Dans les pays musulmans, où il reste encore 200 000 juifs, leur situation varie selon les régimes. Ceux qui vivent en Iran, en Tunisie et au Maroc ne sont point inquiétés. En Égypte, en Syrie, en Irak et au Yémen, l'insécurité est permanente. De nombreux juifs sont emprisonnés ; en Irak, leur situation est particulièrement dramatique. Elle commence à se détériorer au Liban.

Antisémitisme

Dans les pays de l'Est, une évolution spectaculaire se manifeste. Les juifs de Russie, que l'écrivain Elie Wiesel avait baptisés « les juifs du silence », commencent à exprimer ouvertement leurs revendications. Plusieurs lettres sont parvenues au siège de l'ONU ; elles émanent de juifs soviétiques qui réclament le droit de quitter la Russie pour se rendre en Israël. En signe de protestation, un jeune juif de Riga, Ylio Rips, s'est suicidé par le feu. D'autre part, l'exode des juifs de Pologne et de Tchécoslovaquie se poursuit ; les premiers ont été massivement accueillis par le Danemark.

En Europe occidentale, les polémiques du sionisme et de l'antisionisme semblent avoir quelquefois suscité de nouvelles formes d'antisémitisme. La France a connu diverses rumeurs (Orléans et Amiens) accusant des commerçants juifs de se livrer à la traite des Blanches. Des affrontements violents ont fréquemment opposé étudiants prosionistes et antisionistes et inquiété l'ensemble de la population juive du pays. Le grand rabbin Kaplan fit part de ces inquiétudes au président de la République. Le cardinal Marty et de nombreux dignitaires de l'Église ont dénoncé officiellement la recrudescence du racisme et de l'antisémitisme.

Rapports judéo-chrétiens

C'est dans le domaine des relations judéo-chrétiennes que l'on a enregistré cette année des progrès sensibles. Pour la première fois, une chaire d'histoire de la littérature, créée à l'université pontificale grégorienne de Rome, a été confiée à un juif : le rabbin américain David Neiman. Une commission commune à l'épiscopat et au rabbinat de France a été constituée. Elle étudie les moyens à mettre en œuvre pour que juifs et chrétiens apprennent à mieux se connaître. Elle est animée par Mgr Elchinger, évêque de Strasbourg, qui, dans une note pastorale publiée au nom des évêques du Comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, a pris fermement position contre l'antisionisme, déclarant notamment : « Certains journaux ou périodiques ont publié au cours de ces derniers mois des articles ou des appels qui invitent les chrétiens à lutter contre le sionisme.
– Nous désapprouvons ceux de ces articles ou appels qui, en référence aux événements du Proche-Orient, méconnaissent la dimension religieuse du judaïsme d'aujourd'hui.
– Le souci que les chrétiens doivent avoir des pauvres, en l'occurrence des réfugiés arabes de Palestine, ne doit pas pour autant conduire à des injustices inverses. Il n'y a pas de paix dans l'injustice.
– C'est un fait qu'un grand nombre de juifs n'ont pas trouvé d'autre terre d'accueil que celle d'Israël, tout autre projet politique ayant avorté. L'histoire récente exige de le reconnaître.
– Nous devons dénoncer l'ambiguïté de certaines campagnes d'opinion contre Israël, qui mêlent indûment des arguments religieux à des positions politiques.
– Nous ne contestons pas la liberté des options politiques. Des chrétiens ne sauraient participer à une lutte risquant d'entraîner un nouveau génocide.
C'est notre fonction pastorale qui nous invite à formuler ces observations. »

Le congrès de l'Amitié judéo-chrétienne a publié une importante motion dans le même sens, alors que divers groupes de chrétiens, notamment les groupes Témoignage chrétien, décidaient de soutenir la cause palestinienne.

Manifestations diverses

En France, de nouveaux centres communautaires ont été édifiés à Sarcelles-Garches, Meudon-Clamart, Suresnes et Amiens. Dans le cadre d'une politique de décentralisation, un Consistoire régional, celui des Alpes-Provence, a été créé dans le Midi. Son siège est à Marseille. C'est le troisième consistoire régional de France, après ceux de la région lyonnaise et de Bordeaux.