs de qualité.