Sheila invoque les Rois mages et Dalida nous parle de Lady d'Arbanville : on songe à quelque héroïne d'un roman britannique, mais il s'agit de la très réelle actrice américaine de dix-neuf ans Patty d'Arbanville célébrée en chanson par Cat Stevens.

Retours

Belle rentrée de Gilbert Bécaud fin octobre à l'Olympia. La presse a été unanime à saluer la qualité et l'aisance d'un récital qui panachait habilement l'émotion et la fantaisie, mais en insistant sur cette dernière. Citons pour le premier registre La solitude, ça n'existe pas, et pour le second la Vente aux enchères, soutenue par le violoneux canadien Monsieur Pointu.

N'oublions pas non plus la gentillesse d'Adamo : Petit Bonheur, Salut vieux... Mais le grand triomphateur de la saison a été Charles Trénet, dont on ne savait si sa poésie souriante saurait encore nous toucher au cœur ; il fut ovationné et interminablement rappelé lors de sa première à l'Olympia. Aux anciennes romances qui gardent toujours leur attrait, il a su en ajouter d'autres qui ne sont pas moins jeunes et qui jonglent avec les rimes et les images (Il y avait des arbres).

La chanson traditionnelle se porte toujours bien quand elle est défendue par un Tino Rossi (qu'il s'agisse d'une chanson folklorique, la Boudeuse, ou d'une mélodie d'aujourd'hui, Mon pays).

On a réédité Alibert, Georgius, et Ouvrard, le comique troupier octogénaire, est remonté sur la scène (à l'Olympia en octobre) pour interpréter avec une élocution sans défaut les couplets périlleux de Je suis pas bien portant, un titre qui contredit humoristiquement son incroyable vitalité.

Il faut signaler la très curieuse carrière que fait, en dehors des modes, un Jack Lantier, qui n'opère que dans la romance de charme du style qui faisait se pâmer nos grand-mères. Il joue le jeu avec délicatesse et élégance et s'est conquis un public fidèle en lui redonnant des versions de Vous êtes si jolie, de Ramona ou de la Sérénade du pavé.

Le rire est toujours à la mode. Comme il est de règle, la disparition des deux grands amuseurs que furent Bourvil et Fernandel a redonné un regain de vente à leurs disques.

Quant aux bien vivants, ils font rire sans regret : Pierre Perret avec La porte de ta douche est restée entr'ouverte, et les Charlots avec Merci patron.

Henri Tisot ne peut plus exploiter l'imitation de son illustre modèle, maintenant qu'il est disparu, mais voici qu'un nouvel imitateur monte en flèche : le tout jeune Thierry le Luron avec la Chabanisation et le Ministère Patraque.

Autour de la Commune

Le centenaire de la Commune a donné lieu à des commémorations artistiques de qualité, comme le spectacle Mouloudji-Francesca Solleville ou la série de représentations du très bel oratorio d'Henri Bassis et Joseph Kosma : À l'assaut du ciel. Cette chronique en 7 tableaux, qui fut autrefois créée à la Mutualité, a été reprise par l'Ensemble populaire de Paris, dirigé par Gilbert Martin-Bouyer, et un 30 cm restitue les admirables chansons : la valse Paris en fête, la poignante Chanson de toile, la ronde irrésistible des Enfants de la Commune jusqu'au noble chœur final.

Jean Ferrat a écrit une chanson intitulée la Commune. Le Groupe 17 a interprété les chants d'époque : la Semaine sanglante, Elle n'est pas morte et ce Temps des cerises que Jean-Baptiste Clément dédicaça par la suite à une ambulancière des dernières barricades. Il faut citer le 30 cm Autour de la Commune (1846-1888) par Marc Ogeret, lequel a par ailleurs une abondante et fort belle production dans le secteur des chansons du refus et dans le répertoire des authentiques chansons de marins.

Les solitaires

Loin des routes nationales du gros succès, il existe de nombreux artistes qui méritent que l'on signale la qualité de leur création : Luce Klein (Vous savez bien), Guy Bontempelli (la Trentaine), Jacques Marchais (Sur le ruban dans le 30 cm « On a chanté les voyous »), James Olivier (dans des interprétations chantées de poèmes de Norge, Laforgue, Cocteau, René-Guy Cadou...), Monique Morelli, Hélène Martin, Béatrice Arnac...