La réduction progressive depuis 1963 du plancher et des émissions d'effets publics par le Trésor a accru la proportion des crédits à moyen terme dans le coefficient de trésorerie, auquel il était, d'autre part, reproché d'agir à retardement sur des situations dépassées. Selon Michel Debré, ministre de l'Économie et des Finances, le nouveau système des réserves obligatoires devrait « permettre à l'avenir de contrôler le pouvoir de création monétaire des banques tout en laissant à celles-ci une plus grande souplesse dans la gestion de leur trésorerie ».

Forte croissance

Il serait prématuré de juger de l'effet des diverses mesures prises dans l'année, d'après l'évolution de l'épargne et du crédit constatée à la fin de celle-ci. 1966 apparaît toutefois caractérisée à cet égard par :
– une forte croissance des crédits à l'économie (+ 15 % au lieu de 12 % en 1965) ;
– un nouveau recul de l'endettement du Trésor public à l'égard du système bancaire : ce désendettement est estimé à 1 600 millions, bien que l'exécution des lois de finances ait laissé au Trésor une charge sensiblement plus lourde qu'en 1965 ;
– la prépondérance persistante, voire accrue, de l'épargne liquide et à court terme : celle-ci représente les 2/3 de l'ensemble des sommes épargnées par les Français.

L'épargne liquide a ainsi augmenté de 10,84 milliards de francs, contre 9,40 milliards en 1965. Une amélioration est toutefois apparue pour les dépôts à terme.

Cette forte progression des dépôts est due, pour une très large part, à deux formules nouvelles de placement entrées en vigueur en 1966 :
– l'épargne-logement a rapporté en 12 mois plus de 2 milliards de francs d'épargne nouvelle, ce qui constitue un réel succès, alors que la formule antérieure, dite d'épargne-crédit, n'avait rapporté que quelque 230 millions l'année précédente ;
– le livret B des caisses d'épargne, qui permet au titulaire d'un compte de déposer jusqu'à 30 000 francs au total, et qui constitue l'équivalent des comptes sur livrets ouverts dans les banques. Ces formules nouvelles ont également contribué au développement des comptes bancaires, qui, dans leur ensemble, ont réalisé 3,3 milliards de francs d'excédents contre 1,05 milliard de francs l'année précédente.

Deux locomotives

En réalité, toutefois, le deuxième semestre de l'année a été bien moins favorable à l'épargne que le premier. Du moins, le ralentissement de la progression a-t-il été plus marqué pour les dépôts en caisse d'épargne, compte tenu du fait que le second semestre est généralement moins rentable et que les livrets B ont attiré moins d'argent à la fin de l'année. Dans les banques, cependant, ce ralentissement a été beaucoup moins net : aucun signe d'essoufflement n'est apparu en fin d'année, et ce sont bien les comptes sur livrets et les comptes d'épargne-logement qui ont joué le rôle de locomotives jusqu'à la fin de l'année.

Un autre événement a marqué l'année bancaire en liaison également avec la politique du logement : il s'agit du lancement officiel du marché hypothécaire.

Les prêts au logement

Cette innovation répond au souci manifesté par le gouvernement de favoriser le financement des acquisitions ou de la construction de logements à des conditions de durée suffisamment longues et à des taux plus raisonnables. Fonctionnant sous la tutelle du Crédit foncier de France, le marché hypothécaire ouvre à celui-ci, ainsi qu'au Sous-comptoir des entrepreneurs, de nouvelles perspectives.

Il a eu pour effet, s'ajoutant à la pression conjuguée des pouvoirs publics et des promoteurs-constructeurs, d'inciter les banques et les organismes spécialisés à améliorer sensiblement les conditions du crédit immobilier en les rapprochant notamment de ce qui se pratique couramment et depuis longtemps dans la plupart des pays industrialisés : ainsi, au cours de l'année 1966, la formule des prêts hypothécaires sur 15 ou 20 ans, au taux réel de 9 à 10 %, s'est largement substituée aux prêts dont la durée maximale était de 9 ans et l'intérêt sensiblement plus élevé.