À signaler, cependant, une revanche sur le plan international : l'Oscar de la meilleure musique de film pour l'année 1971 a été décerné, à Hollywood, à un musicien français, Francis Lai, pour sa partition de Love Story. Quelque 200 interprétations différentes du thème du film et de la chanson ont été enregistrées en un temps record dans le monde entier : Frank Sinatra, Ella Fitzgerald, Andy Williams, Humperdinck, Astrud Gilberto, Mireille Mathieu. Colette Deréal, Tino Rossi, Patty Bravo, les orchestres de Paul Mauriat, Franck Pourcel, Ray Conniff... et même le Philadelphia Orchestra dirigé par Eugène Ormandy !

Le Je t'aime... moi, non plus de Serge Gainsbourg s'est vendu à 4 millions d'exemplaires. On lui doit la musique du film Cannabis, dans lequel il a tourné en compagnie de sa jeune femme, Jane Birkin. Il lance en 1971 une œuvre d'une conception originale, une comédie musicale enregistrée de trente minutes : l'Histoire de Melody Nelson.

La course aux « tubes »

La compétition devenue traditionnelle des tubes de l'été a vu s'affronter, outre Michel Sardou, Johnny Hallyday avec son Jésus-Christ transformé en héros hippie par la grâce de Philippe Labro, le jeune Canadien Marc Hamilton avec Comme j'ai toujours envie d'aimer, les Rare Bird avec Sympathy, et quelques autres... Mais l'alpiniste des hit-parades est décidément Joe Dassin, qui a atteint plusieurs fois les sommets avec des titres différents : l'été 1970, avec l'Amérique, puis, après la rentrée, avec des airs comme la Fleur aux dents et l'Équipe à Jojo... Chansons bien faites, bien rythmées, et la voix de Joe est naturellement phonogénique.

Parmi les jeunes qui montent, Serge Prisset (Colombe ivre et Tes lèvres ont le goût du beaujolais nouveau), Jean-François Michaël (Je veux vivre auprès de toi), Mike Brant (Mais dans la lumière), Gilles Olivier (Dans un lit à baldaquin).

Certains auteurs donnent dans l'onomatopée ou le balbutiement : Ra-ta-ta par Antoine et par les Rotation, lesquels renouvellent l'opération avec Tru-la-la. Peter Lelasseux, qui avait obtenu un succès facile avec le Dirlada, lance en janvier Gaï gaï eli gaït.

Régine aussi chante le La-la-la-, mais elle a mis d'autres chansons à son nouveau répertoire : la Grande Pâque, Balayeurs, balayez, la Fille que je suis.

Rika Zaraï a pris goût aux succès et aux bonnes places au hit-parade. On l'y retrouve successivement avec Tante Agathe et les Jolies Cartes postales. Juliette Gréco n'a plus de chansons très percutantes, sauf les amusants Pingouins de Frédéric Botton.

La firme Polydor joue la carte des vedettes de cinéma avec Delphine Seyrig, qui enregistre son premier disque (Une fourmi et moi), avec Melina Mercouri (Je suis Grecque), et en laissant Jeanne Moreau enregistrer un nouveau 30 cm, uniquement composé de chansons dont elle a écrit les paroles... et elles sont très bien tournées : la Célébrité, la publicité, ou le charmant sirtaki Notre île, ton île, mon île.

Dani, au charme acide et impertinent, a vu son talent couronné par un prix Charles-Cros. La petite qui revient de loin a été composée pour elle par Pierre Vassillu, mais il faut aussi avoir entendu la marche intitulée Mon p'tit photographe soutenue par un invraisemblable accompagnement, martial en diable, de la batterie-fanfare des Gardiens de la paix.

Nana Mouskouri poursuit une carrière internationale (la plus grosse vente de 30 cm en Angleterre et en France) et on a aimé ses interprétations de Pauvre Rutebeuf et du Tournesol.

Serge Lama représentait la France au Grand Prix de l'Eurovision en avril avec Un jardin sur la terre, mais c'est la charmante Séverine, Parisienne au demeurant, qui a remporté le premier prix en défendant pour Monaco Un banc, un arbre, une rue.

Autre jardin, autres arbres... ou plutôt ce sont les mêmes, avant que notre folie les saccage : « Il y avait un jardin qui s'appelait la Terre »... chante Georges Moustaki avec cette voix de résignation mélancolique.

Rentrée de Philippe Clay, qui célèbre Mes universités ; montée de Julien Clerc, qui réclame à l'Olympia Des jours entiers à t'aimer, et de Béa Tristan (Au prochain printemps), qui est passée avec sucés à Bobino avec Félix Leclerc.