Une enquête de l'UNAF (Associations familiales) établit qu'en fin 1968 il y avait 9 % de chômeurs chez les jeunes en situation d'emploi, soit environ 250 000 chômeurs entre 14 et 20 ans. Estimation sans doute excessive, mais le chiffre exact doit être d'au moins 150 000.

Cette situation est, en partie sans doute, la conséquence directe du renouveau démographique de l'après-guerre. Chaque année, en moyenne, 850 000 jeunes arrivent sur le marché du travail.

Absence de formation

Pour l'essentiel, cependant, le phénomène tient à l'absence de formation professionnelle des jeunes.

– un tiers n'a aucune formation ou n'a d'autre formation que le niveau scolaire obligatoire ;

– le CAP ne touche, en moyenne, que 20 % de chaque classe d'âge ;

– 60 % des jeunes n'exercent plus le métier appris dix ans plus tôt.

Certains jeunes sans aucune formation s'inscrivent dans les services de la Main-d'œuvre comme vendeurs, manutentionnaires, employés, etc. Mais le nombre s'est multiplié de ceux qui, soit n'ont pas de formation technique (études secondaires difficiles, abandonnées le plus souvent au niveau du BEPC), soit ont une qualification dans un secteur industriel ou une région en régression (habillement, textile, cuirs et peaux ; Bretagne et régions du Sud-Ouest). Peu formés, les jeunes sont également mal informés. Les trois quarts d'entre eux, selon les estimations des spécialistes, n'ont aucune idée, à leur entrée dans la vie professionnelle, sur le métier qu'ils pourraient exercer.

Population vulnérable

L'Office national d'information et d'orientation pédagogique et professionnelle (ONIOPP), qui doit remplacer le Bureau universitaire de statistiques (BUS), n'a pas encore été mis en place.

De même, ce n'est que très progressivement que seront créées les sections jeunes dans les antennes départementales de l'Agence nationale de l'emploi.

Cette population, enfin, est vulnérable, car elle est professionnellement peu — voire pas — représentée. Une loi du 18 juin 1966 a prévu une structure d'accueil dans les entreprises de plus de 300 salariés pour prendre en considération les problèmes spécifiques des jeunes. Encore faudrait-il que cette loi soit suivie d'effet.

La formation professionnelle

L'accroissement continuel du chômage jusqu'en septembre 1968 incite le gouvernement à accélérer la mise en œuvre de la loi-programme de formation professionnelle, mise au point par Michel Debré le 3 décembre 1966.

Aides à la formation

Le Conseil des ministres décide :

– de rattacher la formation professionnelle directement au Premier ministre, par l'intermédiaire de Ph. Malaud, secrétaire d'État à la Fonction publique, coiffant désormais les deux ministères de l'Éducation nationale et des Affaires sociales, qui avaient eu du mal à arbitrer leurs différends ;

– de simplifier les formalités pour développer les conventions : 50 conventions, intéressant 50 000 stagiaires, sont débloquées fin octobre 1968. À la fin de l'année suivante, 15 autres conventions, concernant 25 000 stagiaires, seront signées. Parallèlement, des délégations de pouvoirs sont accordées aux préfets régionaux pour signer des conventions ne dépassant pas 250 000 francs ;

– le principe de l'amélioration du régime des aides aux stagiaires de la formation professionnelle.

Au total, pour 1969, les crédits budgétaires affectés au Fonds de la formation professionnelle se sont élevés à 260 millions de francs, soit 33,4 millions de mesures nouvelles.

Le potentiel d'accueil

L'effort budgétaire devait permettre aux centres de FPA, selon la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, « d'accueillir 50 000 stagiaires, d'en recevoir 13 000 aux centres agréés, cependant que 10 000 stagiaires pourront bénéficier d'une formation dans le cadre des conventions État-profession » (avis présenté sur le projet de loi de Finances pour 1969).

En janvier 1969, cependant, les restrictions budgétaires ont conduit à diminuer légèrement le potentiel d'accueil envisagé, particulièrement pour la préformation.